Et une journée de plus au paradis ! (ironique)

Érigés à l'extérieur de la Basse-Ville et de la protection du Dôme, ils sont un curieux mélange de cahutes sommaires et de bâtisses tout à fait décentes. Ils sont nommés ainsi à cause de l'enchevêtrement des maisons, et parce que les habitants y sont peu nantis.

Et une journée de plus au paradis ! (ironique)

Messagepar Vince Gaïdjen » 12 Nov 2010, 10:07

On le savait dans le quartier, Vince était très gentille et très généreuse.
On le savait dans le quartier, Vince était musclée et colérique.
On le savait aussi dans le quartier, qu'il ne fallait pas lui chercher les poux.
On avait essayé de dissuader le petit malin qui prétendait lui voler sa grosse clé anglaise (pourquoi l'appelait-on comme ça, c'est une autre affaire).
Mais le petit malin aimait les défis, il lui avait prise.
Et Vince, la rage au corps, les poings prêts à frapper, parcourait le Ghetto, d'après les indications de ses nombreux amis sur la trace de son petit malin de voleur, qui allait regretter son geste. Les jeunes filles qui ne l'aimaient pas gloussaient à son passage et s'en allaient se terrer chez elles lorsque la mécanicienne s'approchaient d'elles, sous les railleries et les yeux goguenards de leurs frères.
Vince marchait d'un pas (très) ferme, la tête baissée. Ceux qui n'avaient pas l'habitude se demandaient comment cette jolie rouquine pouvait bien négliger sa démarche et être aussi peu gracieuse. Et ceux qui avaient l'habitude souriaient en pensant au spectacle qu'offrirait le voleur une fois corrigé. Les amis de Vince commençaient déjà à construire une sorte de ring sur la place de leur quartier.

Tout ça pour dire que, dans sa colère et sa détermination d'en découdre, Vince ne vit pas la personne devant lui et la percuta de plein fouet. Elle s'arrêta, leva la tête et considéra celui qu'elle venait de tamponner.

- Euh, excusez-moi... Je suis confuse. Je ne vous avais pas vu... Ça va ?


Vince était d'un coup toute penaude devant cet adulte à l'allure de bouledogue. Faut dire qu'elle n'avait pas l'habitude de voir les gens sapés façon cocktail, dans le ghetto.

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Messagepar Lawrence William Hayner » 12 Nov 2010, 12:10

L'homme débraillé leva les yeux au ciel sans même prendre la peine de répondre à miss bulldozer. Ses yeux, sa bouche... tout sur son visage semblait s'arrondir en une expression stupéfaite. Derrière Vince et un peu en hauteur, il y avait... il y avait... et bien euh...

« Atteeentiooooooooooooooon...! »

La seconde qui suivit, la semelle d'une chaussure passa si près de la tête de la jeune garçon manqué qu'elle s'en retrouva toute décoiffée. L'homme s'était jeté à terre, et le responsable de toute cette agitation apparut. Accroché à l'aide d'un harnais bricolé sous les ailes rafistolées d'un minuscule planeur, il effectuait une acrobatique descente en piqué... non contrôlée ! Et pour amortir sa chute, rien de telle qu'une bicoque faite de planches et de tôles enchevêtrées. Elles firent un bruit de tous les diables en se désassemblant sous le poids et l'impact de l'atterrissage forcé de notre as de la voltige. Un grand nuage de fumée se souleva, et quelques boulons et autres objets improbables vinrent rouler jusqu'aux pieds de Vince. Les chiens errants du quartier filèrent en couinant, la queue entre les jambes, et les chats feulèrent en se carapatant, la queue en rince bouteille. Et voilà comment mettre sens dessus-dessous la tranquillité relative des Ghettos. Et la palme de l'entrée en matière la moins discrète de l'histoire de Nideyle revient à... roulements de tambours...

« Est-ce... Est-ce que quelqu'un peut m'aider...? » fit une voix perdue sous les décombres.

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Messagepar Vince Gaïdjen » 12 Nov 2010, 12:32

Vince n'eut pas le temps de réagir que le planeur était par terre en mille morceaux. Ne prenant plus garde à l'homme qu'elle avait percuté, elle se précipita vers les débris. Le conducteur s'agitait là-dessous, essayant de s'extirper de sa position peu confortable. Vince, plus préoccupée de l'état de l'engin que de celui de l'aviateur amateur, s'accroupit près de ce qui restait du planeur et de l'hélice, examinant le tout.
Elle s'aperçut soudain de la main qui tentait de se raccrocher à quelque chose et tira d'un coup le poignet au bout duquel haletait le pilote interloqué. Elle le regarda d'un air sévère avant de de pencher sur lui d'un air de mégère et lui cria :

- Alors vous, on va vous décerner la palme de l'inconscient le plus taré de la ville ! Vous vous z'êtes pas aperçu, mildiou, que l'hélice était tordue ? Et les ailes latérales, là ! Fallait les incliner à 35° pour que ça plane, sinon forcément ça fait appel d'air et vous finissez dans le décor !

Elle retourna à la carcasse et extirpa une pièce pleine d'huile. Elle sortit ses gants de sa poche, les enfila et, extirpant de sa ceinture des outils qu'elle avait toujours sur elle, commença à remettre le tout en état. Elle grommelait :

- Non mais qui est-ce qui m'a monté un foutu zingue pareil ? Si je le tenais, tiens, il comprendrait ce que c'est qu'un boulon ! Pfff non mais regardez moi ça. Je ne peux même pas resserrer le bras à cause de ce fioutu salle gosse à la Krozbak qui m'a chourré ma clé ! J'vais le retrouver il va pas faire son malin...

