Home is where it...

[Benedikt]

« Ben, heu... »
Benedikt renifla et se mordit la lèvre, incapable de continuer à parler. Flûte, il se rappelait un peu de la tête du type. Peut-être même de son prénom puisqu'il l'avait appris quand il n'était pas encore complètement soûl. Mais s'il disait quoique ce soit, le tatoueur allait le retrouver et l'exterminer, vu sa tête et le ton qu'il prenait. Et ça, ce n'était peut-être pas nécessaire. Si Vrass allait s'attirer des ennuis à cause de cette histoire, ça allait être encore pire.
« Il... Il m'a embrassé et touché... partout ? » souffla le botaniste d'une voix minuscule, quand même audible pour Vrass parce qu'il était si près de lui. « Mais... mais c'était pas de sa faute, je veux dire... Je lui disais pas non alors forcément qu'il continuait... J'étais rentré avec lui, il avait le droit, forcément... »

Benedikt regarda le tatoueur, les yeux et la truffe humide, un air d'espoir à moitié collé au visage, cohabitant avec de la tristesse et de la stupéfaction.
« Vrass, est-ce que tu es vraiment terriblement en colère contre moi ou est-ce que c'est réparable, dis-moi, s'il-te-plaît... »
Bon, la dernière relation du botaniste datait encore de l'époque d'Aspasie, alors c'était sûr que se prostituer toute la journée ne l'avait pas aidé à avoir le sens des proportions en terme de fidélité. Mais Benedikt s'était quand même attendant à bien plus de fureur. Comment est-ce que c'était possible ? Comme quoi, Vrass n'avait pas un caractère de merde aussi prononcé qu'il le disait. Malgré sa jalousie un peu envahissante parfois, ça n'était pas si terrible. Enfin, après tout, s'il venait de poser d'autres questions, c'était quand même qu'il voulait savoir exactement ce qui s'était passé pour décider quel genre de réactions il pouvait se permettre.
Le botaniste se remit à tousser et se décida enfin à prendre une gorgée de son thé, merveilleusement chaud et agréable. Il faisait un peu froid dans la cuisine vu ses pieds nus mais il s'en inquiéterait plus tard ; pour l'instant, il voulait surtout avancer cette conversation pour savoir où cela les amènerait. Benedikt frotta son visage pour essuyer ses joues humides, gêné par sa tête alors que le tatoueur l'obligeait à le regarder. C'est sûr qu'après avoir trop bu la nuit dernière et son manque de sommeil, le botaniste ne ressemblait pas à un top-modèle.

[Vrass Rannveig]

Il l'avait embrassé... partout? La colère me revenait alors que je me levais brusquement, manquant de renverser la table en même temps alors que je lui tournais le dos... à nouveau je me sentais envahi par la fureur, imaginant ce salopard en train de le toucher là où il n'a pas le droit! Benedikt a beau dire qu'il avait le droit, je me tournais brusquement en parlant d'une voix sèche

«Il savait que t'étais avec moi, il savait que t'étais saoul! C'est un...» - je n'avais pas de mot pour décrire ce sale petit con! Je venais passer mes mains sur mon visage, me maudissant d'être ainsi parti, j'aurais du rester, attendre dans l'ombre que la soirée se termine, l'attendre lui pour pouvoir le ramener chez nous avant tout ça... je l'entendais alors me demander si c'était réparable, si j'étais en colère... je ne savais pas, je ne savais rien. Je passais mes mains sur ma tête pour essayer de réfléchir un peu, mais je n'avais pas les réponses là, tout de suite...

«J'en sais rien... je t'en veux pas vraiment, t'étais bourré... je t'ai abandonné aussi j'avais qu'à pas partir... m'enfin si dès que je m'éloigne, tu sautes dans les bras d'un autre, je sais pas comment je dois le prendre..» - je me décomposais un peu, venant alors m'appuyer contre le mur face à moi, je n'osais pas vraiment le regarder en fait

«On s'est jamais rien promis toi et moi... tu m'as jamais promis que t'irais pas voir ailleurs, j'ai pas à t'en vouloir pour ça...» - je venais serrer le poing, et comme à mon habitude, je venais prendre mon élan pour y donner un putain de coup! Évidemment que ça me fait chier bordel! Même si je sais que j'étais loin d'être le premier à l'avoir touché, savoir que là, y'en a un autre qui est passé sur son corps ne me plait pas...

Je serrais les dents, mon poings était collé au mur, je n'avais pas réussi à trop me blesser pour le moment, il fallait plus d'un coup pour ça... je posais ensuite mon front contre le mur, essayant de me calmer comme je pouvais. Est-ce que c'est réparable? J'en sais rien franchement... il a pas couché avec, il s'est ressaisit avant, c'est pas dramatique, mais ça me fait chier...
Je fermais les yeux, essayant de ne rien entendre, de ne rien ressentir, mais c'était plus fort que moi.

«J'ai besoin de réfléchir... ou pas, faut plus que j'y pense en fait. Là, j'ai juste envie de le tuer, de lui arracher la langue et les lèvres qui ont osé de toucher...» - je me retournais finalement, me plaquant dos au mur, et les mains derrière aussi pour fixer le plafond, le bout de mes cornes touchaient le plâtre derrière moi alors que je fixais le plafond

«C'est pas mon truc ces choses la...» - je finissais par remettre mes mains sur mes yeux et me laisser glisser jusqu'au sol pour me retrouver accroupi, me recroquevillant sur moi-même comme un enfant apeuré. Je ne pleurais pas pour autant, j'étais juste déboussolé, partagé entre ma haine, ma colère, ma frustration, et peut être aussi une certaine envie de vomir. Non, c'est pas mon truc tout ça... les sentiments.

[Benedikt]

Le botaniste sursauta et jeta un coup d’œil à la main de Vrass contre le mur. D'accooord, ce n'était pas comme s'il y avait à s'étonner de ça. Mais bien sûr, c'était plus agréable quand c'était pour n'importe quoi d'autre que ses propres conneries. Le botaniste se demanda s'il se serait senti mieux si ça avait atterri dans sa figure ; peut-être.
Pour l'instant, il se contenta de se lever de sa chaise pour aller s'approcher doucement de Vrass recroquevillé sur lui-même et se mettre à genoux devant lui, les mains sur ses cuisses, afin d'être à sa hauteur. Cela ne lui ressemblait tellement pas, d'être indécis et découragé comme ça... Benedikt aurait préféré de loin que le tatoueur se mette dans une rage noire et lui hurle dessus ; le voir réfléchir à la suite était encore plus horrible.

« J'ai pas fait ça parce que j'en avais envie, c'est juste que j'ai... que j'avais l'habitude de laisser faire ça et sur le coup, ça me semblait normal... » Bon. Mauvais choix de mots. « naturel... » Parfait. Ça, c'était encore pire. « Non, merde, c'était... putain. C'était juste que je me rendais pas compte de ce qui se passait, j'étais vraiment ivre et je me posais pas de questions, et c'est pas la première fois que ça m'arrive dans ma vie donc c'était pas choquant, je veux dire et... Ça ne voulait rien dire du tout. Je ne t'avais peut-être rien promis mais je n'aurais jamais dû faire ça et je le regrette vraiment... »

« Je te- Je te promet que ça n'arrivera plus jamais, Vrass, je te le promets sur tout ce que j'ai de plus cher et... tout ce que j'ai de plus cher est... ici. »
Benedikt s'arrêta pour respirer bruyamment et ferma les yeux une seconde.
« D'accord, je raconte n'importe quoi, excuse-moi, je... Je devrais peut-être aller faire un tour et te laisser tranquille, je ne sais pas... »
Le botaniste regretta un tout petit peu sa proposition ; il n'avait plus que l'envie d'aller se jeter au lit, se bourrer de somnifères et dormir profondément jusqu'à ce que Amroth envoie ses squasmes le déloger. Ou prendre dans ses bras Vrass et le forcer à rester là jusqu'à ce que la faim l'oblige à le pardonner.
Mais toute la question était de savoir s'il allait pouvoir le faire. Benedikt avait toujours aimé la fierté du tatoueur même si elle était parfois un peu disproportionné ; mais il n'avait pas blessé que sa fierté, pour le coup. Et le botaniste mordit sa lèvre pour s'empêcher avec sûreté de laisser tomber une idiotie de plus. Pour commencer, il allait éviter de balancer n'importe quel mot ressemblant de près ou de loin à je t'aime, parce que ça pouvait éventuellement faire flipper le tatoueur ou le mettre en colère. Et puis... Et puis... Benedikt grogna. Il n'était pas meilleur avec ces trucs-là que Vrass. Tu parles qu'ils s'étaient bien trouvés, tiens.

