ATTENTION
Les messages suivants s'adressent à un public averti (scènes de violence). Âmes sensibles, s'abstenir.
Kjeld Ares :
- Ils avaient quitté l'auberge, non pas aux aurores comme cela était prévu, mais le soir même, dès le jeune Quilbeeg endormi. Kjeld, qui partageait sa chambre, avait immédiatement donné l'alerte à Zlata, manquant de ce fait de se faire égorger à coup de pipe en bois, et tout deux s'étaient faufilés à l'extérieur comme deux voleurs. Bien entendu, ils avaient payé leur chambre respective, pourtant...
Pourtant, Kjeld se sentait coupable. Quilbeeg n'avait pas l'air d'un mauvais bougre, bien au contraire. Il semblait sympathique, leur avait offert à boire, à manger et à dormir. Seulement voilà, les deux jeunes gens avaient eu leur dose de gamins à se traîner dans les pattes et le jeune blondinet avait beau sembler gentil, il n'en était pas moins pire que la gamine ! Kjeld eut un frisson en repensant à la manière dont le jeune homme s'était vanté de détester l'autorité en place, provoquant la colère de la grande brute au visage enfariné. Non. Ils ne pouvaient décidément pas se permettre de se promener avec un tel danger public dans les jambes. D'autant que leur prochaine étape était Guttenvald et que, d'après ce que Kjeld en avait entendu dire, ce village n'était pas spécialement hospitalier !
« Vous dites que vous connaissez le chemin, saurez-vous le retrouver ? » hasarda le jeune homme qui hésitait sur la façon de renouer un semblant de dialogue avec Zlata.
Zlata Bolt :
- Zlata, pour sa part, ne regrettait en rien leur départ précipité ; Quilbeeg était dangereux. Non seulement il traînait derrière lui une flopée de problèmes, mais en plus, il s’arrangeait pour les partager avec les autres. La Winghox songea soudain que le jeune homme blond était peut-être l’incarnation de la générosité ; il partageait tout, son repas avec ses ennemis…
De toute façon, Zlata était misanthrope. Sa propre compagnie lui suffisait généralement et rare étaient les personnes qu’elle acceptait de supporter. Kjeld en faisait partie. Peut-être était-il d’ailleurs à plaindre car si la mercenaire l’aimait bien - il ne parlait pas trop et savait être discret - elle ne sera pas pour autant plus agréable avec lui. Elle lui reprochait surtout sa trop grande gentillesse qui agissait comme un appât à poids mort, cela le perdra un jour ! Et puis il y avait aussi eu cet événement bizarre le soir où la petite teigne s’était jetée sur eux… Kjeld avait l’air fatigué. Or, il s’était soudain redressé pour murmurer tout en scrutant Zlata : « Enfant maudit… ». S’ils n’avaient jamais reparlé de cet épisode, Zlata ne l’avaient pas oublié.
Perdue dans ses pensées, elle eut un peu de mal à émerger lorsqu’il l’interrogea. Si elle retrouverait le chemin ? Assurément.
« C’est facile : on descend à Guttenvald pour dormir. Ensuite, on passera par les mines de Jaspes. Il ne faudra en parler à personne car je ne suis pas censée connaître les galeries »
Elle se tourna vers lui et le fixa pour appuyer ses mots :
« Ce que nous allons faire est interdit. Les habitants de Guttenvald ne vont pas apprécier que des étrangers les arpentent leurs murs car ces mines sont leur bien le plus précieux. Tu peux toujours renoncer si tu veux. »
Pour sa part, Zlata devait simplement apporter un paquet au contenu non défini à un marchand de Guttenvald. Elle n’avait donc aucune raison de descendre plus au Sud mis à part l’envie de voir du pays. Alors là-bas ou ailleurs, peu lui importait.
Kjeld Ares :
- Facile ? Kjeld tressailli. Zlata avait parfois de drôles de phrases. Elle oubliait juste un tout petit détail insignifiant : il leur faudrait des mois rien qu'avant d'arriver à Guttenvald. À condition qu'ils ne se fassent pas attaquer en chemin par des bandits ou d'autres créatures plus dangereuses, à condition qu'ils trouvent un bac pour traverser le Lapis et à condition qu'ils ne meurent pas de faim en cours de route. Il haussa les épaules. Une telle route ne lui faisait pas peur, il en avait l'habitude pour les avoir souvent parcourues à pieds. Guttenvald, il y avait fait un court séjour une fois mais n'était pas resté, pour sa sécurité. Ce n'était pas tout à fait le village auquel il s'était attendu. On lui avait pourtant parlé de beaucoup de légendes émanant de la ville minière mais les habitants, eux, ne semblaient pas d'humeur causante. En fait, Kjeld avait eu la sensation que plus il posait de question, plus sa longévité se raccourcissait, à en juger par les regards noirs qui se posaient sur lui. Non. Les Guttenvaldois n'aimaient pas les questions et ils n'aimaient pas non plus les curieux.
