par Siobhán » 17 Mar 2014, 03:04
« Attendre ? Mais j'ai d'autres trucs à foutre que d'attendre moi ! » glapit le jeune homme en entendant sa voisine de cellule essayer de... faire la conversation, le rassurer ? C'était gentil de sa part mais il aurait préféré qu'elle soit un peu plus informative. Bordel, pourquoi tout le monde restait calme ici ??? Même le mec devant lui faisait genre c'était la pause café !
Siobhán grogna un soupir désespéré dans ses paumes. « C'est peut-être bon signe que je sache rien mais pendant ce temps-là, on reste moisir-là ! »
M'enfin c'est pas comme si hurler allait changer quelques chose. Elle avait probablement raison en disant qu'il valait mieux ne pas faire de bazar, vu la tronche et l'attitude des gens ici. Mais mine de rien la minette, elle avait l'air bien sûre d'elle et de la situation, surtout pour quelqu'un d'aveugle qui n'avait personne pour l'aider.
« Ils font souvent des rafles de ce genre dans les Ghettos ? Ça t'es déjà arrivé ? » - En règle générale, ils ne s’intéressait pas à la vie des inconnus comme ça, mais là ça pouvait lui prouver si c'était quelque chose de banal, ou pas. Quoique quand même, vu l'arsenal qu'ils avaient déployés, ça n'avait pas l'air. De toutes manières, un type s'était planté devant sa cellule et lui faisait signe de le suivre, donc il n'avait plus vraiment le temps de papoter.
Allez, zen, calme. On reste calme. On ne dit rien sur l'état d'hygiène de la main posée dans son dos qui le pousse vers l'avant. C'est dommage quand même, le reste des bâtiments de Néobabel semble désinfecté au karcher, mais les soldats en eux-même, ils feraient mieux d'aller prendre une douche.
Les réflexions de Siobhán s'arrête là parce qu'il se retrouve dans un petit bureau, en face d'un autre type affublé d'une insigne qui se présente brièvement avant de submerger de question. Et c'est quoi ton nom, ton âge, ta profession, et ta taille, et le goût du dernier yaourt que t'as mangé... Bordel, ça va jamais s'arrêter !
« Votre Carte d'identité. »
« Hein ? Je l'ai pas. »
« Vous pouvez aller la chercher dans vos affaires personnelles. »
« Non mais quand je dis que je l'ai pas, c'est, je l'ai nulle part. »
« Passeport, permis de conduire, n'importe quel document officiel qui prouve que vos précédentes réponses à mes questions ne sont pas inventées de toutes pièces ? »
Mais on dirait une machine ce mec, il fait peur.
« Ben non, j'ai rien sur moi... »
« Vous savez que la loi impose de porter toujours un document officiel d'identification sur soi ? »
« Mais j'allais juste dans les Ghettos, j'allais pas me balader avec ma carte d'identité, je savais pas que je me ferais arrêter ! »
Siobhán se raidit sur sa chaise et croise les bras. Ooooh, il le sent mal venir ce coup-là. L'employé le regarde déjà par dessus ses lunettes.
« Vous pensez bien que j'ai besoin de preuves de vos affirmations. D'autant plus quand elles sont aussi... peu commune. »
« Ça veut dire quoi, peu commune ? C'est quand même pas ma faute si j'habite dans un des quartiers les plus riches de la ville. Il n'y a aucune loi qui interdit aux riches d'aller dans les Ghettos quand ils en ont envie. »
« Oui, effectivement, mais vous, comment ça se fait que vous habitez là ? »
« Je vous demande pardon ? J'ai l'air de venir des Ghettos ? »
« Je ne dis pas ça, je... précise seulement que les personnes de votre genre ont plus tendances à vivre dans les Ghettos, c'est tout. Ce sont des faits, il suffit de lire les statistiques. »
« Non mais... Pardon ?! De mon genre, ça veut dire quoi ça ? C'est parce que je suis un orphe que ça vous embête ? C'est du racisme ! »
« Comme je vous l'ai déjà dit, il s'agit simplement de faits, et calmez-vous. Vous serez bien d'accord avec moi que vous n'avez pas l'air de venir de la Basse-ville, je ne suis pas biologiste, mais ça- » Il pointait son index vers les immenses oreilles du jeune homme. « Ce sont des oreilles de fennec, si je ne m'abuse, qui sont bien connus pour habiter dans le désert. La Basse-ville peut difficilement être considéré comme un désert. »
« Non mais vous rigolez, j'espère ?! Est-ce que vous savez une seule chose sur la biologie et les orphes pour dire un truc pareil ?! Et vous croyez quoi, que je passe mes vacances à Ohime Quinah à creuser dans les dunes pour attraper des rongeurs ?! Je suis un orphe ! Pas un animal ! Je vous signalerais que je vis exactement comme vous excepté que j'achète pas de coton-tiges au supermarché, hein, maintenant si ma race pose un problème et que vous voulez des preuves de mon identité, alors appelez Klaus ou Rose Van Meer, histoire qu'un politique ou une chirurgienne vous apprennent que je porte pas des pulls Raph Lauren par hasard ! »
L'homme reste une seconde ou deux secondes à regarder Siobhán, le temps de réfléchir. C'est un peu stupide aussi de se mettre à dos bêtement un politicien. Au pire, un coup de fil ne coûte rien. Enfin si, le prix de la communication, mais... Un coup d’œil dans sa base de données informatique plus tard – il ne va quand même pas laisser le jeune homme lui donner n'importe quel numéro -, c'est une femme qui décroche, et qui laisse passer un long silence lorsque l'employé lui annonce que son fils est avec eux, accompagné de sa description.
