Sa peur se dissipa aussi vite qu'elle était venu lorsqu'il vit des tentacules pousser à l'homme qu'il avait percuté. Etait-ce un Orphe ? Peu importait, Antiphane se dit qu'il pouvait avoir confiance. Comme ça, sans aucune raison. Tout à fait ! Il regarda ses propres jambes. « Mais, comment avez-vous fait ? » Cela restait un mystère. Ses jambes se mirent à peser deux tonnes environ. Deux ou trois tonnes peut-être, comme si le sol voulait l'engloutir en commençant par les jambes. Ca devenait une habitude ! Puis comme par miracle, il se retrouva dans un kayak ! Il leva les yeux vers son sauveur, c'était lui ! Comment avait-il put ressentir la moindre menace lorsqu'il l'avait rencontré ?
L'homme-kayak débita une tonne de mots. Il semblait parler une autre langue ! Antiphane le regardait surpris, ne comprenant pas trop ce qu'il baragouinait. Les mots sonnaient longtemps dans sa tête, comme s'il y avait un échos lointain. Il eut un mouvement de recul, ce qui une nouvelle fois le poussa vers lui. « Vous voulez parler de palindromes ? »
Puis une femme tomba du ciel. S'il avait eut la capacité de crier, il l'aurait fait. Mais là il sursauta comme jamais, exécutant un nouveau pas en arrière, ce qui le renvoya encore une fois vers l'homme-kayak. « C'est pas possible ! » Pour aller de l'avant il n'avait aucun problème, mais reculer lui posait problème. La présence d'une femme lui souleva l'estomac. Mais le comble fut lorsqu'elle se retrouva assise sur lui. Il sentit son visage s'empourprer à une telle vitesse que de la fumée sortit de ses oreilles dans un sifflement. Antiphane sentait sa peau lui brulait là où il y avait contact avec la dénommée Benedikta. Seulement cette sensation se concrétisa lorsqu'il vit le dos de la jeune femme s'enflammer. D'un geste violent et à la fois bienfaiteur il la repoussa. « Et merde ! » Il devait cesser le contact à tout prix s'il ne voulait pas brûler vif. A son tour il se leva puis éteignit ces flammes indolores.
« De la grammaire ? » Reprit-il. « Certainement pas ! Voyez quel effet cela me fait ! »
Il regarda Benedikta qui était tombée au sol. Ce n'était pas vraiment de sa faute, l'homme-kayak aurait du savoir que le Cortésien ne supportait pas l'approche des femmes, mais aussi – et surtout – leurs contacts. Quelques images surgirent en lui. Il vit non pas un ogre, mais une baleine ouvrant grand la bouche pour le gober. C'était ça ! Et cela expliquait la présence de l'homme-kayak. Il devait certainement naviguer quand il fut surpris par la baleine ! Mais, comment expliquer la présence de la femme ? Elle... elle habitait ici ?
Il marcha à reculons vers les murs et les caressa d'une main. D'un aspect dur, ils devinrent rouges et moelleux. Il avait la drôle sensation de caresser des boyaux. C'est avec horreur qu'il hurla dans l'esprit des deux personnes.
« Je ne veux pas vivre dans ce ventre !! »
Et comme si la baleine, sortant droit de l'esprit d'Antiphane, prenait un virage trop serré, il fut propulsé contre le mur. Contrairement à tout à l'heure il n'arrivait pas à s'en dépêtrer. C'est comme si la gravitation intestinal de la baleine avait changé. C'était un bien drôle d'endroit. La frontière qui le séparait d'autrui semblait avoir disparu, un peu comme avec l'alcool. Il se rappelait être saoul et dire à son frère « Oui j'ai bu... mais je suis conscient de ce que je dis. C'est bizarre, je pensais être incapable de parler mais je comprends ce que je dis. Tu vois ce que je veux dire ? » C'était à peu près ce qui se passait ici. Comme sous l'emprise de l'alcool, tout était devenu étrange et à la fois normal, comme si rien ne pouvait plus l'étonner. Ce que personne savait, c'est que l'alcool faisait beaucoup rire Antiphane, lui qui était si réservé.
« Ah ah ah ! » son rire raisonnait sans raison.
« C'est étrange » pensait-il encore une fois.