Enfouissant son trophée dans sa poche, elle se laissa tomber sur les fesses et jeta une œillade curieuse aux trois autres, se souvenant subitement qu'ils existaient. Deux guépards et un chien rouge regardaient l'autre Teigne qui gisait au sol, vaincue également. Dommage. Mektild aurait bien aimé se défaire des deux pour prouver sa grandeur et sa bravoure... Ça aurait plu à Manôlis peut-être, mais ne cherchez pas trop à comprendre ce raisonnement absurde. Un truc d'hormones, quelque chose comme ça. Entre fous, ils se comprendraient peut-être ces deux-là. Elle fit un rapide tour de l'arène du regard. Quelques soldats traînaient ça et là et montaient des grilles en prolongement des gradins, renforçant les planches et protégeant le public. Et ça... ça ne sentait vraiment pas bon ! Autre chose semblait être prévu. Sauf que Mektild n'avait pas prévu de tuer d'avantage qu'une Teigne et que ses forces commençaient à lui manquer. Sauf que ça, elle ne l'avouera jamais...!
Elle battit des cils un instant, refusant de croire ce qu'elle voyait. Alors là, c'était le bouquet ! Un Fenrir, rien que ça ? Elle esquissa un sourire. Tuer l'une des créatures qui avait aidé son peuple à venir au monde ? Le loup de légende. Celui qui confia les œufs aux racines salvatrices... Et bien pourquoi pas ? Elle n'avait encore jamais donné dans le Déicide et la proie était beaucoup plus attractive que la Teigne qui ne voulait pas mourir, à ses pieds. Raccrochant son morceau d'armure et réajustant les autres, elle prit le temps de retirer le sable de ses joues et se releva, ses mèches de cheveux blonds maculés de sang collant son visage. Foncer tête baissée risquait de lui coûter la vie. Elle n'avait pas d'arme, son armure ne lui serait peut-être pas plus utile qu'un mouchoir de poche face à la taille – et à la puissance – de la mâchoire du loup... ne lui restait plus que... Que rien en fait. Quelques raclements de gorges dans la foule plus tard, et un phénomène quasi surnaturel se produisit. Là, sous les yeux médusés du public, Mektild avait attrapé son saurien à moitié mort par les postérieurs et commençait à tourner sur elle-même, jusqu'à ce que la force centrifuge soulève légèrement le corps meurtri. Et elle tourna encore, grognant sous la violence du mouvement... jusqu'à tout lâcher et envoyer la créature aux pieds du Fenrir.
« Eh Ordalie, il fait partie de ta famille celui-là, demande-lui d'aller voir ailleurs si on y est ! »