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Messagepar Lawrence William Hayner » 12 Nov 2010, 13:36

Sonné, oui. C'était le mot. Enseveli sous un amas d'objets plus insolites les uns que les autres, William tenta de se dégager tant bien que mal. Il repoussa un grille-pain, un ventilateur et une immense dalle de PVC avant de voir enfin la lumière du jour. Était-il vivant ? En voilà une question ! La bicoque à l'équilibre improbable venait de lui épargner un séjour à l'hôpital. Il agita la main comme il aurait agité un drapeau blanc, et pour toute réponse à son armistice, il en fut quitte pour se faire hisser vers la surface par le poignet, façon « j'te débouche l'évier ». Encore un peu hébété, le jeune homme porta une main à son crâne où commençait déjà à poindre une jolie bosse. Plus de peur que de mal, mais l'adrénaline soudaine lui faisait encore tourner les sens. Et par dessus le marché, il se faisait engueuler dis donc ! Il leva la tête et entreprit de vérifier la présence au grand complet de ses vertèbres par quelques mouvements. À droite, à gauche, en arrière. Apparemment il ne lui en manquait aucune. Sous ses fesses, une tôle céda à son poids et il se retrouva deux centimètres plus bas. Pas une chute spectaculaire comparée à celle qu'il venait d'essuyer, mais surprenante. Alors il se décida à quitter son tas d'ordures pour ramper jusqu'à la terre ferme. Là, il se rassit et observa Vince. Déformation professionnelle...

Il ne trouva rien à rétorquer à sa remontrance, ou ne souhaita pas le faire immédiatement. C'est qu'elle était rigolote à se pencher sur la santé du planeur comme si sa vie en dépendait. Il inspira profondément – aïe – et se décida enfin à parler.

« À vrai dire, ce planeur n'est pas à moi. C'est un habitant d'ici qui a insisté pour que je fasse un tour avec... ça avait l'air de lui faire tellement plaisir. J'espère qu'il ne m'en voudra pas trop de l'avoir abîmé... »

Il se leva doucement – re aïe – le regard toujours accroché à la chevelure rousse, et aux paroles bien peu féminines. Ce vol d'un objet de bricolage lui appartenant semblait la mettre dans tous ses états. Intéressante...

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Messagepar Vince Gaïdjen » 12 Nov 2010, 14:47

Vince leva le nez de son travail lorsque le pilote se mit à lui parler. Elle le considéra quelques secondes. Blond, yeux bleus. Pas désagréable à l'œil, le bonhomme ! Et il avait l'air bien embêté en plus. Lorsqu'il dit "J'espère qu'il ne m'en voudra pas trop de l'avoir abîmé", la rouquine ne put s'empêcher d'éclater de rire. Rire plutôt féminin, d'ailleurs, ce qui ne manquait pas de surprendre les gens quand on entend la façon dont elle s'exprime.

- Attendez, vous plaisantez, là ? Il est plus abîmé, ce pauvre zingue, il est carrément bon pour la casse ! Qui donc est cet inconscient qui vous l'a prêté ? Il va m'entendre. Il a utilisé des écrous de 15 pour les articulations, il aurait fallu du 24, vous n'auriez pas fini en pâte à crêpe.

Vince se remit au travail. Puis elle se rappela soudain qu'elle n'avait pas récupéré sa chère clé anglaise (comment cela a-t-il pu lui sortir de l'esprit, propriétaire ingrate ?!), et qu'elle en avait besoin. Elle se leva brusquement, envoyant dans le décor un gros bout de plâtre à l'aide d'un royal coup de pied. Le coup de pied n°5, celui destiné à botter le penalty dans un jeu d'équipe inventé par un pote, qui sortait l'idée d'on ne sait où. Elle pointa sa clé de 12 sous le nez de l'homme et lui dit :

- Je vous remet l'oiseau sur pattes si vous m'aidez à retrouver la sale petite crapule qui m'a volé ma clé. Votre généreux bricoleur, si j'ose dire, n'y verra que du feu. Je ne sais pas de qui il s'agit mais, vu le schmilblick il n'est sûrement pas capable de distinguer un mécanisme aussi pourri que celui-là d'une vraie mécanique. Vous m'aidez ?

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Messagepar Lawrence William Hayner » 12 Nov 2010, 16:52

« Un certain Théodore Menezzi, il habite... »

William s'interrompit pour évaluer la distance qui le séparait de son point de départ... Dans tout ce fatras de maisons étranges, déposées ça et là avec une logique tout à fait aléatoire, il ne s'y retrouvait pas. Si les services de voiries devaient tracer des routes et placarder des numéros à chaque porte, il y avait de forte chance qu'ils deviennent fous avant l'heure. Aujourd'hui il y avait un passage entre ces deux bicoques. Demain, une habitation pouvait surgir comme un champignon. Les Ghettos fonctionnaient comme une forêt, c'était très intéressant à regarder. Bref... tout ça pour dire que pour localiser la demeure du propriétaire de l'engin, il allait avoir quelques difficultés. D'autant plus qu'il n'habitait pas vraiment le coin, et qu'il n'était là qu'en visite... par curiosité pourrait-on dire. William était ainsi, il aimait bien observer tout et rien et se plonger dans des univers qui n'étaient pas le sien.

« Et bien il habite quelque part par ici, mais je serais bien incapable de vous dire où exactement. Sa maison ressemble à une gigantesque meringue : ronde, blanche, lisse... Je ne sais pas si vous connaissez. »

Pour lui cette maison avait été une curiosité. Mais pour les habitants des Ghettos, ce n'était peut-être qu'une maison comme une autre. En attendant, il se contenta de sourire à la jeune fille. Quel âge pouvait-elle bien avoir ? Seize ? Dix-sept ans ? Peut-être un peu plus, peut-être un peu moins. Déjà une vraie vocation dans l'âme. Ça le changeait de ses adolescents en mal de vivre qui ne savaient jamais quoi faire de leur avenir, et qui accusaient la société de toutes leurs incertitudes. Elle au moins, vivait sans se plaindre de son sort. Elle le tira même de ses rêveries en le menaçant d'une clé de 12 ! Donnant-donnant ? Pourquoi pas. Il était venu perdre sa journée ici, et il était bien décidé à s'immerger totalement dans ce nouveau monde. C'était comme un gosse découvrant un parc d'attraction. Tout l'émerveillait.