Siobhan se met rapidement à avoir l'air désespéré. Ce n'est pas normalement de mettre aussi longtemps à répondre. C'est pas difficile de se souvenir de son fils. Surtout quand la réponse qui vient lui décroche simplement et purement la mâchoire.
« Je m'excuse. » grésille le haut-parleur du téléphone. « Mais il ne s'agit pas de notre fils. Et... je trouve assez malvenu que quelqu'un essaye d'utiliser la réputation d'un politique respecté de la Basse-ville pour se sortir d'un situation inconfortable. »
L'orphe n'a pas vraiment besoin qu'on lui explique le sous-entendu là-dedans qui dit qu'il ferait mieux d'avoir pensé à la réputation de son père dans le cas où son propre fils se retrouverait derrière les barreaux. Siobhán reste sans voix pendant un petit moment, ahuri par la trahison maternelle ; malheureusement, c'est aussi le temps que met l'employé devant lui pour s'excuser du dérangement, raccrocher et jeter un regard perçant à l'orphe.
Le reste de l'entretien, forcément, ne se passe pas vraiment en faveur du jeune homme qui amuserait presque le type de l'escadron. Faut être vraiment stupide pour demander de passer un coup de téléphone à des étrangers ? Mais c'est possible qu'il comptait lui donner le numéro de quelqu'un capable de jouer la comédie. Peu importe parce qu'il est en train de s'enfoncer quand un autre nom est retrouvé dans ses affaires personnelles lors de la fouille, cette fois celui d'un gamin qui se révèle venir de la Basse-ville.
À ce stade, il commence à en avoir ras le bol d'écouter les protestations et jérémiades du jeune homme et se demande si c'est vraiment la peine de chercher à savoir qui il est et s'il a fait quelque chose de mal. Ils ont déjà coincés plusieurs types durant les premiers interviews et ils se sont pas mal tous dénoncés les uns les autres, mais il n'ont pas mentionné celui-là et il a l'air pas assez dégourdi pour ce genre de truc. Probablement qu'il vend de l'herbe ou on-ne-sait-quoi et franchement, c'est pas les affaires de l'escadron, ça. Autant le garder jusqu'à demain pour vérifier qu'il a rien avoir avec les autres et après, hop, on le bazarde.
Un quart d'heure de vociférations après, le bazarder juste hors de Néobabel était devenu trop peu pour l'employé exaspéré. Il lui avait assez tapé sur les nerfs pour qu'il se venge un peu plus que ça sur ce sale gamin insupportable.
« Taisez-vous ! Je refuse de discuter plus longtemps avec vous. Vous allez rester ici le temps qu'on examine votre cas et après ça, on verra ce qu'on fait de vous. » Il se tourna vers un soldat et Siobhán sut que c'est vraiment perdu, là, cette histoire. « Ramenez-le dans sa cellule et récupérez-moi en un nouveau. »
La tronche de Siobhán quand il revient est plutôt comique, peinte dans une expression de détresse atterrée et parfaitement furieuse ; on dirait qu'il ne sait même plus s'il a envie de hurler et de se jeter sur le soldat tout près de lui, ou s'il va se rouler en boule sur le sol pour pleurer.