[Vrass Rannveig]

J'étais totalement incapable de comprendre ce que je pouvais ressentir. Cette jalousie était en train de me bouffer, mais c'était pas après lui que j'en avais, c'était après l'autre. J'arrivais à comprendre ce qu'il voulait dire, des années à se laisser faire, des années à se laisser manipuler, toucher, tripoter, sous le coup de l'alcool, son corps avait simplement gardé ses anciens réflexes, moi aussi ça m'arrivait de les avoir encore, mais je tiens trop bien l'alcool pour que ça dégénère.. mais j'en voulais à la terre entière sauf à lui au final. Je m'en voulais à moi d'être parti, j'en voulais à cet enfoiré de l'avoir embarqué en sachant très bien qu'il était pris, j'en voulais à ces connasses de journalistes qui m'avaient incité à partir comme ça, à cet événement qui m'avait amené là bas, à ces abrutis d'organisateurs qui ne l'avaient pas laissé rester avec moi pour qu'il soit à cette fête où il a trop bu...

Je le sentais près de moi, inquiet, pour sûr qu'il avait de quoi être inquiet, on ne m'avait jamais trompé moi, je n'avais jamais eu de relation pour que ça arrive! Et au fond, il ne m'a même pas trompé, je juge que c'est pas quelques baisers volés qui font une trahison! Surtout que c'est pas vraiment lui qui a embrassé l'autre donc il n'a pas grand chose à se reprocher.
Je sens son hésitation et je n'aime pas ça, je n'ai jamais aimé cette impression que je pouvais lui faire peur, même si là, en soit, c'est pas trop moi qui lui fais peur, il a juste peur que je le foute dehors.

Je tendais le bras pour mettre ma main sur sa nuque, écartant les jambes pour me mettre en tailleurs et le rapprocher ainsi de moi, j'avais trop de choses en tête, j'étais incapable de réfléchir
«C'est pas ta faute... c'est la mienne, et celle de ce type. Désolé mais lui, si je le retrouve, je te jure que je le démonte.» - il n'y avait rien qu'il puisse dire ou faire qui pourrait changer ça. Benedikt avait vaguement l'excuse de l'alcool et n'avait visiblement pas fait grand chose à part se laisser faire, l'autre savait très bien ce qu'il faisait, il n'a pas de circonstance atténuante! Je comptais bien scruter les journaux à la recherche de sa photo et trouver ensuite son nom et son adresse.

Il pouvait sentir que je tremblais encore par la colère et mon cœur battait très vite, mais comme bien souvent, son odeur avait pour mérite de me calmer un peu, surtout ses cheveux fraîchement lavés et je fermais donc les yeux, cherchant encore à me calmer davantage sans grand succès
«Je sais pas ce que je veux. J'en veux à la terre entière de pas avoir pu empêcher ça... mais j'arrive pas à t'en vouloir à toi, je m'en veux de t'avoir laissé là bas. Et le pire c'est que pas un moment tu me l'as reproché»

Il aurait pu pourtant. Si j'étais pas content, j'avais qu'à pas partir. Ça aurait été facile pour lui de le dire...
«Je t'ai laissé le choix... tu pouvais rentrer avec moi ou rester... je crois que je suis en colère de savoir que tu as préféré passer la soirée à boire avec de parfaits inconnus plutôt qu'avec moi.» - oui, ça aussi ça me mettait hors de moi en fait. C'est pour ça que je ne suis pas resté là bas à attendre qu'il sorte. Je le repoussais alors, le regard sombre en réalisant que ce point avait son importance. Il n'avait pas voulu revenir avec moi, il avait préféré rester avec eux. Je posais à nouveau ma tête contre le mur pour fixer le plafond, l'air dépité... au fond, je me trompe peut être, peut être qu'il n'a jamais voulu rester et qu'il a agi ainsi pour que je le foute dehors?

«Tu veux t'en aller c'est ça?» - c'est aussi ce qu'il m'a proposé toute à l'heure, je me rends compte que c'est peut être ce qu'il veut. Je plonge alors un regard sombre dans le sien, la colère continuant de bouillir alors que je réalise que je passe peut être pour un con depuis toute à l'heure - «En fait, tu veux partir, mais t'as la trouille que je t'en empêche?» - là je sens que ça va mal finir...

[Benedikt]

Benedikt fronça les sourcils d'incompréhension, puis secoua la tête.
« Mais arrête avec ça, Vrass, je n'ai pas besoin d'une excuse aussi stupide pour te laisser tomber. Je ne suis pas assez misérable pour préparer un truc pareil ! Si je veux partir, je le fais correctement, et je pleurniche pas dans ta cuisine, je te le dis simplement ! » Le botaniste soupira et se mit à tousser. Ce n'était pas très agréable de savoir que Vrass l'imaginait faire ce genre de chose sans problème, mais vu le sujet de la discussion, il n'avait vraiment rien à dire ; le tatoueur était bien dans son droit, pour une fois.
« C'est vraiment ma faute tout ça, je suis assez grand pour m'occuper de moi-même et tu n'avais pas à me ramener à la maison comme un gamin irresponsable... Je n'ai pas à te reprocher de m'avoir laissé là-bas et ce serait vraiment nul de ma part. J'ai plus 15 ans, même si parfois c'est dur à croire. Mais... Ça me rassure et ça... m'arrange que tu ne m'en veuilles pas...»

Il se pencha pour glisser ses bras autour du cou de Vrass et enfouit son visage dans celui-ci.
« Je pense que je serais rentré avec toi si je n'avais pas déjà commencé à boire, tu sais... » murmura le botaniste avant de plaisanter d'un ton amer. « En voyant ça du bon côté... Tu as maintenant le droit de coucher avec n'importe qui au moins une fois sans que je n'ai rien à dire... »
Restant quelques secondes complètement silencieux, Benedikt finit tout de même à ouvrir à nouveau à bouche : « Mais une chose est sûre, je n'ai jamais peur de toi, Vrass. Arrête de supposer toujours ça parce que c'est complètement faux. » Il se redressa pour regarder le tatoueur dans les yeux, avec autant de détermination que le petit botaniste pouvait montrer. « Je suis sérieux. Je peux être triste à cause de toi, ou en colère contre toi, et bien d'autres choses probablement, mais je n'ai jamais peur de toi. Je me fiche que tu sois un winghox et que je puisse rentrer deux fois dans tes t-shirts, ça n'a rien à voir. Si c'est toi, je me fiche bien de m'en prendre une. Ce seront toujours bien d'autres choses qui m’embêteront plutôt que ça. J'ai aucune raison d'avoir peur. Tu ne m'en as jamais donné. La dernière fois que je t'ai demandé de me frapper, tu n'en as même pas été capable... »

Benedikt baissa les yeux et soupira encore une fois. « Parfois, je crois que je préférerais que tu le fasses... Je le mérites, là. On dirait que je fais toujours exprès de tout foutre en l'air quand le destin décide de me faire plaisir. »
Mais heureusement, Vrass comprenait parfois les erreurs idiotes, non ? Le botaniste était plutôt étonné qu'il ne lui en veuille pas, mais il ne risquait pas de s'en plaindre, plutôt d'en pleurer de bonheur. Nul doute qu'il aurait un comportement exemplaire durant les prochaines semaines. Benedikt avait déjà prévu de ne plus boire plus d'un verre d'alcool par jour de sa vie, croix de bois, croix de fer. Et puis il n'avait pas encore repensé aux inconnus en question à qui il avait parlé la soirée dernière...