« Je vous aide. Mais il va falloir me dire à quoi ressemble votre voleur. Une idée de la direction qu'il a pu prendre ? »

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Messagepar Vince Gaïdjen » 12 Nov 2010, 20:03

Vince écouta son interlocuteur lui décrire la maison du papa de l'horreur en tôles qu'elle était en train de remettre debout. Le nom de Théodore Menezzi de lui disait rien mais lorsque William décrit la maison son esprit s'éclaira.

- Ah ! Vous voulez parler du Boiteux ! Moui, je vois. On lui a dit plusieurs fois que sa maison était moche mais il n'écoute pas, il est borné. Depuis le jour où il s'est empalé la jambe sur le coin de sa table il ne veut plus voir aucun angle. Tout est rond chez lui. Vieux fou, va ! Sa passion c'est les nuages, parce que c'est cotonneux et tout arrondi.

Un groupe de jeunes passèrent et saluèrent la rouquine, qui leur rendit la pareille d'un salut militaire un peu bizarre qui signifiait, dans le jargon du ghetto, "j'te dis bonjour aujourd'hui mais demain j'te mets minable à la boxe". Puis elle empoigna le bras de son nouveau compagnon et le tira sans ménagement dans une ruelle en escaliers qui serpentait entre un bar douteux et une échoppe de pots en grès. Ils montèrent et, arrivés en haut, après s'être encore engagés dans d'autres couloirs sombres, sous des arcades, ils débouchèrent sur une espèce de cour.

- Bon, le morveux crèche ici. J'vais demander à son paternel c'qu'il en est et si il est pas là, c'qui m'étonnerait pas, on va au cercle.

Vince, sans demander son avis à William, sonna (ou plutôt manqua de décrocher la cloche). Un gros bonhomme ouvrit et son visage se décontracta à la vue de la jeune mécanicienne.

- Alors, tu l'as retrouvé mon moutard ?
- Non, mais j'aimerais savoir où il est allé.
- J'l'ai entendu dire à sa sœur qu'il allait montrer ta clé à ses copains... je suppose qu'ils sont...
- Au cercle ! Merci Dédé !

Elle repartit en courant. Elle avait carrément oublié Will. Avant de s'engager dans la rue, elle freina se retourna et lança au père du gosse :

- Je te l'amène après ?

- Oui, et si tu pouvais le corriger à ma place ! Je déteste gueuler sur mes gosses. À chaque fois il me fait ses yeux doux et...

Vince était déjà repartie après avoir fait signe à William de la suivre.

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Messagepar Lawrence William Hayner » 14 Nov 2010, 18:42

Le boiteux ? Oui, c'était vrai qu'il boitait, mais à William on avait appris à ne pas appeler les gens par leurs défauts. Certains s'en offusquaient facilement. Curieusement, on prend ce genre de sobriquet avec beaucoup moins d'humour lorsqu'il nous est destiné... et comme le voulait l'expression, on ne faisait pas à autrui ce qu'on ne voulait pas qu'il nous fît. Enfin, trêve de blabla. La demoiselle repartait déjà sur ses explications, et le franc parler dont elle faisait usage faisait rire notre psychologue. Intérieurement bien entendu, car il n'avait pas très envie qu'elle pense qu'il se payait sa tête (sait-on jamais comment elle pourrait décider de se venger, cette petite boule de nerfs). Il la regarda se pendre à son bras, un peu mal à l'aise tout à coup. Cela aussi faisait partie de ces choses que l'on évitait dans le monde des « civilisés ». Vous pensez bien qu'à la Basse-Ville, il aurait été arrêté dans la seconde pour détournement de mineur, proxénétisme et que sais-je encore... mais pour l'heure, la question ne se posait pas et il s'agissait de ne pas perdre son guide de vue. C'est qu'elle trottait vite dans son labyrinthe !

Il n'eut pas le temps de demander où ils allaient, ni comment elle s'appelait et encore moins ce qu'était le cercle. Mais il n'était pas pressé. Chaque chose en son temps, et là, il était temps de repartir à la poursuite de la gamine. Autant dire qu'après tout ces tours et détours, William était joyeusement perdu au milieu des Ghettos. Pas question pour lui, donc, de perdre son GPS roux. En quelques enjambées il faut à ses côtés, le nez en l'air comme s'il regardait les papillons.

« Tu ne m'as même pas dit comment tu t'appelais. Moi c'est William. Qu'est-ce que c'est le « cercle » ? »

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Messagepar Vince Gaïdjen » 17 Nov 2010, 17:47

Vince marchait d'un pas vif dans les rues, lançant de temps en temps quelques saluts à des gens qui passaient. Un grand brun avec deux chaussures vertes vint lui serrer la main, lui frotta le sommet du crâne comme ferait un grand frère pour sa petite sœur. Il lui dit qu'il était passé récupérer sa voiture, qu'il était content du boulot et qu'il avait laissé l'argent "là où tu sais, tu sais ?", que papa et maman Gaïdjen étaient partis pour la semaine chez Bougnat qui avait déménagé puis s'en alla. Vince rigola, se tourna vers William et lui dit :

- Ah t'sais que lui, hein... C'est le chef des Sans Peur Et Sans Reproche mais on les appelle les Speurs. C'est mon clan ! Alors, c'est vrai qu'on est sans peur. J'irai pas jusqu'à dire qu'on est sans reproches, parce que certains... moi, évidemment, je suis correcte.


