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Le Journal et la LouveShara me prit sur son dos et fila à toute allure. J'eus néanmoins le temps de me retourner vers Antiphane, qui me fit un signe de tête avant que je ne le perde de vue. Nous passâmes entre nombre d'Humains, divisant les foules, soulevant légèrement les jupes, semant terreur, discorde, panique et incompréhension par notre simple passage. Nous sortîmes de Guttenvald pour arriver dans les ténèbres écrasants de la forêt et pourtant Shara continuait de courir. Elle s'arrêta enfin près d'un ruisseau.
Je descendis tandis qu'elle s'effondra sur le flanc, fatiguée. Accroupie près d'elle, j'enfonçai mes doigts dans son imposante fourrure pour lui gratter le cou et lui chuchotai "Merci". Je détachai de ma ceinture le marcassin qu'elle avait chassé pour moi, encore vierge de toute morsure, pour le lui donner.
"Quelle course, ma belle ! Tu mérite bien cette proie, tu as été parfaite !"
Je souris en allant me déshydrater de quelques gorgées dans le ruisseau. Son eau était si claire, et elle affichait mon reflet. Cela faisait des lustres que je n'avais pas vu ce visage... Mes Dieux... Mes cheveux immaculés trempaient dans l'eau ; ils avaient poussés... Malgré mon expression radieuse, mes traits étaient si... vieillis. Des rides commençaient à apparaître aux coins des yeux, aux commissures des lèvres, et la fatigue n'arrangeant rien, des cernes creusaient considérablement mes yeux... Je me détachai rapidement de cette vision désagréable pour admirer l'endroit où nous étions arrivées. Le tronc de chacun des arbres qui nous entourait était colossal et le feuillage bloquait aisément les rayons du soleil, pourtant en plein milieu d'après midi ; les seuls qui arrivaient à passer ne suffisaient en rien à satisfaire une luminosité décente, mais ils miroitaient joliment sur la surface de l'eau, donnant une atmosphère étrangement apaisante en ce lieu.
Ma fidèle louve était encore allongée, et je l’interpellai d'une voix douce.
"Shara ? Viens boire un peu, tu en as besoin ! Puis nous ferons une pause, tu pourras même dormir si tu veux !"
Je soulevai le bras gauche pour l'inciter à venir se poser sur mes genoux.