[Vrass Rannveig]

Comment il voulait que je le prenne? J'arrivais pas à réfléchir, j'avais trop de trucs en tête, trop de gens que j'avais envie de tuer - moi y compris - alors qu'il revenait se blottir dans mes bras. Il sait comment m'amadouer, c'est évident, depuis le temps, et c'est probablement pour ça aussi que quoi qu'il se passe, j'ai pas envie de voir ailleurs. Y'a pas grand monde qui peut se vanter d'avoir une telle influence sur moi. J'enfouis mon nez dans ses cheveux alors qu'il déclare que j'ai le droit de coucher avec quelqu'un d'autre si je veux, je me mets à soupirer avant de lever les yeux au plafond

«Je crois pas que j'ai jamais attendu ton autorisation pour le faire.. j'en n'ai juste pas envie...» - autrement dit, c'était pas demain la veille que j'allais m'envoyer en l'air ailleurs. Honnêtement, il est suffisamment infatigable lui-même pour ne pas que j'ai envie d'aller voir ailleurs. On n'a pas l'air con n'empêche, on est dans une cuisine mais on reste assis par terre sur le carrelage. Mais j'ai pas la force de me lever pour le moment, et j'ai peut être un peu l'impression que si je le laisse se détacher de moi, je vais de nouveau m'énerver. Là je suis plus calme, plus posé, aussi je préférais rester comme ça.

Il revenait alors sur le fait que j'étais incapable de le frapper, ça aussi c'était une chance pour lui, car y'en a pas beaucoup à qui j'aurais pas envie d'en coller une. Même Viktor j'aimerais parfois lui mettre une mandale juste pour voir s'il est aussi solide qu'il en a l'air! Dommage que je sois pas tombé contre lui lors du tournoi des hiéras, je suis sur que ça aurait été plus marrant que contre l'autre tarée winghox...

«Je sais pas si c'est toi qui fous tout en l'air ou moi... et puis, peut être que c'est le genre de chose normale quand on est dans notre situation.. moi je suis célèbre, ça attire toujours les emmerdes finalement. Mais c'est vrai que tu as quand même une certaine poisse naturelle que même l'étoile filante n'arrive pas à contrer. J'ose pas imaginer ce que ce serait si tu l'avais pas...» - il n'aurait peut être pas réalisé à temps et aurait couché avec ce type. À cette pensée, j'ai un frisson de dégoût et j'enfouis un peu plus mon nez dans ses cheveux. C'est un geste assez affectueux, je pense pas qu'il ait eu l'occasion de caresser cette partie de son corps, en général, juste pour s'envoyer en l'air, on se concentre ailleurs aussi, j'essaie de me dire que cette partie n'a pas été souillée.

Je ne sais pas encore si je pourrai vraiment le toucher à nouveau, je sais que d'autres y sont passés avant, mais je n'aime pas que quelqu'un soit passé après moi... dès que je ferme les yeux, je vois un type sans visage, avec cette coupe de cheveux classique pour la Basse Ville - genre je sors juste de la douche - en train de l'embrasser un peu partout, et j'ai envie d'éclater à nouveau le mur. Même si je ne lui en voulais pas vraiment, quelle incidence ça allait avoir sur nous? J'en sais trop rien, mais là pour le moment, j'arrive pas à retirer cette image sordide de mon esprit, si bien que je m'enfouis un peu dans son cou à mon tour, l'impression d'être un enfant perdu dans tout ça. Voilà pourquoi je ne voulais pas m'attacher à quelqu'un, j'ai l'air fin maintenant tiens! J'ai horreur d'avoir un point faible.

[Benedikt]

Le botaniste leva un minois aux grands yeux écarquillés : « Mais Vrass, je ne l'ai pas, l'étoile filante. Tu ne me l'as jamais tatoué. »
Et Benedikt regretta aussitôt de ne pas l'avoir eu le soir d'avant. Peut-être que sa bonne étoile supplémentaire l'aurait empêché de finir chez un inconnu pour s'étaler dans son canapé en rigolant comme un bêta. Peut-être qu'il aurait eu assez d'esprit pour refuser ses caresses dès le début, et il n'aurait pas eu à s'enfuir de ce même appartement un peu plus tard, le cœur battant si furieusement qu'il avait du mal à respirer.

Benedikt était habitué aux traces d'étrangers sur son corps. Il était très bon pour en faire disparaître le souvenir ; même quand certains laissaient des bleus, c'était seulement l'occasion d'inventer une folle histoire pour en remplacer la véritable origine, qu'il raconterait à qui veut l'entendre ou lui pose la question. Et il n'avait de toutes manières plus vraiment de respect pour un corps auquel il trouvait trop de défauts et qui était passé entre autant de mains ; Benedikt se contentait de faire avec parce qu'il n'avait pas le choix, et puis...bon. Il y était habitué, maintenant, en 28 ans d'existence.
Pourtant, là, c'était un peu plus dur, parce que le regard du tatoueur était un peu trop sombre. Et il n'avait pas besoin de réfléchir énormément pour savoir d'où le frisson du tatoueur venait quand il ne finissait pas ses phrases. Il connaissait déjà. Même si lors de ces disputes avec Pryam, Benedikt ne s'excusait jamais et prétendait qu'il ne comprenait pas ; mais la situation présente était différent de celle-ci. Elle était même très différente, à bien des niveaux, à commencer parce qu'il n'avait plus 19 ans et ne travaillait plus dans un bordel, à finir parce que Vrass était sensé resté aussi longtemps que possible et qu'il était plus proche de lui que n'importe qui d'autre.

Le botaniste se blottit un peu plus contre Vrass, comme pour être sûr qu'il ne le dégoûtait pas à ce point, et resserra son étreinte sur lui. C'était amplement plus rassurant d'avoir l'odeur du tatoueur dans les narines plutôt que celle d'un inconnu, évidemment, mais elle était encore mieux que bien d'autres odeurs. Même celle des plantes. Les champs et les fleurs pouvait sentir bon et être rassurantes aussi, mais elles ne lui donnaient pas l'impression d'être à la maison.
Benedikt resta silencieux quelques secondes, un peu plus pensif tout d'un coup, avant de continuer : « Est-ce que tu pourrais me la faire ? Maintenant ? Avec le motif ou le dessin qui te plaît. Et où tu veux. Juste pas un endroit trop visible, pour l'herboristerie. »

[Vrass Rannveig]

Bordel, je perds totalement la boule... c'est à Kjeld que j'ai tatoué l'étoile filante, pas à lui... je me mordais la lèvre, je ne devais vraiment pas être dans mon état normal pour oublier ce genre de choses, ça ne m'était jamais arrivé auparavant. Je fermais les yeux en sentant la colère me gagner encore plus, tremblant de rage contre moi-même... je lui ai pas fait l'étoile filante. On est parti dans une mission périlleuse au milieu d'une bande de types dangereux qui auraient pu nous tuer à tout instant, et je ne l'avais pas tatoué avant. Je suis vraiment trop con.

Je le sentais se rapprocher un peu plus de moi, probablement avait-il compris que j'étais en train de m'énerver et que c'était comme ça qu'il pouvait me calmer. Je refermais totalement mes bras autour de lui, agacé, frustré, jaloux, énervé, hargneux, furieux... en fait, j'avais trop d'émotions négatives en moi à l'heure actuelle pour réfléchir et je sentais que j'avais besoin de me défouler, de cogner sur quelque chose, de courir, de hurler, n'importe quoi mais il fallait que ça sorte.

Cependant, je fus interrompu par un Benedikt me demandant de le tatouer, là, maintenant. Je me figeais alors, trouvant l'idée assez bête vu la situation et pourtant... c'était peut être ce qu'il me fallait. Dessiner m'avait toujours permis de tout évacuer - bon, il y a autre chose qui m'aidait aussi, mais là, vu les circonstances, on va avoir du mal à finir sous la couette - aussi, j'essayais de réfléchir à ce que je pouvais lui faire...
«L'étoile filante est un petit tatouage... je peux te faire une petite libellule si tu veux. Sur l'ai... sur la hanche ou... enfin où tu veux, ça n'a pas d'importance.»

