La jeune femme s'était elle-même dépêché de se réfugier dans le terrier pour éviter les projectiles des singes qui revenaient à la charge maintenant que le fauve était parti. Cependant voilà, à peine fut elle à l'intérieur qu'on lui annonça qu'elle devait retrouver son chemin là dedans afin de trouver la sortie.
«C'est une blague? On me demande, à MOI, de trouver la sortie d'un labyrinthe?»
Si elle pouvait se déplacer à peu près facilement grace à sa petite taille, ce serait une autre histoire que de trouver son chemin dans ce gruyère. Le panier posé devant elle, à quatre pattes, elle réfléchissait à ce qu'elle devait faire. Elle avait deux solutions, la première était de se transformer, sous sa formé féline, elle avait un meilleur sens de l'orientation et son odorat pouvait lui permettre de trouver la sortie, mais elle ne pourrait pas déplacer le panier. D'autant qu'il n'était pas dit qu'elle entre, en hauteur avec son harnais sur le dos, alors que si elle décidait de ramper sur les coudes sous sa forme humaine, à la façon d'un parcours du combattant, ça passerait, mais elle n'arriverait pas à trouver la sortie.
Elle allait donc devoir alterner. Elle se redressa en se contorsionnant de manière à faire passer le panier derrière elle, avec l'une des lanières de son harnais, elle l'attacha avant d'allonger ses jambes, de se cambrer de manière à poser le panier sur ses cuisses et en relevant les mollets, elle pouvait ainsi bien le caler. Coudes posés dans la terre, elle commença à avancer déjà tout droit dans un premier temps, elle sentait que sa tunique allait finir par se déchirer, et elle n'en avait pas d'autres de rechange cette fois, les organisateurs lui en laisseraient ils une autre? Elle espérait, elle ne se voyait pas terminer l'épreuve entièrement nue. Elle essayait tout de même de relever un peu le buste pour ne pas l'abîmer tout de même, et lorsqu'elle arriva au premier croisement, elle déplia ses jambes, grognant de douleur avant de se redresser pour retirer le panier et reprendre son souffle. Elle avait mal partout et les larmes se mirent à couler. Ici, personne ne pouvait la voir, elle étouffait, elle avait peur d'être ici, et si elle pouvait voir comme en plein jour grace à son tatouage, elle n'aimait tout de même pas être ainsi dans ce trou. Les bras tendus, les jambes et le bassin à même le sol, elle laissait un peu éclater sa douleur, sa peine et sa frustration. Pourquoi s'était-elle inscrite à ce tournoi? Elle avait remporté celui des Hiéras, d'ailleurs elle ignorait comment puisqu'elle avait été bien plus blessée que son adversaire, mais ses prises avaient peut être été plus efficaces. Elle prit une profonde inspiration et ramena sa main sur son visage pour essuyer ses larmes, se couvrant alors un peu plus de terre et de poussière avant de fermer les yeux pour se transformer. Elle ne pouvait pas bouger à cause du panier accroché derrière elle, mais elle leva le museau pour renifler les alentours et elle écarquilla les yeux en se mettant à gronder alors que quelque chose venait. Elle feula comme pour avertir son agresseur qu'elle ne plaisantait pas, et quelle ne fut pas sa surprise de voir des taupes se diriger vers elle et lui passer sous le nez pour prendre sur sa droite, comme si elles ne l'avaient pas vues... certes, les taupes sont aveugles mais elles auraient du la sentir non? Devait-elle prendre cette direction? Peu probable, elles devaient surement rejoindre leur nid et non pas chercher la surface. Mais il était possible qu'elles en viennent en revanche, alors elle avança juste une patte pour renifler et elle gronda à nouveau. Non, les taupes ne regagnaient pas spécialement leur nid, elles fuyaient un prédateur.
