Je suis sur qu'il l'a fait exprès!
Cette saleté de lézard visqueux à la langue en pique à brochette, je vais le trucider! Non mais regardez moi là! J'ai pas l'air con franchement! En débardeur et pantalon treillis noir pour passer des épreuves et mes bottes militaires, j'ai l'air de quoi avec le panier du petit chaperon rouge à porter chez mère grand là? Je veux bien que ça corresponde à la couleur de mes cheveux, mais y'a du foutage de gueule!
«Sayah, je te jure que je vais te buter»
Les yeux posés sur la longue plaque de glace qui se dessine devant moi, le panier pour le moment posé devant moi, les bras croisés sur le torse, je réfléchis. Si je pose le pied là dessus, d'une part, je VAIS me casser la gueule, obligé car j'ai jamais été un pro du patinage artistique, et d'autre part, je vais changer la déco de la banquise pour la transformer en pizza surgelée avec les ingrédients du panier.
Bon, alors déjà, il y a un avantage, c'est que la piste est plus ou moins plate, déjà y'a rien à escalader, je me voyais pas spécialement me retrouver en plus à quatre pattes avec le panier entre les dents. Je penche la tête sur le côté avant de me décider à me lancer. Je prends le panier en regardant ce qu'il y a dedans, prenant une profonde inspiration, je le repose avant d'enlever mon débardeur
Ça caille!! Un frisson me parcourt jusqu'à la nuque, mais je préfère recouvrir le panier de manière à ce que rien ne déborde, ce sera déjà ça de gagner. Je souffle un bon coup et pose mon chargement sur le bout de la banquise, et en mettant bien le pied sur le côté, je donne un coup de pied léger dedans histoire de le faire glisser un peu plus loin, voilà, ça c'est fait!
Maintenant le plus dur... faut poser le pied là dessus.. pourquoi j'ai pas des bottes en fourrure moi? Ça s'accrocherait nickel! Bon, tel un robot qui aurait un balai coincé dans le [bip] je lève la jambe en pliant bien le genou avant de le poser bien à plat...
«Sayah je te jure que je vais te buter!»
Je l'ai déjà dit et alors? Je déteste cette sensation d'avoir le pied qui ne repose sur rien, c'est ignoble. Basculant doucement mon poids en avant, je soulève doucement le deuxième pied pour l'amener lentement devant moi.
Ok, déjà pas mal, problème, si j'avance à ce rythme, je vais finir la course sur un fauteuil roulant électrique. D'un autre côté ça ira plus vite. Bon allez, on se motive, on repart, on bascule le poids, on avance, on soulève les gambettes, le premier qui rigole je lui en colle une, même si je dois ramper pour sortir de là! Bon, je commence à peu près à gérer mon équilibre, jusque là tout va bien j'ai du faire aller... 5 mètres. Je suis pas dans la merde, mais au moins j'ai rejoint mon panier.
Je prends une profonde inspiration, soulève un peu mon pied, prêt à pousser de nouveau le panier plus loin, et hop, un coup de pied qui se veut plutôt élégant sur le côté, problème: si ça marche sur la terre ferme avec juste le panier sur la glace, lorsque les deux pieds sont dessus, ça marche beaucoup moins!
BOOM!
Vous vous souvenez de ces dessins animés débiles que les gosses regardent à la télévision où l'anti héros shoot dans un ballon, se loupe et vole dans les airs? Démonstration en direct. Mon pied d'appui a ripé vers l'avant, entrainé par mon poids et je me retrouve les 4 fers en l'air! La bonne nouvelle, c'est que le panier a dégagé sans vider son contenu. Me relevant pour me remettre au moins en position assise, les jambes croisées, je sais pas pourquoi, mais j'ai froid. Ah! Oui! Peut être parce que j'ai le [bip] sur la glace non? Prenant appui sur mes mains pour me relever, une grimace de douleur se dessine sur mes lèvres... pourquoi je me suis pas tatoué ce fichu flocon de neige??
Note pour plus tard, je l'ai déjà dit, mais bordel! Il faut que je me tatoue l'intégralité de mon catalogue!!!
Une fois debout, je garde solidement appui sur mes pieds, frottant mes mains sur mon pantalon pour les réchauffer un peu, j'aimerais bien faire de même avec mon postérieur, mais j'ai pas envie d'amuser la galerie d'avantage, alors je serre les fesses et je repars!
Nouvelle inspiration, les bras écartes - bon sang que j'ai l'air con - et j'avance encore, prudemment, un pas après l'autre, on dirait que je marche sur des œufs, manquerait plus que la glace se mette à craquer et que je doive finir à la nage tiens! Je rejoins de nouveau mon panier, problème, je fais quoi maintenant? Si je shoot dedans, je vais de nouveau me casser la gueule! Donc, nouvelle technique, je dois en être à un peu plus d'une quinzaine de mètres, heureusement que le panier glisse bien sur la glace quoi.
Je descends doucement de manière à me retrouver à genoux, jusque là, tout va bien sauf que la glace, ça brûle! Non je plaisante pas! J'attrape le panier par la hanse, l'empoignant fermement avant de me mettre sur le côté et, comme lorsqu'on veut faire des ricochets, je prends mon élan et lance le panier bien à ras du sol pour le faire glisser plus loin, posant ensuite ma main sur la glace pour me réceptionner.. la classe! Je m'en suis pas trop mal sorti. Bon, je sens plus mes mains, mais c'est un détail.