J'avais machinalement pensé à l'aine puisque c'était là que je l'avais fait à Kjeld, et c'état également là que je me l'étais faite d'ailleurs... probablement que c'était l'un des endroits les plus discrets, même en maillot de bain, on ne pouvait le voir et je n'avais probablement pas envie qu'on croit que je devais mes victoires à certains événements de Sayah grace à ça...
Je reculais alors pour plonger mon regard dans le sien, puis je ramenais ma main sur sa joue pour l'embrasser... mais pas longtemps, l'image de l'autre - sans visage toujours - qui faisait la même chose avant moi me repoussa et je détournais les yeux un moment, le regard encore sombre.

«J'ai l'encre qu'il faut pour celui la... il est assez demandé. Les gens croient toujours que ça va leur faire gagner à la loterie, j'ai beau leur dire que la chance ne décide jamais du moment où elle agira, ils ne me croient pas...» - j'essayais de détourner la conversation comme je pouvais, mais je n'aimais pas cette situation. Est-ce que j'allais vraiment réussir à surmonter ça?

«Par contre, je préfère te tatouer dans la chambre là haut. Je vais fermer la boutique pour aujourd'hui, j'ai pas le cœur à bosser.» - et s'il y en a qui ne sont pas contents, ben ils iront se faire voir.

[Benedikt]

Benedikt hocha la tête prestement. « Non, une libellule sur la hanche, c'est parfait. »
Quand à fermer la boutique, c'était une bonne idée... Mais le botaniste ne se sentit que plus coupable et n'en fila que plus rapidement à l'étage.
En attendant Vrass, il se glissa sur la nouvelle terrasse après avoir enfilé un pull. La pelouse était toute douce et le botaniste enleva ses chaussettes pour sentir les brins entre ses orteils, malgré ce que son côté raisonnable lui dictait alors qu'il était déjà malade. Même ici, Benedikt avait pourtant l'impression d'étouffer. Bien sûr, pensa-t-il amèrement, puisque c'était lui-même et ses souvenirs, le problème. Il s'assit quand même dans l'herbe contre le petit muret sur le bord de la terrasse, la vision des toits des Ghettos à perte de vue plus ou moins apaisante malgré tout. Le plus dur était toujours de voir le regard de Vrass, de toutes manières, où comment il l'évitait, parfois. Le botaniste n'avait pas l'habitude de ça, ni non plus de gestes fait à demi ou de baisers écourtés.

Benedikt arracha une poignet de brins verts, et les jeta dans le vent qui les emporta aussitôt. Qu'est-ce que ce serait merveilleux si je pouvais faire pareil avec moi, se fit remarquer le botaniste. Garder un esprit avisé et jeter le reste pour tout recommencer à zéro. Les souvenirs aussi, on pouvait peut-être bazarder. Garder simplement la moralité des erreurs qu'on avait fait tout au loin de sa vie. Y avait-il une limite sur le nombre d'erreurs que l'on pouvait faire dans sa vie ?
Mais le botaniste n'en savait rien, après tout, il n'était qu'un orphelin d'Ephtéria ayant voyagé en zig-zag jusqu'à la Basse-ville. Il n'avait sûrement pas les réponses aux grandes questions de la vie. Tomber par hasard dans la vie de Vrass était juste un sacré coup de chance, fait sans l'étoile filante.

Le botaniste rapprocha ses genoux de sa poitrine, il commença à avoir sérieusement froid, là. Autant rentrer avant qu'il ne tombe si malade que Vrass devrait s'occuper de lui. Ce n'était pas le moment. Benedikt retourna à l'intérieur, et entendant que le tatoueur faisait encore du bruit en bas, se laissa tomber sur le lit comme une poupée de chiffon avant qu'une nouvelle quinte de toux le fit se lever pour aller fouiller dans sa trousse de produits de l'herboristerie.
Flûte, il avait juste du thé contre les maux de tête, d'utile. Le botaniste n'avait pas envie de retourner en bas et faire attendre Vrass quand il aurait fini juste parce qu'il voulait faire chauffer de l'eau ; il n'avait même pas terminé la tasse que celui-ci lui avait donné plus tôt. Est-ce que l'étoile filante lui attirerait assez de chance pour finir ses tasses de thé ? Benedikt sourit légèrement et se contenta de remplir un verre d'eau qu'il posa sur la table de nuit en revenant.

Son sourire tomba immédiatement quand il aperçut son appareil photo. Un appareil photo. Comme celui de la femme avec laquelle il avait discuté une bonne partie de la soirée. Les morceaux de puzzle se mirent soudain en place dans sa tête et le botaniste se figea horrifié. Putain. Qu'est-ce qu'il lui avait raconté déjà ? Merde. Merde. Difficile de se souvenir précisément de tout, et une bonne partie n'était que des idioties. Benedikt eut envie de se mettre à hurler, mais à la place, il fila un coup de pied dans la porte de la salle de bain pour l'ouvrir et la refermer derrière lui. Vrass n'était pas là pendant la soirée organisée à l'intérieur des ateliers. Il ne savait probablement pas que la jeune femme était une journaliste. Comment est-ce qu'il allait annoncer ça ? Comment si c'était la peine d'aggraver son cas !
Le botaniste hoqueta et plongea la tête dans la cuvette des toilettes. Parfait. Cette fois espérons que c'était la dernière fois. L'alcool n'était pas sensé vous faire vomir pendant une journée entière, non ? Il avait déjà eu sa dose avec cet insecticide, dis donc. Benedikt soupira et se brossa les dents une nouvelle fois avant de ressortir de la salle de bain, les paumes moites à cause de la fièvre et du stress. Cette fois, Vrass allait vraiment le détester en apprenant ça... Sans compter l'article ou les photos qui seraient peut-être publiés quelque part. Mon dieu, espérons qu'elle travaillait pour un petit journal inconnu ! Ou que les réponses du botaniste ne l'aurait pas assez intéressé...

[Vrass Rannveig]

Essayer de se changer les idées, avec un tatouage, c'était peut être une bonne idée. Je laissais Benedikt monter à l'étage pendant que je préparais l'encre, les aiguilles aussi... je prenais des teintes dans les tons turquoise, bleu et vert pour les ailes, j'avais envie de lui faire quelque chose de fin et de discret. j'avais envie que ça ressemble à une vraie libellule qui serait posée sur sa hanche, il aime tellement les insectes que je n'ai pas envie que ma mauvaise humeur bâcle le travail.

Je mettais le tout dans un petit carton avant de monter, je sais que j'ai pris mon temps, mais bon, vu les circonstances. J'ai mis un panneau fermé sur la porte, de toute manière, si on veut vraiment un tatouage, la perle m'y conduira. J'ai entendu le bruit des toilettes là haut, il me semble qu'il y a des trucs chez l'herboristerie pour calmer la gueule de bois, mais je n'en ai pas... déjà que je ne bois pas beaucoup, je tiens bien l'alcool en prime. En montant les escaliers, je l'entends tousser et je soupire, il était dans la rue sans son manteau cette nuit, il a chopé la crève à tous les coups.

«Voilà que tu tombes malade...» - je pouvais voir qu'il avait récupéré son appareil photo et je soupirais avant de poser la boîte avec les encres sur la petite table de nuit - «Crois moi, à mon avis, toi et moi on a eu notre dose de photos avec la soirée d'hier. Entre le défilé et les petites interviews que tu as données, tu vas être servi.» - et oui, même si je ne connaissais pas l'autre, juste le fait qu'il y avait Onirie suffisait à savoir que ça allait être le bordel. Je soupirais en revenant vers lui, il pouvait voir qu'entre temps, j'avais mis la bague qui représentait gourmette zen pour me calmer un peu. Je venais poser ma main sur son front pour voir sa température

«Tu es un peu chaud...tu es sur que tu veux que je te fasse le tatouage maintenant?» - il valait peut être mieux qu'il se remette déjà de ça avant... quoi que c'est vrai qu'il risque d'avoir besoin d'un peu de chance avec les photos qui vont sortir. Je passais ma main dans ses cheveux d'un air assez calme, la gourmette faisait effet donc je me sentais un peu mieux. Un très bon investissement ce truc.