Le reptile s'approchait doucement en sifflant, sa langue fourchue dardant l'air en cherchant sa proie
* Sale bête! Pourquoi je me suis pas fait tatouer le scorpion moi!* pensa t'elle, malgré tout, elle se disait que peut être il voudrait continuer à poursuivre les taupes et la laisserait tranquille? Elle recula d'un pas et s'accroupit légèrement, prête à attaquer. Le temps sembla s'arrêter alors que la vipère fixait le fauve de ses yeux jaunes, mais finalement elle traça son chemin et partit à la poursuite de proies plus faciles. Si la féline avait été humaine, elle aurait poussé un soupire de soulagement, cependant les serpents n'étant pas du genre à passer leur vie dans les souterrains, l'idée que la sortie soit tout droit, là d'où il venait, était plus que probable. Elle attendit quelques secondes de plus avant de reprendre forme humaine. L'avantage était que comme elle ne bougeait presque pas entre chaque transformation, elle pouvait conserver sa tunique et il n'y avait personne pour se moquer d'un guépard en robe.
Elle se retourna pour remettre le panier sur ses jambes et se remit à ramper, allant donc tout droit.
À chaque intersection, elle prenait son temps pour reprendre forme animale, humant l'air poussiéreux à la recherche de fraîcheur, et il lui semblait qu'elle était sur la bonne voie car effectivement, cela devenait de plus en plus respirable. D'ailleurs, il lui semblait aussi qu'il faisait de moins en moins sombre, et lorsqu'elle tourna enfin à gauche pour apercevoir la sortie, elle dut mettre sa main terreuse devant sa bouche pour ne pas vomir.
Ah ben oui, la sortie était bien là, cependant... elle était bien gardée. Des dizaines, non... des centaines... non... des milliers de vers grouillaient comme un véritable tapis juste devant le cercle de lumière. Et là, elle pouvait toujours se transformer, grogner, feuler, tout ce qu'elle voulait, ils ne bougeraient pas. Une fois de plus, la jeune femme éclata en sanglot. Ses nerfs étaient en train de lâcher, ces épreuves étaient trop éprouvantes pour elle, et à cet instant, elle ne rêvait que d'une seule chose, prendre un bain tout en étant dans les bras d'Archélas, qu'il la serre fort contre lui et qu'elle puisse sentir son odeur à lui plutôt que cette puanteur. Elle leva de nouveau les yeux vers les bestioles grouillant tranquillement comme si elles n'avaient strictement rien à faire de sa présence, et ce devait être le cas d'ailleurs, puis elle commença à avancer, retenant ses nausées, mais ses larmes coulant toujours le long de ses joues.
Les vers n'étaient pas tous les mêmes, il y en avait des gluants, classiques vers de terre, et d'autres comme recouverts d'une fine carapace jaune orangée, les vers de farine. Et il y avait aussi quelques petits asticots blancs. Ce qui fait que lorsqu'elle commença à «marcher» dessus, elle pouvait sentir la masse visqueuse sous ses coudes, mais également entendre des craquements répugnants. Fermant les yeux, fronçant le nez pour supporter l'odeur, elle continuait d'avancer, sentant la matière gluante sur sa peau et ces bruits d'écrasement atroces. Elle aurait voulu avancer vite, mais elle n'y arrivait pas, elle se trainait et sentait des masses de vers se former au niveau de son ventre et elle devait parfois se redresser pour les retirer rapidement sur les côtés afin de continuer. Jamais, de toute sa vie, elle n'avait autant serré ses cuisses l'une contre l'autre, hors de question que l'une de ses bestioles se réfugie par là. L'ensemble de ses muscles étaient contracté, tétanisé et elle devait principalement contenir ses nausées, et lorsqu'enfin elle sentit l'air frais sur ses bras, elle ouvrit les yeux, s'agrippa comme elle put pour rapidement se hisser dehors, décrocher son harnais et se relever rapidement pour se baisser et vomir. Elle se moquait du spectacle à cet instant, elle n'en pouvait plus. Une main sur l'estomac, elle était couverte de terre, sa tunique puait le ver écrasé et était déchirée par endroits, ses coudes, ses cuisses et ses genoux étaient écorchés jusqu'au sang, quant à ses cheveux, elle paraissait simplement brune à cet instant. Elle finit par se redresser et se tourna pour prendre son harnais et décrocher le panier, les tenant chacun d'une main pour s'éloigner de cette tanière morbide avant d'aller s'assoir plus loin dans l'herbe...
Elle n'y arriverait pas, elle avait besoin d'une pause, il lui fallait de l'eau et des soins, mais elle se doutait bien qu'elle n'y aurait pas droit, et il était peu probable qu'on la laisse quitter cette île désormais sans finir le tournoi... quelle idée avait-elle eu de s'inscrire