Je me relève, mes jambes tremblent un peu et vlan! Rebelote que je me retrouve sur le [bip].
«BORDEL!»
Je sais pas si vous voyez le tableau, mais allongé sur le dos, sur la glace tout en étant torse nu, je veux pas dire, mais si je n'avais pas eu mes cheveux, je crois que j'aurais hurlé encore plus fort. Seulement voilà, avec la sueur, je sens ma peau qui accroche et je grimace de douleur en me relevant rapidement pour ne pas rester coller comme une tortue qui se serait retournée sur sa carapace. Grimaçant de douleur, je me relève, je sens ma peau qui me tire, j'ai pas intérêt à renouveler l'opération trop souvent, là ça craint vraiment. Un coup d'œil sur mes mains particulièrement rouges, j'ai vraiment trop froid.
J'essaie de les mettre dans mes poches, je prends un gros risque pour mon équilibre, mais je dois les réchauffer sinon je vais perdre mes doigts plus vite qu'un lépreux dans un hachoir. Plaquant mes mains contre mes cuisses dans mes poches afin d'essayer d'être stable, je me remets en marche... j'espère que c'est pas chronométré parce qu'après avoir joué les tortues, je suis passé aux escargots, dans les deux cas y'a la carapace on dira. Salut petit panier de... hum. Bon, je fais quoi maintenant? La technique du lancer me semblait assez bonne en soit, et j'approche presque de la moitié, seulement voilà, je le sens pas. Tant pis, c'était la plus efficace et celle qui me permet de le lancer le plus loin, donc rebelote, je tombe à genoux, j'entends un léger «crack» non, c'est pas mon pantalon, juste la glace sous mon poids. Non merci j'ai pas envie d'être un nouveau parfum de sorbet!!!
C'est bon, ça tient. Je prends une profonde inspiration avant de sortir mes mains de mes poches, ça va un peu mieux sauf que je change de technique, le genou droit sur la glace, l'autre jambe relevée pour prendre un meilleur appui et ne pas tomber sur la fin et hop! Encore mieux qu'à la pétanque! Y'a pas à dire, je deviens doué avec le lancer de panier garni! Bon maintenant, faut que je me relève, mais mine de rien, d'avoir déjà une jambe repliée ça va aider, je pose mes mains bien à plat sur ma cuisse, ramène un peu ma cheville arrière de façon à prendre une bonne posture et je pousse... doucement, lentement, on dirait presque le penseur de Rodin là! - c'est qui Rodin?
Mais c'est que j'ai réussi à me relever!!! J'en crierais presque de joie si j'avais pas la trouille de me retrouver de nouveau les 4 fers en l'air! Allez, restons calme, franchement là j'assure! Les mains dans les poches pour les tenir au chaud, on va essayer de faire en sorte que mes dents arrêtent de jouer des castagnettes, qu'est-ce que je donnerais pas pour être un morphe et me transformer en ours polaire! C'est sûr que si la prochaine étape consiste à traverser un désert, ça serait pas super pratique, mais là tout de suite, ce serait chouette!
Bon, je reprends mon chemin, à force, je commence à avoir de bons appuis et à bien me tenir un peu courbé jusqu'à rejoindre de nouveau mon panier. Je sors mes mains de mes poches et me frotte les bras pour me réchauffer un peu, mes lèvres ont surement viré au bleu et j'ai mal aux jambes à force de les contracter. Le reste de mon corps me semble totalement engourdi, mais bon, on continue. La fatigue me gagne un peu, mais normalement, un dernier lancer et je serai arrivé, je vois la fin. Reprenant la même position que la fois précédente, je serre les dents pour qu'elles arrêtent de claquer, prends mon élan et
«RAAAHhHHHH!»
Un cri de rage sort de ma gorge alors qu'enfin je le vois filer vers la ligne d'arriver. Baissant la tête pour reprendre mon souffle, je prends doucement appui pour me relever, malheureusement, mes jambes tremblent tellement que je glisse et manque de faire le grand écart...
Aoutch.
Les deux mains posées de chaque côté, je me retiens de hurler à nouveau, bon sang, faudrait que je travaille ma souplesse moi! Je ramène rapidement ma jambe vers moi, l'air me manque assez, il faut le dire, mais je me parviens finalement à me redresser et lorsque je regarde mes mains, elles sont clairement brûlées, je crois même avoir perdu quelques lambeaux de peau dans la bataille. Je suis incapable de plier les doigts alors impossible de mettre de nouveau mes mains dans mes poches. Là ça devient vraiment dur. Je tremble de partout, j'ai mal partout, et j'ai du mal à rester concentré avec ma mâchoire qui claque ainsi, mais j'y suis presque, petit pas par petit pas. Je préfère franchement prendre mon temps et éviter de me casser la gueule, parce que là si je tombe, je meurs...
Allez plus que deux mètres...
Un pas, un autre, encore un...
Plus qu'un mètre, tant pis je tente le tout pour le tout, et un grand pas, mon pied touche la terre ferme, l'autre glisse... grand écart à nouveau, mais en basculant mon poids vers l'avant, je parviens à m'empêcher de trop tomber et je m'en sors sans trop de dommage, ramenant ma jambe arrière sur le sol non glissant. Avant de me relever, ma main part vers le panier que je saisis avant de me redresser et de faire un pas...
J'ai fini
«Sayah, je vais te buter!»
Où est-ce qu'il est le sac à main?