[Benedikt]

« Oui, oui, ça ira, de toutes manières c'est pas parce que j'ai de la fièvre que ça va changer quelque chose à mon tatouage al- » Benedikt se redressa brusquement, la bouche ouverte. « Des interviews ? Tu savais que j'étais en train de parler avec une journaliste ? »
Le botaniste se laissa retomber sur le lit en couinant comme un chien blessé. Difficile de se décider entre être soulagé de ne pas l'avoir à l'apprendre à Vrass et le désespoir de savoir qu'il était au courant.
« Vrass, je- je ne comprends pas, n'importe quel autre jour, tu m'aurais attrapé, jeté sur ton dos et tu serais parti avec moi sans même me demander mon avis... »

Sauf que pour le coup, ce n'était pas le cas. Il soupira et enfouit son visage dans ses mains.
« Hé merde, alors que je viens de reprendre l'herboristerie... Là je le fais vraiment exprès... Tu...Tu sais qui c'est, la journaliste ? Est-ce qu'elle travaille pour un grand journal ? Est-ce qu'elle est connue ? »
Benedikt se tut et ferma les yeux, fort, pour voir si ce n'était pas un cauchemar, mais une nouvelle quinte de toux l'arrêta. Super. C'était la journée la pire de sa vie. Il semblait que tout ce qui pouvait exister de merdique s'accumulait autour de cette stupide histoire avec Aiden l'assistant. Tiens, Aiden, le voilà, son prénom.
Mais le botaniste n'avait guère envie de discuter avec Vrass de ça alors que leur interactions étaient encore assombries par l'ombre de sa petite virée sur le canapé d'un autre. Il avait d'autres chats à fouetter, disons, même si ces chats-là étaient bien inquiétants. Mais inutile de jouer les paniqués, de toutes manières, il n'y avait plus rien à faire maintenant, et le tatoueur n'en pouvait pas plus.
« Excuse-moi, fait comme si je n'avais rien dit... Peu importe, de toutes manières, maintenant. J'espère juste que je n'ai rien dit d'embêtant te concernant... » - en plus des photos probablement horrifiante de lui qui allait sortir par milliers d'exemplaire en couleurs. Rien de pire comme publicité quand Benedikt aimait en général avoir l'air propret et présentable devant les inconnus. Surtout si elle l'avait vu partir avec ce type après, ce serait encore pire.

Le botaniste regarda l'aiguille qu'avait le tatoueur dans ses mains, et ses couleurs à côté. Oui, décidément, il ferait bien avec un peu de chance, là... Après avoir enlevé son pantalon de pyjama, Benedikt s'arrêta pourtant et jeta un coup d’œil à Vrass.
« Je dois enlever tout ou... pas ? » demanda-t-il soudain hésitant. Mieux valait poser la question plutôt que d'entendre un « rhabille-toi » humiliant parce que le tatoueur n'avait pas envie de le voir à moitié nu à cet instant...

[Vrass Rannveig]

«Celle aux cheveux bruns avec des lunettes pour cacher qu'elle est morphe, c'est Onirie Tamitsuko. Une journaliste qui a déjà beaucoup écrit sur moi. L'autre femme, je ne sais pas qui c'était, mais elle avait aussi la tronche d'une journaliste, en tout cas, elle n'avait pas l'air d'une assistante ou d'une technicienne donc la seule raison pour laquelle une femme comme ça aurait été là, c'était pour obtenir des informations croustillantes.»

Je m'approchais quand même pour m'asseoir à côté de lui, préparant ce qu'il fallait pour le tatouage. S'il venait à tousser, ce serait un peu ennuyeux c'est sur, mais j'avais la main sure de mon côté, ça ne risquait rien.
«Avec quelqu'un comme Onirie, si je t'avais attrapé comme tu dis, elle aurait fait de toi mon chien, mon esclave et aurait même pu dire que je te traumatisais et que je te forçais à me suivre partout. Pour ta carrière, ça n'aurait pas été avantageux. Il est préférable que tu aies l'air un peu excentrique et foufou que d'un larbin... je suis désolé.»

Et Onirie est vraiment quelqu'un de redoutable avec les mots. Elle sait quelles personnes interroger pour avoir des informations erronées mais qui paraîtront vraies à la vue de tous. J'essayais quand même de lui sourire, la gourmette zen faisait bien effet quand même, une vraie merveille ce truc
«Ne t'en fais pas. Malgré tout ce qu'elle a pu écrire à mon sujet, tu vois bien que je suis encore très populaire. Au final, les gens ne s'intéressent pas si on écrit en bien ou en mal sur toi, juste le fait qu'on parle de toi, tu deviens célèbre... ça t'aidera quand même pour ta boutique, et puis, il te suffira de travailler un peu ton image dans d'autres circonstances et les gens oublieront vite.»

Malgré tout, j'avais souvent envie de faire bouffer des baies d'argus à cette chère Onirie pour écouter toutes les conneries qu'elle pourrait dire, la filmer et balancer ça aux infos! Ça lui ferait les pieds à celle la. Il se remettait à tousser et je levais les yeux au ciel, le transformer en petit garçon dont j'allais devoir m'occuper sans pouvoir lui sauter dessus, contrairement à ce qu'il pensait, c'était peut être ce qu'il nous fallait justement. Ça me laissait le temps de digérer cette histoire tout en me gardant proche de lui.

Il semblait inquiet à l'idée de devoir entièrement se déshabiller, ce qui me surprit. Malgré tout, je ne voulais pas qu'il attrape froid avec ce qu'il couvait
«Garde le haut, et baisse juste ton pantalon et ton caleçon sur le côté pour dévoiler ta hanche... je veux pas que tu attrapes froid.»
Je lui souriais avant de commencer à prendre la première aiguille, celle qui avait l'encre noire pour les contours. Je levais alors les yeux vers lui, me souvenant d'un truc

«Tu sais que l'étoile filante coûte quand même 50 ores?» - enfin je ne le savais pas encore, mais sa carte de fidélité était presque pleine et j'allais donc pouvoir lui faire à moitié prix. Mais ça, on verrait lorsque je remplirais le registre. Je n'aimais pas l'idée de le faire payer, mais à ce sujet là, Sayah était très stricte. S'il acceptait parfois que je me fasse payer en nature - dans les Ghettos, c'était chose courante, on préfère échanger un service par un autre - lorsque le client avait les moyens de payer en ores, j'avais pas intérêt à faire autrement.

Je commençais donc le dessin, je suivais bien le mouvement de sa hanche de manière à faire comme si la bestiole était délicatement posée sur la pointe de l'os, les ailes partiellement déployées comme si elle était sur le point de s'envoler. Je lui montrais déjà la silhouette pour voir si elle lui plaisait, avec un léger sourire inquiet. C'est la première fois que je lui fais un tatouage sans faire le dessin avant.

«Je la ferai dans les tons bleu-vert, comme ça regarde...» - je lui montrais les couleurs que j'avais prises, histoire de voir quand même ce qu'il en pensait?

[Benedikt]

« Oui, c'est parfait, c'est déjà beau... » murmura le botaniste appuyé sur ses coudes. « Et je m'en fiche que ça coûte cher... Je suis riche, maintenant. Ou presque. »
Benedikt fit une petite grimace. Oui, riche et célèbre, bravo, toi-même. Le tatoueur venait en plus de lui apprendre qu'il y en avait plusieurs, des journalistes, encore pire.
« Je ne suis pas excentrique et foufou... J'étais soûl... » souffla-t-il tout bas en se répétant les paroles de Vrass, le nez froncé comme un lapin, avant de continuer. « Je préfère vraiment quand personne ne me connaît à part ceux que j'ai déjà rencontré... »
Mais bon, est-ce qu'il avait le choix, maintenant ? C'était sa faute après tout, alors ce n'était pas la peine de se plaindre. « Mmmmh, ben voilà, ça m'apprendra. Je le mérite bien, après tout. »
Il laissa Vrass se concentrer pour continuer son dessin, le regard perdu dans le plafond assez inintéressant.

