Benedikt tourna imperceptiblement la tête pour regarder le tatoueur, prenant garde à ne pas beaucoup bouger histoire d'être sûr que ce dernier ne serait pas dérangé, pour continuer à lui caresser les cheveux.
« Non... » souffla-t-il finalement.
« Pourquoi je t'en voudrais ? Ce type savait que j'étais avec toi, et que tu étais un winghox, en plus... Ce n'est pas comme s'il n'avait eu aucune idée des ennuis qu'il pouvait s'attirer... En plus, pour être honnête, même si je sais bien qu'il avait le droit de faire ce qu'il voulait avec moi vu que je l'avais suivi chez lui... Quelque part, je ne trouve pas ça très classe d'essayer de coucher avec quelqu'un trop soûl pour retourner tes baisers... »Le botaniste se mordit la lèvre et attendit une ou deux secondes avant de se rouler en boule contre Vrass, la joue appuyée contre une de ses cuisses comme un chat en demande de caresses. Ses cheveux semblait être la seule chose que Vrass n'hésitait pas à tripoter, alors autant en profiter. Benedikt sombra à nouveau dans le sommeil quelques minutes plus tard, presque avec regret.
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La journée suivante se passa à peu près de la même manière pour le botaniste, à traîner au lit et à bercer son mal de tête et sa fièvre. Il évitait plus ou moins le tatouage quand il avait l'occasion de réfléchir longtemps en s'ennuyant, mais parfois ne pouvait s'empêcher de chercher un peu de contact avec Vrass. Au moins le tatoueur était toujours d'accord pour dormir contre lui.
Le jour d'après, Benedikt allait un peu mieux, et enfila un gros pull et une écharpe en début d'après-midi pour écrire un petit mot à Vrass qui n'était pas à la boutique de tatouage. Cela l'arrangeait plus ou moins, il écrivit simplement qu'il partait pour peu de temps et serait rentré bientôt.
Une demi-heure après, il était devant la porte de Aiden Winter, à lisser du pied les poils du paillasson le temps de se donner du courage avant de sonner. L'assistant était heureusement chez lui et ouvrit la porte avec un air confus. C'est sûr qu'il ne s'attendait pas à sa visite après celle du tatoueur en colère.
« Bonjour... J'ai... oublié mon manteau chez toi. » bredouilla le botaniste en apercevant les pansement sur le nez du gars. Bon, ça avait l'air un peu léger d'après les connaissances médicales de Benedikt, il n'avait peut-être pas le nez véritablement cassé, heureusement pour lui. Il avait eu de la chance.
« Ah, ouais, c'est vrai. Pff, tout ça pour même pas coucher avec toi, franchement, t'es un mauvais coups. » plaisanta l'assistant en roulant des yeux, mais il fit quelques pas arrière pour récupérer un vêtement sur son porte-manteau. Et jeta soudain un regard un peu méfiant sur Benedikt.
« J'espère que ton copain va pas m'embêter parce que tu es revenu ? »Le botaniste croisa les bras, se sentant pratiquement coupable de poser les yeux sur lui.
« Non. S'il-te-plaît. Je veux juste récupérer mes affaires. »Il ne traîna pas là longtemps après qu'on lui ait mis le dit manteau dans les mains, et fouilla juste dans les poches pour vérifier que ses clés n'étaient pas tombés quelque part dans l'appartement d'Aiden, parce qu'il était hors de question qu'il revienne ici encore une fois. C'était foutrement bien trop gênant.
Sur le chemin du retour, Benedikt s'arrêta chez un petit fleuriste et resta quelques minutes à tournoyer dans la boutique, incertain. Ce n'était pas comme si Vrass aimait beaucoup les fleurs, ni qu'il connaissait leur langage, mais hé, il n'allait pas lui offrir un steak, non ? Et puis ce serait joli dans la boutique. C'était l'intention qui comptait, et même le tatoueur apprécierait des jolis fleurs.
« Vous cherchez quelque chose de précis ? » demanda le vendeur blond comme les blés.
Le botaniste se pinça les lèvres.
« Non, c'est bon, merci... Je crois que j'ai trouvé. Je vais prendre ceux-là. » Il désigna un bouquet de Bleuet à côté de lui. Les bleuets promettaient d'être fidèle pour toujours. C'était plutôt un peu tard mais ça convenait bien.
Le botaniste marcha jusqu'à la boutique de tatouage, le nez enfoui dans son manteau pour échapper au froid qui piquait ses joues et une main enfoncée dans ses poches, ne consentant à se dé-emmitoufler que pour une autre quinte de toux. Au moins, la fraîcheur dehors était agréable contre sa fièvre, mais il n'avait pas l'intention de traîner plus longtemps dehors.