C'était, évidemment, de la mauvaise foi. Et elle disait ça l'air tellement sérieux que ça n'était pas crédible. Puis son accompagnateur lui demanda comment elle s'appelait et ce qu'était le Cercle. Elle le regarda genre "médoutussor", sourit en se rendant compte que le monde ne tournait pas forcément autour du Ghetto, puis répondit :

- Je m'appelle Vince. Vince Gaïdjen, mécanicienne de métier et de profession, pour vous servir. Véhicules, électroménager, tout appareil mécanique, on vous le répare en cinq minutes !

Elle bifurqua sous une rangée d'arceaux si bas qu'il fallait se baisser et plier les genoux pour passer. Les arceaux débouchaient sur une autre cour, mieux entretenue, aux murs placardés d'affiches. La plupart des maisons étaient classiques, simples, aux murs crépis. Une seule, en face, était plus grande, plus majestueuse. On aurait dit un immeuble Haussmannien tombé au milieu de la cour des Miracles version Deluxe. La porte était en bois foncé, ornée d'un heurtoir modelé en forme de tête de lion. Vince se retourna vers William, tendit les bras vers la porte en clamant :

- William, vous allez avoir la joie de découvrir le Cercle ! C'est un cabaret, on se marre bien, et les gosses y vont parce qu'à l'étage y a une salle de jeux pour les mômes.

Vince, qui apparemment ignorait la présence du heurtoir, frappa du poing sur l'épaisse porte en bois massif et cria, ou plutôt beugla :

- PAULOOOOO !!!


La porte s'ouvrit, laissant entrevoir une sorte de gorille à l'air sympathique qui laissa passer Vince en la poussant délicatement par le dos. Si la jeune fille n'avait pas prévenu que William l'accompagnait, ce dernier se serait retrouvé enfermé dehors.

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Messagepar Lawrence William Hayner » 21 Nov 2010, 16:42

C'était amusant de voir la notoriété de cette jeune fille à travers le comportement des autres. Visiblement, il n'y avait pas un seul habitant des Ghettos qui ne la connaissait pas. Tous lui manifestaient de la sympathie au travers de saluts étranges et d'exclamations familières. Certains semblaient s'en méfier un peu, comme s'ils conservaient en eux le mauvais souvenir d'une altercation où ils n'auraient pas eu le dessus. Mais dans l'ensemble, les relations de Vince avec son entourage semblait amical. Et dire que de là où il venait on ne s'adressait pas même la parole entre voisins... La façon dont s'exprimait la gamine le fit sourire. Franche. Directe. Un vocabulaire simple mais intelligent. Au moins elle n'abusait pas des « trop d'la balle sa mère qui gère du poney »... le ridicule avait beau ne pas tuer...

Et il se laissa bringuebalé d'une rue à l'autre, distrait par tout ce qu'il voyait. Des cordes tendues entre deux immeubles où séchaient le petit linge. Un terrain ceint de grilles métalliques où se disputait un match de shuttlecock, un Orios se disputant un morceau de chiffon avec un Orphe loup... Manifestement ici, les spécificités des Orphes n'effrayaient personne. Il ralentit l'allure. Tiens d'ailleurs, il n'avait jamais eu l'occasion de parler à un Orphe... mais il détourna son attention à regrets lorsque Vince lui parla d'un cabaret muni d'une salle de jeu. Il haussa un sourcil, sans pouvoir s'empêcher de comparer. Un truc pareil dans la Basse-Ville aurait subit une descente de police dans le meilleur des cas, de l'Escadron dans le pire. On n'enfournait pas des mômes dans un club pour adulte, protection de l'enfance et tout le tralala. Il entra à la suite de Vince en se gardant bien de tout commentaire et s'engagea dans un couloir un peu à l'écart de la grande salle. Du coin de l'œil, il nota les serveuses en soubrette ultra courte et les danseuses alignées comme une unité militaire, ne portant guère d'avantage qu'un porte jarretelles et un bustier au décolleté plongeant. L'armoire à glace qui les avaient fait entrer lui jeta un regard mauvais.

« Mon p'tit monsieur, si tu veux te rincer l'œil, n'espère pas qu'ce s'ra gratuit !
_ Pas du tout. Sourit William d'un air étonnamment décontracté. Nous sommes à la recherche d'un voleur de clef anglaise. Pas vrai Vince ? »

Et à la seconde où il prononça ces mots, sa tête dévissa sur le côté. Navré... William n'est qu'un homme... C'est chouette les Ghettos !

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Messagepar Vince Gaïdjen » 21 Nov 2010, 17:07

Vince était déjà prête à monter les larges escaliers de bois qui menaient au premier, lorsque Paulo interpella Will. Elle retourna sur ses pas, observa l'air mauvais du portier et le regard luisant de son accompagnateur. Elle ne voulait pas que Will ait à payer alors qu'elle l'avait quasiment obligé à venir... Elle prit la parole :

- Écoute, gros, laisse-le tranquille, quoi... J'l'ai forcé à venir le pauvre. On cherche le p'tit à Dédé.Tu l'as pas vu ?


Le gorille sourit à la jeune fille, lui demanda s'il s'agissait de Dédé ou de "Dédé la Couronne". Après précision, il lui désigna l'escalier. Alors qu'il allait à nouveau s'en prendre à Will, Vince crut voir un filet de bave couler le long des lèvres de ce dernier. Elle éclata de rire, lui empoigna le bras, le traina sans ménagement jusqu'au bord de la scène et interpela une belle brune pulpeuse en porte-jarretelles qui chantait, assise sur le piano. Vous visualisez la scène (mais si, comme dans Lucky Luke, au saloon). Celle-ci descendit et s'accroupit pour écouter la rouquine.

- Lulu ! Tu me le gardes deux minutes ? Je vais à l'étage ! Prends-en soin ! Je reviens !