Étalé sur le lit, la seule chose qui empêchait le botaniste de ne pas se rendormir était l'aiguille qu'on plantait dans sa peau répétitivement. La douleurs n'était pas inconnue ni très forte, pourtant, et Benedikt se contenta d'essayer de tousser le moins souvent pour ne pas déranger le tatoueur.
Et puis c'était plutôt agréable finalement de voir Vrass le tatouer, dans la situation. Il y avait beau y avoir d'autres mains qui étaient passé par là, cette marque resterait, contrairement aux autres. Le botaniste esquissa un sourire. Bon, le souvenir qui allait avec n'était peut-être pas très joyeux. Mais au moins, ce serait un rappel de ses erreurs, non ? Les cicatrices et les traces servaient aussi à ça ; à ne pas oublier – celle qu'il avait sur le front, sous une tonne de bouclettes, disait « ne cours pas dans les escaliers en chaussettes, surtout pas au deuxième étage de l'orphelinat » -.

« Vrass ? » appela doucement le botaniste, pas sûr qu'il avait fini à présent. Ah, si ! Benedikt essaya de zieuter un peu son nouveau tatouage, mais il le voyait à l'envers et la peau était encore rouge. Autant attendre un peu, même s'il était plutôt impatient de voir correctement le résultat, il avait déjà un gros aperçu à présent. Le botaniste savait déjà que cela lui plaisait, de toutes manières. « Est-ce que tu crois que tu peux m'en faire d'autres aujourd'hui ? Des... tatouages, je veux dire. »
Benedikt se mordit la lèvre. Difficile d'expliquer sa demande un peu étrange d'une soudaine envie de tatouages. Dire à Vrass qu'il aimait l'idée de le voir dessiner quelque chose de permanent sur lui semblait bizarre dit à voix haute, et un peu trop sentimental pour eux même en temps normal.

[Vrass Rannveig]

Excentrique foufou et saoul, c'est pareil pour les journalistes. Enfin, il allait malheureusement l'apprendre à ses dépens, ou plutôt, il l'avait déjà appris
«C'est le prix à payer quand on me fréquente apparemment...» - enfin, je préférais me concentrer sur son tatouage pour le moment, réalisant qu'effectivement, cette chasse aux journalistes était plus ma faute que la sienne, malheureusement. J'avais fini la silhouette, et je voyais bien que ça lui convenait pour le moment. Aussi, je passais à la couleur, faisant attention pour faire des effets de lumière et ainsi rendre la libellule la plus réaliste possible.

Je finissais enfin, plutôt satisfait dans l'ensemble alors qu'il m'appelait. Levant les yeux vers lui, j'étais en train de ranger soigneusement le matériel lorsqu'il me demanda si je pouvais lui faire un autre tatouage?
«Euh... ça dépend. Je ne peux pas t'en faire un à côté de celui-ci pour le moment, il faut que la peau se repose un peu... pourquoi? Tu veux quelque chose en particuli... c'est quoi cette tête?» - je finissais à moitié ma phrase alors qu'il se mordait la lèvre.

Je soupirais en me redressant de façon à le laisser se lever aussi
«Déjà, va voir si celui la te plaît.» - ce serait déjà ça de gagné, car mine de rien, je tenais à m'assurer qu'il soit content avant que je ne lui fasse autre chose. Je caressais doucement la peau autour du tatouage, elle était encore un peu rouge, il faut que je lui mette de la crème

«Tu vas devenir une toile de maître à force, si je continue à te tatouer.» - c'était peut être un peu prétentieux de me qualifier de maître, mais d'une certaine manière, c'était un peu ça! Je me tournais vers lui en lui laissant la place de se lever s'il en avait envie, on verrait ensuite pour les autres.

[Benedikt]

Benedikt jeta un coup d’œil à Vrass. « Justement, tu vois, tu devrais continuer... »
Il finit de tout même par se relever pour trottiner jusqu'à la salle de bain. Observant cinq bonnes minutes le nouveau dessin sur sa peau, il se mit à sourire inconsciemment. Elle était vraiment jolie, cette libellule, et tout était tracé assez délicatement pour que l'on ait l'impression qu'elle aurait pu s'envoler d'une seconde à l'autre.
Le botaniste se fit la remarque qu'il serait peut-être sympathique d'avoir des tatouages qui bougeaient. Il y en avait déjà un que Vrass faisait qui se transformait, non ? Peut-être qu'avec la magie de Sayah, ce serait possible. Il devrait en parler au tatoueur, ça pourrait être une bonne idée. Même si Benedikt avait du mal pour l'instant à savoir comment il devait se comporter avec le tatoueur. Toute cette affaire n'était pas vraiment habituelle et le botaniste avait toujours été particulièrement nul pour savoir ce qui se passait dans la tête des gens quand la sienne lui était déjà bien mystérieuse.

Benedikt fronça les sourcils à son reflet et lui tira la langue. Cela faisait un petit bout de temps qu'il ne s'était pas senti aussi mal à l'aise avec lui-même. Outre le fait que son corps lui en voulait pour tout l'alcool qu'il avait bu et d'avoir traîné dans le froid, tiens. Le botaniste finit par retourner dans la chambre et s'installa précautionneusement sur le lit pour ne pas frotter son tatouage contre du tissus et se faire mal. Il fallait encore que Vrass mette de la crème dessus. Il n'y avait plus qu'à espérer que personne ne décide d'avoir besoin de quelque chose à l'herboristerie au moins avant quelques heures, sinon pour toute la journée, parce que la dernière chose qu'il voulait était être obligé de s'habiller correctement et rentrer sans manteau dans les Ghettos après ça. Son estomac grognait un peu du manque de nourriture depuis hier soir, mais le botaniste n'avait pas vraiment d'y mettre quoique ce soit juste après avoir fini la tête dans les toilettes, alors il récupéra simplement le verre d'eau qu'il avait posé sur la table de nuit.

Le botaniste prit une gorgé d'eau qui le fit tousser, puis soupira et effleura les motifs des ailes de la libellule posée sur sa hanche.
« Laisse tomber cette histoire de tatouage, c'est idiot, je vais attendre que celui-ci cicatrise... Après tout, tu pourras m'en faire d'autres après... n'est-ce-pas...? »
Benedikt secoua la tête pour faire voler les pensées qui lui venaient à l'esprit, bien sûr, pas la peine d'avoir des doutes...
« Je... je devrais peut-être dormir encore un peu, si ça te dérange pas. J'ai du mal à garder les yeux ouverts et j'ai vraiment mal à la tête. »

[Vrass Rannveig]

Difficile de savoir tout ce qui se passait dans sa tête. Mais d'un autre côté, c'était plutôt normal qu'il se pose encore des questions nous concernant. La bague me permettait d'être plutôt calme à l'heure actuelle, si mon esprit bouillonnait encore de tous les sentiments qui passaient par là, mon corps était au moins apaisé et ça aidait un peu. Je le voyais filer vers la salle de bain pour se regarder pendant que je finissais de ranger, puis lorsqu'il revint, il jugea qu'il avait le temps de faire ses autres tatouages, bien que sa question me paraissait étrange.

«Bien sur...» - il se roula alors en boule pour se glisser sous la couette, jugeant qu'il était épuisé encore et qu'il avait besoin de repos. Je prenais rapidement la crème pour lui en appliquer une couche généreuse sur la hanche avant de remettre la ceinture de son pyjama par-dessus, laissant l'élastique passer bien au-dessus pour ne pas que ça touche trop le tissu. Puis je me levais pour prendre la boîte et aller ranger le matériel en bas. Lorsque je remontais, j'avais l'impression qu'il avait encore envie de pleurer, et je réalisais qu'au fond, on n'en avait pas fini avec cette histoire. Je soupirais avant de faire comme hier, je me glissais derrière lui pour l'enfermer entre mes bras.