Pourtant, peut-être parce que la présence de Zlata le rassurait, le jeune homme ne se sentait pas intimidé. Pour tout dire, il commençait à se sentir très excité par cette aventure, plus même qu'il ne l'avait été à sa première rencontre avec Zlata. En effet, lorsqu'ils étaient à Ephtéria, Kjeld errait encore sans véritable but, à l'écoute des rumeurs et légendes du pays. Puis, lorsqu'il avait vu la jeune femme avec ces cornes curieuses, quelque chose l'avait interpellé, sans qu'il parvienne à déterminer quoi exactement. Sa conversation, bien que brève, lui avait alors fait comprendre qu'une vie plus intéressante s'ouvrait à lui. Enfin, il allait pouvoir faire face aux mystères dont il n'avaient que vaguement entendu parler. Et qui sait ? Peut-être allait-il trouver des réponses aux questions qu'il refusait de se poser, comme, par exemple, qui il était.
« Je n'ai pas envie de renoncer, au contraire. » lâcha-t-il distraitement.
Un sourire discret vînt trahir le plaisir nouveau qu'il prenait à faire quelque chose de concret. Il n'avait pas d'objectif particulier mais la seule idée de voir des choses secrètes et mystérieuses suffisait à l'enthousiasmer.
Zlata Bolt :
- Zlata haussât le sourcil devant le sourire discret de son compagnon de route, elle qui pensait l’avoir cerné. La guerrière était persuadée que le jeune homme était un pacifiste profond plus proche du gamin naïf que du sage vénérable. Ce simple sourire à l’idée de partir à l’aventure lui prouvait qu’elle l’avait mal jugé. Et s’il était plus impétueux qu’il n’y paraissait ? La Winghox haussât les épaules, quoi qu’il en soit ils s’apprêtaient tout deux à se jeter tête la première entre les griffes de villageois barbares afin de violer une de leurs lois la plus chère. Que de réjouissance en perspective
Un bruit de galop titilla l’oreille de la Winghox qui se retourna. Filant à bon train sur la route poussiéreuse, deux cavaliers portant la livrée du Roy se rapprochaient d’eux. Les deux hommes ralentir l’allure à quelque foulées et achevèrent de rattraper les voyageur au pas avec la lente assurance d’un fauve traquant son repas. Zlata leur jeta un coup d’œil suspicieux lorsqu’ils se séparèrent pour les prendre en tenailles. Les cavaliers, au vu de leur carrure impressionnante, de leurs biceps sur gonflés et de leurs chevaux mi-lourds, étaient plus que probablement guerriers. La Winghox songea avec ironie que l’idée que ces deux monstres se soient simplement perdus et souhaitent leur demander quelle route emprunter, bien qu’amusante, avait peu de chance de se confirmer.
Kjeld Ares :
- Le soldat afficha un sourire brèche-dent victorieux, il ne lui avait pas était bien compliqué de retrouver le jeune homme silencieux et la grande chèvre qui l’accompagnait sur la route rectiligne et déserte partant d’Aspasie pour aller se perdre dans la forêt des Ombres. Avec un peu de chance les dires du patron de l’auberge du Moulin à paroles se confirmeraient bientôt et lui-même, Jean de Valtours, serait honoré par le Roy lui-même pour son travail extraordinaire au service de l’ordre.
Il se rapprocha de Kjeld, ignorant avec panache la femelle cornue qui le toisait désagréablement, et jeta avec mépris :
« Holà manant ! Nous recherchons le dangereux criminel Quilbeeg Vulpia. Tu as été vu, toi et ta…femme, en sa compagnie la veille. Parle et ta vie sera peut être épargnée ! »
Le soldat se réjouit à l’avance à l’idée de voir les visages des deux marcheurs se décomposer de peur, peut être même qu’ils s’oublieraient. Ce serait vraiment drôle si cela arrivait.