Et sans demander son avis à Will, elle sauta vers les escaliers.

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Messagepar Lawrence William Hayner » 22 Nov 2010, 17:36

Merci pour le plan, du coup ça m'a permis de développer un peu le bonhomme.

William reporta son attention sur Vince comme s'il venait de se souvenir ce pourquoi ils étaient là. Oui, le p'tit à Dédé, tout à fait ça. Il hocha la tête, conscient qu'il ne l'avait plus tellement sur les épaules. Il était temps de monter, ou bien il ne répondait plus de rien. Mince ! Il n'était pourtant pas venu pour ça. Alors il se força à écouter leur étrange conversation. « Dédé la couronne » ? C'était plutôt drôle comme surnom, et il se demanda ce qui avait bien pu valoir à ce pauvre Dédé d'hériter d'un tel sobriquet. Il évalua mentalement plusieurs possibilités. Des couronnes dentaires ? Il se prenait pour un roi ? Il vivait dans cette partie des Ghettos qui formaient comme une couronne ? Et en passant en revue ses idées, ses yeux voyagèrent vers la salle comme deux petits aimants bleus attirés par d'autres aimants habillés de porte-jarretelles... Ah ! Il voulu fermer les yeux et suivre Vince à tâtons, mais une main sur son bras le fit presque sursauter. En baissant les yeux il vit la gamine, et avant de comprendre son sort, il se retrouva traîné de force – consentant quand-même – vers le devant de la scène. Il fut étonné par la poigne de la jeune fille. Un vrai camionneur, non pas par l'allure mais par la force et un peu le comportement. Elle n'avait pas froid aux yeux, c'était le moins que l'on pouvait dire. Et personne ne s'alarma de la voir traverser ce lieu qui n'était pourtant pas fait pour les filles de son âge...

Quelques clients se retournèrent sur William, un air presque jaloux épinglé au visage. Ouh là... dans quoi est-ce qu'il mettait les pieds ? La jolie brune descendit de son piano et lança un regard langoureux à notre pauvre psychologue qui – soit dit en passant – n'avait pas l'air trop déboussolé. Un regard clair et souriant, sans vice, sans grossièreté... mais emprunt d'une émotion indéniable. Elle lui sourit et posa ses mains sur ses épaules pour sauter au bas de la scène en souplesse. Derrière elle, une autre femme prenait le relais sur le piano pour pousser la chansonnette. Une blonde, rouge à lèvres provoquant, sous vêtements pailletés, talons hauts... et ma foi, un corps parfait !

« Toi, t'es pas du coin, pas vrai ?
_ Non. Fit William sans la moindre gêne.
_ Mais t'es un habitué des cabarets, hum ?
_ En fait non.
_ Tiens. C'est drôle, parce que t'as vraiment l'air à l'aise. Tu ne transpire pas ?
_ Je devrais ? »

Elle désigna d'autres hommes attablés près de la scène. Les yeux hagards et la bouche à demi ouverte, ils portaient des auréoles sous les aisselles ou dans le dos. Certains s'épongeaient le front avec un mouchoir, l'air embarrassé. Bigre, c'était vrai qu'ils transpiraient. La machine à observation de William ne perdait pas une miette du spectacle. Qu'il s'agisse des danseuses aux déhanchés vertigineux, des spectateurs à bout de souffle ou de Lulu qui s'amusait follement à ses côtés. Mais à aucun moment il n'eut ce regard de vicelard que d'autres ne pouvaient plus cacher.

« Il faut dire qu'il fait un peu chaud.
_ C'est exprès. Tu ne crois pas qu'on va danser à moitié nues par seize degrés ?
_ C'est vrai. Et j'imagine que les perles de sueurs sont plus sexy que la chair de poule... »

Elle lui sourit. Will l'amusait.

«_ Je t'offre à boire ?
_ Seulement si ça ne vous coûte rien. Je ne voudrais pas me faire entretenir.
_ Oh oh, je vois. On a sa p'tite fierté personnelle ? » lui lança-t-elle avec un clin d'œil.

Elle le traîna jusqu'au bar... ou plutôt la suivit-il sans se faire prier, et tous deux prirent place sur de grands tabourets au coussins veloutés. Tout était prévu pour donner cette sensation de douceur enveloppante. Pour que les clients se sentent à l'aise. Chez eux. Dorlotés... Sur la scène, la chanteuse avait quitté son piano pour une pole-dance troublante. Passer d'un crash en planeur à un plaisir des yeux aussi grand – tout est relatif, mais nous parlons d'un homme – c'était presque surréaliste.

« Deux Kirs.
_ Pas pendant le boulot Lulu. Tu sais bien !
_ Ok alors un Kir et une limonade.
_ Pas non-plus de boisson gazeuse...
_ Ça va, fais pas ton rabat-joie. Un Kir et une bouteille d'eau...
_ Pas de boisson gazeuse ? S'étonna Will.
_ Non. Le patron veut pas. C'est mauvais pour...
_ Pour la digestion ?
_ C'est ça.
_ Votre patron veille au grain. Ça ne doit pas être très bon pour son fond de commerce, les renvois au beau milieu d'une danse langoureuse... »

La dénommée Lulu éclata de rire. Un client comme celui-là, c'était bien la première fois qu'on lui en pondait un. Elle essuya une larme après son fou rire, prenant grand soin de ne pas abîmer son maquillage.

