Il traversa l'auberge au pas de course, le poignet du tatoueur logé entre ses doigts, et s'arrêta devant le premier passant qu'ils croisèrent dehors pour lui demander où était le Shaman. Malgré les explications très claires et le fait que la boutique n'était vraiment pas loin, ils mirent un peu plus de temps que prévu ; Benedikt avait quand même réussi à se perdre et c'était le tatoueur qui avait fini par les conduire à bonne destination. Cela ne fit que mettre encore plus en colère le botaniste, vexé de son manque de talent en terme d'orientation.
Aussi, lorsqu'il arrivèrent à bon port, Benedikt arborait un air de bouledogue, et attrapa le catalogue posé sur le comptoir avec les sourcils froncés. Bon, déjà, il fallait que ce soit un sortilège visible physiquement. Parce qu'il voulait que ce soit parfaitement visible pour être surprenant, et que c'était moins dangereux dans la plupart des cas ; il ne voulait pas non plus avoir la mort de quelqu'un sur les bras. Le sortilège Sacer aurait pu être amusant, il avait un winghox à porté de main qui accepterait bien ce genre de geste si c'était lui qui le demandait... Hein...? Mais le problème était qu'il retomberait sur Benedikt alors qu'il l'aurait voulu sur Vrass, et Archélas ne le connaissait pratiquement pas, aussi cela risquait d'être peu efficace. Mmmmhh... Ou alors des cheveux roses ?
« Oooooh, non, je sais, je vais le transformer en animal. » déclara soudain le botaniste. « Je veux être absolument et totalement sûr qu'il ne puisse pas faire l'amour avec sa nouvelle mariée de TOUTE LA JOURNÉE. Je ne verrais pas pourquoi il n'y aurait que nous qui seraient emmerdé ! Et ça, c'est un sortilège qui fera bondir tout le monde et qui sera chiant parce qu'il ne pourra pas s'expliquer, voilà ! »
Mais... en quel animal ? Ce chien de soldat méritait quelque chose de... Mmmmh... Chien ? Oui, un petit toutou conviendrait bien... Benedikt n'avait aucune idée de en quoi pouvait se transformer sa femme - Ceithli ? C'était bien ça ? - vu qu'elle était morphe, et il n'avait pas trop envie de le transformer en souris s'il allait se faire croquer immédiatement par sa propre épouse. Un cabot était assez gros pour éviter ça, et puis à priori, elle n'était pas orphe teigne, non plus, hein ? L'important était que Archélas Ages se réveille un matin tranquillement, avant de s’apercevoir qu'il était dans la peau d'une bestiole poilue, deux oreilles et une queue pour compléter le tableau. Et Benedikt espérait bien qu'il y ait quelqu'un qui puisse en être témoin, avec en bonus, une incompréhension totale qui vaudrait au clébard de se faire mettre à la porte pour la journée.
Frappant du pied en rythme comme un lapin contrarié, Benedikt parcouru quand même toute la fin du catalogue avec un air de réflexion, pour être sûr d'avoir pris la bonne décision. Enfin, la décision qu'il estimait bonne... Parce qu'il n'était pas dit que c'était forcément une bonne idée.
« Sayah ! » appela-t-il avec une assurance peu fréquente, surtout devant l'orphe reptile. C'était bien la première fois qu'il ne sursautait pas devant son arrivée, mais il était trop occupé à griffonner sur un morceau de papier récupéré dans son sac. « Je veux lancer le sortilège Fera sur Archélas Ages, et le transformer en chien ! » Il lui tendit le papier recouvert de son écriture enfantine – et de nombreuses fautes d'orthographes qu'il n'avait pas remarqué sans relire - avant de rajouter : « Et je veux que ce message l'accompagne. Tant pis s'il faut utiliser un flabo ou que vous puissiez lui délivrer en personne, je m'en fiche, je veux juste qu'il le reçoive. »
J'espère que votre femme aura autant de plaisir
à se réveiller à côté de vous dans cet état que moi
j'en ai eu quand j'ai découvert que Vrass Rannveig
avait une langue ET des yeux de serpent.
Si vous voulez vous venger, à présent, ce sera auprès de
moi qu'il faudra s'adresser, mais laissez-le tranquille.
Bien à vous, Benedikt Bloom.
à se réveiller à côté de vous dans cet état que moi
j'en ai eu quand j'ai découvert que Vrass Rannveig
avait une langue ET des yeux de serpent.
Si vous voulez vous venger, à présent, ce sera auprès de
moi qu'il faudra s'adresser, mais laissez-le tranquille.
Bien à vous, Benedikt Bloom.