J'avais souri un peu plus sincèrement lorsqu'il se montra compréhensif. Autant passer de client à amant était généralement tranquille, les gens payaient d'abord, et après seulement il pouvait y avoir quelques affinités sans que le souci d'argent ne soit plus un problème, mais dans l'autre sens, cela ne m'était jamais arrivé. Il estimait ne pas avoir droit à un traitement de faveur, et cela me rassurait aussi dans le sens où cela me confortait dans l'idée qu'il ne restait pas aussi justement pour ça - car oui, des donzelles qui se jetaient dans mes bras en espérant avoir des tatouages à l'œil, j'en ai déjà vu passer!
Je le laissais m'enlacer de ses jambes, laissant mes mains glisser vers son bassin pour le rapprocher de moi autant qu'il essayait de me rapprocher de lui, la tête bien en arrière, je le sentais repousser mes cheveux pour m'embrasser sur le front, ce qui m'amusa un peu. Très peu de personnes ont déjà eu ce geste à mon attention - d'un autre côté, fort peu avait la taille pour le faire, sauf le cabot peut être? Et je fermais les yeux avant de lui demander s'il avait faim. Vu qu'il était un peu à sec, il préférait voir si on pouvait cuisiner un truc, et je prenais une mine un peu réfléchie
«Ça dépend depuis quand Iza n'a pas fait les courses en fait. En général, elle fait le pleins de viande, mais pas trop de ce qu'il faut à côté!» - je venais l'aider à descendre, appréciant tout de même qu'il soit plus petit que moi - fierté mal placée? totalement - et je venais l'embrasser à mon tour sur le front pour le conduire vers la cuisine. De là j'ouvrais le frigo et regardais le tiroir à viande.. plein comme d'habitude. Puis je regardais les placards et trouvais quelques conserves et autres boites de sauces, je me tournais vers lui d'un air amusé
«Des pâtes avec des boulettes de viande, ça te dit? Ou trop lourd pour toi?» - Après, il n'était pas obligé d'en manger trois kilos! Je commençais donc à sortir la boite de tomates en conserve, les herbes, épices, du vin aussi c'était meilleur! Puis je sortais les boulettes de viande du frigo en prenant soin de laisser le gros steak à la morphe, puis aussi deux carottes et du céleri qui faisaient un peu la tronche depuis le temps qu'ils devaient être là, mais qui devaient être encore bons si je retirais les morceaux un peu abimés.
Je posais une partie sur le plan de travail, l'autre sur la table, sortant la planche à découper et un gros couteau que je lavais avec les légumes. Je tournais la tête vers lui en souriant «Si tu pouvais m'ouvrir la boite de tomates, l'ouvre-boite est dans le tiroir là! Y'a la cocotte juste en dessous dans le placard, faudrait mettre un peu d'huile à chauffer» - l'huile on peut pas se tromper, elle reste toujours à côté de la plaque chauffante! On pourrait presque prendre mon appartement comme étant de la Basse Ville, à force de faire des travaux pour l'améliorer, le consolider, l'aménager, c'était presque devenu un luxe ici. Mais je m'étais toujours contenté quand même du vrai confort sans le luxe, je n'ai pas de télé, pas de four à micro-ondes ni de lave-linge - quoi que celui la, ça ne va pas tarder! Et encore moins de lave-vaisselle - Iza fait très bien la vaisselle, pas besoin. Mais à part ça, mon frigo était quand même assez grand, deux plaques chauffantes à l'électricité et même un four! Donc bon oui, on pouvait presque me voir comme un riche des ghettos, mais c'était un peu ce que j'étais...
Oui, j'avais les moyens de vivre à la Basse Ville, mais je préférais l'ambiance de ce quartier. Tout le monde se connait, on s'entraide. Si j'ai pu aménager mon appart comme ça, c'est parce que j'ai aussi rendu service aux bonnes personnes: plombier, électricien, maçon... un service en échange d'un autre! Beaucoup plus efficace que de tout acheter à des cons qui pensent qu'au profit.
J'avais découpé carottes, oignons et céleri et je les mettais dans l'huile pour les faire revenir. Contrairement à beaucoup, les oignons ne me font pas trop pleurer, sauf si vraiment j'en coupe une tonne - ce qui n'arrive presque jamais. Je me tournais vers le gosse pour voir ce qu'il en pensait, à partir de là, il n'y avait plus grand chose à faire. Laisser revenir un petit moment encore, puis rajouter la viande, les tomates et couvrir à feu doux. Rajouter le vin environs dix minutes avant de servir en laissant à l'air libre pour le laisser s'évaporer un peu, et on lance les pâtes! C'était une recette assez facile et plutôt bonne, je me disais que s'il aimait la pizza, il n'y avait pas de raison qu'il n'aime pas ça...