« Tiens, la p'tite Vince est revenue. J'ai rempli ma part du contrat, j'ai pris soin de toi. Enfin j'espère.
_ C'était parfait.
_ D'accord beau blond, alors je te laisse. Moi je retourne bosser. »

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Messagepar Vince Gaïdjen » 24 Nov 2010, 18:20

Pendant le temps que le psy' discutait avec la chanteuse-danseuse-jépaléjoucreuse, notre rouquine internationale (non ? ha bon...) était montée dans la salle de jeu, avait attrapé le gosse par le col, flanqué trois claques devant tout ses copains, récupéré sa clé et suspendu au porte-manteau, joué deux ou trois fois au poker junior avec les gamins parce qu'elle les aimait bien et qu'eux aussi, puis après leur avoir donné deux ou trois conseils pour triompher dans une baston elle était redescendue. Elle avait oublié Will et s'était installée avec des amis qui se trouvaient là. Puis, se rappelant soudain l'existence de son accompagnateur, elle se leva, alla se planter devant lui en brandissant son énorme clé de quarante centimètres sous son nez.

- Je l'ai récupérée ! Il a morflé, mais il a compris ! Il ira plus faire le malin ! Ahaha !! Allez, on va réparer ton planeur. Dis bonsoir à la dame.


Et sans laisser à Will le temps de réagir, elle l'empoigna par le bras et le tira à l'extérieur, l'entraînant sur le chemin inverse.

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Messagepar Lawrence William Hayner » 28 Nov 2010, 15:21

Entre le moment où je t'ai écrit ce mp et le moment où j'ai édité... ben je me suis plus rappelé ce que je voulais ajouter. Tant pis...

William s'était retourné tandis que Lulu repartait vers les coulisses. Il chercha des yeux une chevelure rousse et ne mit pas longtemps à la repérer. Il faut dire qu'une couleur pareille, ça ne passait pas inaperçu. Avec un sourire amusé, il l'observa jacasser à la table de quelques clients qu'elle semblait bien connaître. Non, décidément. Les gens de la Basse-Ville en seraient morts scandalisés de voir une gamine traîner dans un lieu pareil sans éprouver la moindre gêne. Tout l'un ou tout l'autre, songea-t-il en finissant son verre. Mais il n'avait pas encore rencontré de juste milieu. Lorsqu'il la vit planter son regard vert dans le sien sans sourciller, se lever et se diriger droit sur lui, il quitta son tabouret de bar.

« Jolie pièce. » fit-il en désignant la clé imposante d'un mouvement de menton.

Et sous l'exhortation de l'enfant, il se tourna et adressa un signe amical à madame – ou mademoiselle – Lulu, avant de se sentir traîner de force vers le couloir. Le gros malabar de l'entré lui jeta un regard torve avant d'ouvrir, apparemment pressé de mettre dehors un client qui s'était rincé l'œil sans payer. Et en plus, il s'était fait payer à boire. Il ne manquait pas d'air ! William trébucha en sortant. Le contraste entre l'obscurité relative du cabaret et le soleil froid à l'extérieur lui avait fait cligner des yeux, en conséquence de quoi il ne vit pas la marche et failli atterrir dans les bras de Vince. Il continua de suivre Vince, un peu surpris, savourant la caresse rugueuse du vent frais sur son visage. Ouf... on respirait beaucoup mieux dehors. Il laissa ses yeux s'habituer à la luminosité et remonta un peu sa veste de sa main libre, jusqu'à ce qu'il semble changer d'avis. Il arrêta la jeune fille d'une main amicale sur son épaule.

« Non attends. Je vais essayer de retrouver le chemin, d'accord ? »

Tu parles d'un jeu ! À tous les coups il allait se perdre. Oui, mais il avait sa journée... alors il pouvait bien s'amuser un peu, pas vrai ?

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Messagepar Vince Gaïdjen » 28 Nov 2010, 16:18

Vince regarda d'un air amusé le psy se réhabituer à la lumière. Mais comment donc vivaient-il ? Là-bas ? Il n'était jamais allé au cabaret ou quoi ? Il ne devait pas beaucoup s'amuser, chez lui. La jeune fille, candide mais pas trop, pensait de façon naturelle que le meilleur endroit du monde, c'était ses Ghettos, qu'on ne vivait nulle part ailleurs mieux que dans son quartier et qu'on ne pouvait s'amuser lorsqu'on n'avait pas d'amis comme les siens.
Un chien noir et blanc passa devant elle et la tira de ses réflexions métaphysiques sur les gens du Ghetto. Lorsqu'il disparut dans une ruelle, elle lança à son compagnon, d'un air narquois et amusé :

- Alors, elle t'a plu, Lucette ?


Vince allait repartir en sens inverse afin de retourner son garage, lorsqu'une main la retint. Will avait envie de se balader. Après tout pourquoi pas ? Elle n'avait pas conscience qu'il risquait de se perdre, et puis elle s'en fichait un peu. Elle, elle connaissait le chemin. Elle se retourna, scruta le visage réjoui de son accompagnateur avant de lui dire :

- Dans quelle direction tu veux aller ? Tu veux l'essayer tout seul ton chemin ou je t'accompagne ? Parce qu'il faut qu'on rentre réparer le planeur et le ramener chez le Boiteux, hein !

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Messagepar Lawrence William Hayner » 28 Nov 2010, 16:56

William avisait les alentours d'un air tout à fait concentré lorsque la question de Vince le tira des plans géospaciaux qu'il tirait pour tenter de se repérer. Il baissa le nez vers la jeune fille d'un air à la fois surpris et... amusé ? Ses yeux bleus mi-clos, il sembla réfléchir avant de répondre, se demandant vaguement s'il y avait une question implicite cachée dans la première, plus évidente.

« Ah, physiquement oui. Pour le reste, je ne la connais pas assez pour en juger. » se décida-t-il enfin à répondre.

Il y avait des sujets, comme ça, sur lesquels ça ne le dérangeait pas le moins du monde de s'étaler. Certains y auraient vu une preuve d'impudeur, voir d'orgueil malsain, de grossièreté dans le pire des cas. En fait il était simplement honnête et franc. Ça ne voulait pas dire qu'il était prêt à raconter n'importe quoi à n'importe qui. Au contraire, il se gardait bien de révéler les détails trop personnels qui concernaient les autres. Mettez ça sur le compte d'une pseudo déformation professionnelle. Ses détails à lui en revanche... prenez un verre et laissez-le vous les raconter... mais ne vous étranglez pas ! Je vous aurai prévenus !