«Je suis là.» - je jugeais que pour le moment, c'était suffisant comme phrase. J'enfouissais mon nez dans ses cheveux, appréciant leur odeur même s'il s'y était mêlé un léger parfum désagréable après son passage forcé dans les toilettes, mais je m'en foutais un peu à l'heure actuelle. J'avais aussi faim, mais je sentais que je n'avais pas intérêt à m'en aller pour le moment. C'était comme instinctif, un truc que je ressentais dans tout le bordel qui passait par ma tête. Il y avait des trucs que je devais faire et que je ferai. Retrouver ce type et lui apprendre ce qu'il en coûte de poser ses mains sur quelqu'un qui est avec moi. Pour le reste... je sentais que ça passait peu à peu. Je finissais par fermer les yeux pour m'endormir à mon tour, même si mon estomac se mit sérieusement à râler de le laisser ainsi sans nourriture pour le combler!

[Benedikt]

Lorsque Benedikt se réveilla à nouveau, le réveil sur la table de nuit indiquait qu'on était en fin d'après-midi. Le botaniste desserra son étreinte sur le bras du Vrass qu'il gardait contre lui et trottina jusqu'à la salle de bain pour aller boire un peu d'eau. Cette fois, son ventre grognait sérieusement, et il finit par descendre au rez-de-chaussée, mais sur le chemin de la cuisine, il remarqua la morphe chienne allongé sous le comptoir et s'accroupit à sa hauteur avec un léger sourire.

« Dis, Iza, est-ce que tu pourrais aller nous commander des pizzas, s'il-te-plaît ? Je peux t'écrire un petit mot pour que tu n'ai pas besoin de te transformer. Il y a ce truc qui s'appelle Bella Ciao pas loin, c'est au coin de la rue. »
Le botaniste prit sa truffe mouillé dans sa figure pour un oui et lui griffonna de son écriture désastreuses une commande pour la boutique de tatouage, que la morphe attrapa entre ses dents avant de sortir. Benedikt profita de l'attente avant la livraison pour se faire une tasse de thé dans la cuisine terriblement silencieuse, mais il avait l'habitude à force de préparer souvent le petit-déjeuner le matin. Même si souvent, Iza lui tenait compagnie en même temps que la radio. Là, c'était un peu ennuyeux, mais il n'était pas sûr de regretter le calme vu le marteau qui frappait son cerveau à intervalles réguliers.

Une tasse de Berneus et la visite du livreur plus tard, le botaniste remonta à l'étage les mains pleines, décidant de manger au lit par défaut sans même se poser la question. Il déposa les deux cartons à un coin du lit et sa tasse sur la table de nuit avant de poser une main sur l'épaule du tatoueur.
« Vrass ? » croassa le botaniste d'une toute petite voix avant de tousser pour réussir à parler d'un volume audible. « J'ai commandé à manger. Je ne voulais pas te réveiller mais du coup, j'en ai pris une pour toi avec pleins de viande. »
Il attrapa une part de pizza recouvert d'épinard et mâchonna avec plaisir, son estomac immédiatement heureux de la suite des événements.
« Je vais probablement pas pouvoir travailler demain ni après-demain... » soupira le botaniste entre deux bouchées. « Je ne me fais pas attraper pas les microbes souvent, mais quand ça arrive... »

Et le lendemain lui donna raison. Benedikt passa la journée au lit, alternant entre des siestes de plusieurs heures et un ennui profond. Après avoir renoncé à lire « Les mystères de l'espace et des planètes révélés » parce qu'il s'était endormi dessus deux fois et que la fièvre lui brouillait l'esprit, le botaniste se contenta de jouer à trois petits chats version botanique avec toutes les plantes qu'il connaissait. Où était Vrass ? Il semblait à Benedikt qu'il lui avait dit ce qu'il faisait aujourd'hui, un peu plus tôt, mais impossible de s'en souvenir alors qu'il avait déjà du mal à trouver la suite de « Camomille ». Mille... Mille-feuille ? Nan, ça marchait pas, ça, c'était un gâteau. Mille... Ah. Millepertuis ?

[Vrass Rannveig]

Réveillé par une bonne odeur de viande, je ne pouvais qu'être de bonne humeur. Me redressant avec une certaine raideur, je m'installais en tailleurs pour pouvoir manger directement sur le lit. J'aimais bien lorsque je voyais tout ce tas de viande sur une pizza! Lardons, merguez, chorizo... que de bonnes choses! La soirée allait se terminer un peu mieux, cependant, à voir sa tête, Benedikt était clairement parti pour choper la crève.

«Bon, je pense que Belladona peut assurer encore un peu l'interim, ou même Sayah pendant que tu es convalescent.» - il fallait bien qu'il ait encore quelque utilité ce fichu lézard hein?
En tout cas, on finissait la soirée assez simplement en restant au chaud, je vérifiais au passage son tatouage, et j'étais descendu pour vérifier sa carte de fidélité. Elle était pleine, aussi le tatouage allait lui revenir à moitié prix.

«Tu me devras 25 ores pour le tatouage, tu y penseras?» - c'était surtout histoire qu'il n'oublie pas.

Le lendemain matin, je m'étais levé de bonne heure, allant faire quelques courses pour lui prendre des fruits pour qu'il puisse avoir des vitamines, mais aussi de quoi faire des gaufres et des pancakes. Cependant, je m'arrêtais surtout chez un marchand de journaux et je commençais à chercher des articles qui pouvaient parler du défilé, fronçant les sourcils, je finissais par mettre la main sur l'un d'entre eux. Il y avait plusieurs photos de Benedikt sur le fameux canapé, mais il n'y avait personne avec lui en particulier. Jusqu'à ce que je tombe sur un autre article un peu plus loin

«Le tatoueur a bien des cornes!» - je fronçais des sourcils avant de lire l'article qui tournait bien notre relation en dérision. Le fait que Benedikt n'avait clairement pas envie de rentrer avec moi parce qu'il avait craqué sur un bel assistant du nom de Aiden Winter. Mon regard s'assombrit et je venais payer le journal avant de remercier le vendeur qui essayait de me dire de ne pas croire à ce genre de torchons!

«Ce n'est pas ce qui est marqué qui m'intéresse, du moins, à moitié.» - il y eut un petit pop pendant que je me rendais à la Basse Ville avec la perle pour ne pas perdre de temps. Je me dirigeais ensuite vers la première cabine téléphonique pour attraper un annuaire et je le consultais à la recherche du fameux Aiden Winter... un sourire amusé se dessina sur mes lèvres alors que je voyais qu'il n'y en avait qu'un et donc, que j'avais son adresse.
J'appelais un taxi pour m'y rendre, un appartement plutôt simple qui ressemblait vaguement à celui qu'avait Benedikt avant. Je frappais à la porte, et lorsque le type ouvrit, je ne fis que lui donner un violent coup de poing sur le nez, l'étalant sur le sol alors que je m'approchais de lui pour lui agripper le col! Il couinait comme un cochon qu'on égorge en ramenant ses mains sur son visage pour se protéger, du sang un peu partout alors qu'il semblait dire quelque chose d'incompréhensible

«Ça, c'est pour l'avoir touché en sachant très bien qu'il était avec quelqu'un! À l'avenir, ça te gardera peut être de vouloir jouer les amants! N'oublie jamais qu'à jouer à ça, tu prends toujours le risque de te faire trucider par un mari jaloux!»
- «M..mari? M...mais je... je pensais que vous étiez j.. pardon !!!»
- «Non crétin! Je parle pas de moi là! Je te parle pour plus tard! Cesse tes conneries à piquer le mec des autres sinon il t'arrivera des bricoles bien pires que de te retrouver face à un winghox en colère!»
- «Je suis désolé!!! Mais il riait tellement, il semblait content!»
- «Il était bourré abruti!! Tu crois pas pouvoir te trouver un mec sans le piéger de la sorte?» - heureusement que j'avais gardé la bague, sinon je doute que j'aurais pu tenir une conversation avec lui. Je me redressais, j'attrapais un paquet de mouchoirs pour le jeter près de lui - «T'as de la chance que je ne sois pas énervé. J'avais vraiment prévu de t'éclater la tête au point d'en avoir des problèmes avec les flics, mais t'as raison sur un point, il avait sa part de responsabilité aussi. Donc, tu t'en tires qu'avec un nez cassé! Profites en, c'est pas tous les jours que je laisse partir quelqu'un qui m'a poignardé dans le dos!»
- «Je... pardon...» - il ne savait visiblement pas quoi dire et je serrais légèrement les poings avec l'envie de lui en coller une autre. Puis je pestais avant de fermer la porte derrière moi. Il pouvait porter plainte s'il le voulait, je m'en foutais totalement. Mais visiblement, ce n'était pas dans ses intentions. Je voyais bien que ce n'était pas un mauvais bougre, mais je ne pouvais pas lui pardonner pour autant.