Il releva la tête. Cette espèce de caravane biscornue lui rappelait quelque chose. Peut-être étaient-ils déjà passés par là à l'allée. À moins que ce ne soit plutôt ce mobile-home ? Il se frotta le menton pensivement. Ce vélo désossé ne lui disait rien. En même temps, si Vince n'avait pas marché si vite dans ce labyrinthe de tôles et de planches, il aurait mieux visualisé la route. Dans quelle direction, entendit-il quelque part au fond d'une oreille. Aucune idée. Était-ce vraiment important ? Non. Par contre le planeur semblait susciter un intérêt très impatient de la part de son accompagnatrice.

« Et moi qui pensait qu'il n'y avait que les hommes d'affaires de la Basse-Ville pour être toujours aussi pressés de tout. Excuse-moi, je ne savais pas que tu tenais autant à réparer ce vieux truc. Je te suis. »

Et tandis qu'ils faisaient route, il eut envie de poser une question saugrenue. Sans réel intérêt, sinon celui d'observer la réaction immédiate de Vince.

« Et toi alors. Il y a un garçon ou une fille qui te plaît par ici ? »

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Messagepar Vince Gaïdjen » 02 Déc 2010, 17:30

Vince suivait son "guide", le sourire en coin, un air narquois sur le visage, amusée de se laisser mener dans cette ville qu'elle connaissait presque par cœur. Elle savait très bien que tous les chemins mènent chez "Gaïdjen et fille" pour la simple et bonne raison que la position géographique du garage et de la maison permettait à n'importe qui d'y arriver, fût-ce au bout de trois jours d'errance.
Elle regarda Will observer la caravane et le mobile-home. Ils étaient en effet passés devant, mais pas dans le même sens... Il se frotta le menton et la rouquine ne put réprimer un éclat de rire. Elle sautilla, se planta devant lui, le bout de la langue tiré comme elle faisait toujours lorsqu'elle s'amusait.

- Le Boiteux aime prêter mais il aime qu'on lui rende. Il est de nature impatiente. Si ça ne tenait qu'à moi, son tas de ferraille serait à la casse à l'heure qu'il est. Mais prend ton temps, tu es sur la bonne voie !


Elle ne put retenir un gloussement.

- Grâce à toi je redécouvre mon Ghetto, je le vois d'une autre façon. Sinon, je ne peux pas aimer particulièrement une fille puisque quatre-vingt dix-neuf pour cent de ces affreuses poupées pot-de peinture me haïssent. Et quand aux garçons, je les considère comme mes amis et jamais au nom de cette amitié je ne sortirai avec l'un d'entre eux...


Elle alla se placer de l'autre côté de Will, renifla et continua :

- Sinon, c'est Ewen, le chef des Speurs, tu sais celui de tout-à l'heure. C'est presque mon grand frère !


Elle laissa passer un ange avant de demander, d'un air naïf :

- Où on est, là ?

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Messagepar Lawrence William Hayner » 03 Déc 2010, 15:48

Sortant de ses rêveries, William posa un gentil sourire sur Vince. Décidément, cette jeune fille était intéressante. Elle ne manquait ni de répartie, ni de joie de vivre. Un rien semblait l'amuser, tout comme un rien semblait la contrarier. De l'avis du psychologue – hors de ses fonctions, rappelons-le – elle était un véritable paradoxe ambulant. Capable d'une générosité telle qu'elle vous montait des plans avec les danseuses d'un cabaret, mais possessive au point d'aller mettre les points sur les « i » à celui qui avait osé lui emprunter sa fameuse clé anglaise. Tranquillement pressée, amusée mais ironique, appréciée mais redoutée ou au contraire haïe mais respectée, gentille mais pas niaise. Sa petite tirade en guise de réponse le prouvait, et William éclata de rire.

« Là, nous sommes dans les Ghettos. Fit-il avec malice lorsqu'il retrouva à peu près son sérieux. Excuse-moi, j'aime beaucoup ta franchise. Tu ne t'embarrasse pas du superflu, pas vrai ? »

Il releva le nez et se dirigea entre la caravane et le mobile-home d'un pas conquérant. Tant pis s'il se trompait, il avait son week-end. Il finirait bien par retrouver la sortie. Et puis avec Vince à ses côtés, il ne risquait pas grand chose. Il sourit à cette pensée. Ça lui faisait penser à ces séries télévisées où des explorateurs visitaient des planètes étranges, accompagnés d'un guide-interprète local. Les Ghettos étaient un peu un nouveau monde pour lui, et Vince était son contact sur place. On nageait en pleine science-fiction !

« J'en conclue que tu n'as pas de grand frère ? Tu es fille unique ? Raconte-moi, comment... Ewen le beau brun est-il devenu ton grand frère ? Il faut faire beaucoup confiance aux gens pour les apprécier à ce point. »

Il retint à peine un rictus amusé... Non en fait, il ne le retint pas du tout. Moqueur ? Non. Simplement amusé. Il avait lu de très vieux manuels poussiéreux écrits par un certain « Freud » qui disait des choses à peine croyables à propos de ce que l'on pouvait ressentir pour ses proches. S'il avait entendu Vince parler de son attachement pour un jeune homme extérieur à sa famille mais qu'elle considérait comme un grand frère et qu'elle aimait un peu plus que ça... tout ça à la fois. Il secoua la tête rien qu'à imaginer ce que ce monsieur aurait pu en dire. En attendant, il marqua une pause pour retrouver son chemin et reconnu un étendoir où séchaient de drôles de draps fleuris. Il se remit en marche aussitôt.

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Messagepar Vince Gaïdjen » 03 Déc 2010, 16:42

Vince trottinait à côté de Will. Ce fut à elle de rire quand il lui répondit qu'ils étaient dans les Ghettos. En voilà un qui n'était pas stressé.

- Tu ne perds pas le nord, c'est bien. Là dernière fois que j'ai posé cette question à un étranger qui me demandait de le guider, il s'est mit à me secouer en hurlant : "On est perdus, hein ! Je le savais ! Je laisse une veuve et trois orphelins !!"... Qu'est ce que je m'étais marrée...

Tout en parlant, elle mimait les gestes qu'elle décrivait. Le superflu ? Comment ça, le superflu ? C'est quoi, ça le superflu ? Ça ne fait pas manger, ça n'aide pas au travail. Alors... Elle ne répondit pas à la question et continua à suivre le psy. Elle se mit à penser aux Speurs, les meilleurs-du-monde-qui-sont-les-plus-forts-et-les-plus-intelligents et à son presque grand-frère Ewen jusqu'à la question de Will à laquelle elle s'efforça de répondre avec précision, parce que c'était un peu compliqué.

- En fait, je suis fille unique, mais mon papa avait un frère qui s'appelait Vincent. Il est mort tué par un rival environ quelques mois avant ma naissance. C'est là que ça devient compliqué parce que la femme qu'il aimait et pour qui il s'est battu en duel était enceinte et était partie à la Basse-Ville pour accoucher un an plus tôt. Du coup lorsqu'elle est revenue avec son fils d'un an, Ewen donc, elle apprit que Vincent était mort. Elle était désespérée et du coup ne voulut pas garder Ewen qui ressemblait trop à Vincent et elle est partie et plus jamais revenue. D'après maman elle a refait sa vie, d'après papa elle est morte et d'après le voisin qui est parano elle est revenue sous les traits d'une gargouille, celle qu'il croit qu'elle se réveille la nuit pour lui sucer le sang enfin bref, tout ça pour dire que Ewen a été élevé par papa et maman mais surtout par la Vieille, la guérisseuse, en gros c'est peut-être mon cousin mais on sait pas trop. En tout cas moi je le considère comme mon grand frère parce que c'est lui qui me soignait quand je me blessait en jouant.

Après ce long monologue, elle soupira et continua à suivre Will, ne se posant même pas la question de pourquoi il lui demandait tout ça ni pourquoi elle le lui racontait mais elle sentait qu'il était quelqu'un de bienveillant.

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Messagepar Lawrence William Hayner » 03 Déc 2010, 23:35

Il ne répondit pas tout de suite, prenant tout son temps pour avaler le flot d'informations que lui révélait Vince. Au moins elle ne faisait pas de secrets, sans non-plus entrer dans les détails trop personnels. En réalité, son explication était difficile à suivre précisément à cause du manque de détail. Les liens de parentés avaient toujours été un sujet épineux pour William qui se perdait systématiquement dans les branches des arbres généalogiques là où d'autre s'y promenaient comme des singes habiles. L'air très concentré, il se répéta le pavé lentement, plusieurs fois, et en marmonnant pensivement... Puis au bout d'un moment qui sembla interminable, il fini par trouver une logique qui lui convenait.

« Ewen, donc, est le fils de ton oncle Vincent, mais tu n'es pas sûr que Vincent soit vraiment son père, c'est bien ça ? Si ça se trouve, vous n'avez aucun lien de parenté. Je veux dire, par le sang. »

Il se faufila entre une sorte de clôture faite de tôles et de grilles branlantes et un tas d'objets insolites – pour ne pas dire une décharge sauvage. À l'angle, il reconnu la petite chapelle de briques disparates – c'était même peut-être un caveau – et continua son chemin, galvanisé par son succès jusqu'à maintenant. L'avantage d'être observateur, c'était de pouvoir se repérer même dans les lieux inconnus... enfin, à condition d'être gratifié d'une mémoire visuelle, ce qui était le cas de notre William national. Là-bas, les chiens jouaient toujours autour d'un bout de chiffon.

« La bonne nouvelle c'est que tu n'as aucun lien de sang avec la gargouille de ton voisin... »

Il en profita pour boutonner les boutons de sa veste. C'était pas tout ça, mais il faisait un peu froid, en dehors du cabaret. Puis il retrouva son sourire lorsqu'il repensa aux propos de Vince. Il n'avait pas prêté attention à tout, tant occupé qu'il était à réfléchir. Mais maintenant que ce casse-tête de liens de parentés avait quitté son esprit, il pouvait se permettre de se laisser aller à d'autres distractions.

« Et même si nous étions perdus, paniquer ne m'aiderai pas beaucoup. Le mieux, c'est encore de s'adapter. La plupart des gens apprécient leur confort quotidien. Ensuite, il y a ceux qui peuvent s'en détacher et partir à l'aventure, et puis il y a ceux que le changement effraient. Déplace d'un seul centimètre leur bocal à poisson rouge et c'est le drame. » Sourit-il gentiment.

Ses yeux se perdirent dans le vague quelques instants. Il n'était pas mieux, avec son métier de sédentaire, son appartement, sa famille. S'il était ici aujourd'hui et qu'il n'était pas pressé, c'était bien parce qu'il avait son week-end, mais combien de fois s'était-il angoissé dans les rues de la Basse-Ville parce qu'il ne trouvait pas son chemin, que cela allait le mettre en retard, qu'il risquait de perdre sa bourse d'étude et de rater son année. Il hocha la tête à ce souvenir. Peut-être n'avait-il pas les bonnes priorités, lui non-plus.

« Et si on le faisait voler, ce truc ? Tu crois qu'il pourrait supporter notre poids à tous les deux ? Et tu me ferais visiter depuis là-haut ? »

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