Je descendais de l'immeuble avant d'attendre d'être de nouveau seul pour retourner dans les ghettos avec mes courses. Je passais la porte, j'avais un peu de sang sur la main à cause de l'autre, je ne m'en étais pas rendu compte. Je rangeais rapidement les courses avant de me diriger vers l'étage, un jus de fruits fraîchement pressé à la main
«Hey... comment tu te sens?» - je devais avoir l'air déjà un peu plus détendu pour sûr, mais il valait mieux pas qu'il sache pourquoi hein?

[Benedikt]

« Mal ? Enfin ce n'est pas comme si je n'allais pas survivre. » croassa Benedikt avec un sourire en se redressant. Il attrapa le verre que lui tendait le tatoueur et son sourire s'élargit, ça c'était exactement ce qu'il lui fallait. « Merci ! »
Le botaniste n'avait pourtant pas bu une gorgée qu'il fronçait les sourcils et prit une des mains de Vrass.
« Oh, qu'est-ce que tu t'es fait ? » demanda Benedikt en effleurant ses phalanges, mais il laissa rapidement tomber l'affaire quand il ne trouva aucune blessure spéciale et en conclut tout seul que le tatoueur avait dû se couper ou quelque chose de superficiel dans le genre. La clochette de l'entrée retentit de toutes manières à cet instant.

Ce ne fut que trois-quart d'heure plus tard que le botaniste redescendit au rez-de-chaussé, profitant que Vrass était en train de faire payer son client pour se glisser sans bruit dans la cuisine. Une tasse de Berneus serait bienvenue, même si Benedikt n'avait pas du tout envie de voir qui que ce soit et que descendre à la cuisine quand il y avait des clients relevait toujours pour lui d'une bonne dose de discrétion pour que personne ne le remarque alors qu'il passait.
Refermant la porte derrière lui, le botaniste fit chauffer de l'eau et sortit un sachet de thé en frissonnant. Il faisait meilleur sous les couvertures, tiens. Il resta planté devant la bouilloire en frottant ses chaussettes l'une contre l'autre, remplit sa tasse d'eau bouillante et s'apprêtait à retourner au lit quand...
Le botaniste reposa sa tasse et se mordit la lèvre. Il y avait un journal à côté des sacs de courses à moitié vidés et il était rare que Vrass achète le journal. Il pouvait d'ici deviner les raisons ; il y avait un morceaux de bouclettes brunes visible sur une photo, et Benedikt attrapa lentement le tout pour le déplier. Merde. C'était vraiment lui, les joues rouges et en train de rire comme si ça vit en dépendait. Et... L'article qui allait avec avait un titre plutôt explicite.

Benedikt finit par s'asseoir pour lire l'article, son visage se décomposant progressivement à chaque mots blessants qui s'enfilaient comme des perles, noir sur blanc, et lui donnait envie de déchirer en mille morceaux ce torchon de conneries. Le botaniste se demandait si le tatoueur l'avait déjà lu, mais cela aurait semblé plutôt évident, non ? Il était seulement surpris de voir que Vrass était venu lui apporter à boire avec autant de calme juste après ça. Cela aurait été plutôt normal que le tatoueur se sente blessé dans sa fierté en voyant les commentaires de cette saleté de journaliste ; Benedikt se sentait déjà vexé sur la manière dont on le présentait, en plus d'être horrifié par le reste. Et ce n'était probablement pas le seul article sur eux qu'on pouvait voir dans les journaux aujourd'hui, puisqu'il y avait eu au moins deux journalistes avec lui...
Il entendit Vrass revenir dans le cuisine et garda les yeux fixé sur les pages qu'il tenait entre ses mains, bien trop honteux pour croiser son regard.

« Je suppose que je l'ai bien mérité, hein, maintenant tout le monde me prends pour une pute. Même quand je l'étais vraiment, personne ne le savait à part les concernés. Bordel... » Le botaniste enfouit son visage dans ses mains. « Je suis désolé. Excuse-moi... C'est ma faute si on raconte des immondes sur toi. Je commence à me demander... si je mérite vraiment de rester, là. Je ne t’apporte que des emmerdes. »

[Vrass Rannveig]

Merde, le sang. Bon, visiblement, il ne posait aucune question, j'étais seulement allé me laver les mains rapidement en jugeant que j'avais du m'écorcher quelque part ou alors que j'avais touché quelque chose qu'il fallait pas avant d'entendre du bruit en bas qui me donnait une bonne excuse pour descendre.

Je passais juste ma main dans ses cheveux pour qu'il se repose encore un peu avant d'aller m'occuper de mon client. De toute façon, lui, il devait rester au lit, donc je pouvais continuer à travailler en même temps. Contrairement à lui, j'étais plutôt doué pour mentir quand il le fallait. Il m'avait laissé les sous de côté pour le tatouage, aussi je les rangeais soigneusement dans la boîte prévue à cet effet avant de m'occuper de mon client. Ce n'était pas un tatouage bien difficile, cependant le client semblait avoir lu les journaux, et lorsqu'il vit Benedikt passer, il me regarda d'un air surpris
«Euh... vous êtes toujours ensembles?»
- «Oui pourquoi?» - je levais un regard presque blasé à l'attention de mon client qui me payait d'un air hésitant
- «Euh.. j'ai vu dans les journaux que euh... il avait... enfin...»
- «Oh ça? On est un couple plutôt libre en fait. Il va voir ailleurs parfois et moi aussi. Ça ne change rien.»
- «Ah!! Je vois! Oh d'un autre côté, c'est vrai que ce n'est pas surprenant de vot' part en fait...»
- «Vous me voyez, moi, avec un seul mec?»
- «Non c'est vrai! Ah ben cette journaliste va se sentir bien conne en fait...»
- «Oui enfin... les gens me connaissent surtout dans les Ghettos, pas trop dans la Basse Ville, mais je m'en fous un peu en fait.»
- «Oh vous en faites pas! Je vais me dépêcher de raconter la vérité non mais! Z'êtes un type bien! Vous faites vivre pas mal de gens dans le coin, on n'aime pas trop quand on vous crache dessus par ici!»

Je souriais un peu en lui faisant même une petite ristourne pour la peine. Il semblait content et filait déjà. Je revenais vers la cuisine où je trouvais un Benedikt avec le journal dans la main. Le fait qu'il s'en sente mal me faisait tout de même plaisir, au moins ça lui apprenait la leçon.
«T'inquiète pas pour ça, je fais courir la rumeur qu'on est un couple libre de toute manière et qu'on s'en fiche. Elle aura l'air bien conne en voyant qu'elle ne peut pas m'atteindre comme ça.» - j'attrapais le journal avant de le jeter dans la poubelle, puis je venais m'asseoir pour me planter face à lui

«Je suis allé voir ce Aiden...» - voyant son visage se décomposer, je levais la main pour lui montrer que j'avais toujours la bague «zen» - «il est toujours vivant, t'inquiète pas. Mais je l'ai soigneusement mis en garde qu'il a plutôt intérêt à l'avenir à ne plus chercher à piquer les mecs des autres s'il ne veut pas avoir des problèmes. Son nez risque juste de ne plus être aussi beau qu'avant pendant quelques jours.»
Autant être honnête avec lui. J'avais été sympa avec ce type, heureusement qu'une journée s'est écoulée finalement, car sinon je pense que si j'étais allé le voir dans les conditions dans lesquelles je me trouvais au départ, je l'aurais tué. Quoi que peut être pas, cette bague a vraiment d'excellentes propriétés, j'ai bien fait de l'acheter.

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