A dire vrai, l'on pourrait presque penser que je vivais dans un châtelet… Celui-ci était bien trop grand pour une seule personne, raison pour laquelle je vivais avec une flopée de servantes. Pour ce qui était des hommes, je ne leur laissaient pas le loisir d'habiter dans la même demeure que moi : le jardinier ne passait que tous les trois jours ; et le cuisinier habitait à proximité. Concernant les demoiselles, elles avaient bien trop de respect envers ma personne pour ne serait-ce que faire l'affront de parler sans que je ne les y autorises. Est-ce que j'étais aussi tyrannique ? Au premier abord, c'était sans doute l'impression que je donnais, si bien que j'avais déjà entendue certains de mes employés dire que j'étais la version féminine du roi Livian. Suite à cela, ils avaient simplement été congédiés définitivement… En soit, ce dirigeant était l'un des hommes les plus désagréables qui soit, aussi je ne pouvais tout simplement pas supporter d'être comparée à lui. Après, je voulais bien qu'il n'était pas non plus l'un des hommes les plus repoussants qui soit, mais peut-être qu'il s'agissait là de sa seule qualité. Il faudrait que j'ai un jour l'occasion de le rencontrer pour m'en assurer.
Pour le moment, moi et le jeune oisillon nous trouvions dans le hall de ma maison. Juste en face de nous se trouvait un escalier menant en direction de l'étage, celui était recouvert d'un tapis rouge qui arrivait jusqu'à nos pieds. Et de chaque côté du tissu se trouvait trois servantes inclinées, ce qui avait une fois de plus le mérite de me faire soupirer… Je n'avais vraiment pas pour habitude d'avoir des invités, et je pouvais donc constater qu'elles avaient sorti le grand jeu, raison pour laquelle je devais paraître légèrement agacée. Juste à côté de moi se trouvait celle qui nous avait ouvert la porte, et elle refermait derrière nous maintenant que nous étions entrés. Il s'agissait plus ou moins de la servante en chef, bien que je n'étais pas sûre que ce soit la désignation la plus correcte qui soit. C'était aussi celle qui s'occupait le plus souvent de moi, comme par exemple ce matin, aussi j'avais rapidement appris à savoir quand elle voulait m'adresser la parole.
« Qu'y a t-il, Siria ? »
- Je vous prie de m'excuser, mais votre bain n'est pas encore prêt. » Elle était clair dans ses mots, aucune crainte n'étant visible. Elle me connaissait… « Il n'était pas prévu que vous rentr… »
- Pourrais-tu t'en occuper ? Notre invité en aurait bien besoin… » Il y avait presque une pointe d'agacement dans mes mots… Il sentait effectivement l'odeur des voyages.
- Tout de suite, mademoiselle. » Répondit-elle en jugeant du regard le jeune homme à mes côtés, soit car il refoulait vraiment trop même pour une personne comme elle, ou bien parce qu'elle comptait lui préparer des vêtements de rechange. Connaissant la demoiselle, il devait s'agir surtout du second cas, mais je n'excluais pas la possibilité qu'il pouvait s'agir du premier. Après, peut-être qu'elle était aussi inquiète de savoir ce que je pouvais faire avec un tel individu, et peut-être craignait-elle pour ma fleur… Petite sotte. Bien qu'une telle attention était touchante, jamais je n'irais forniquer avec quelqu'un comme lui, d'une part car il était sans aucun doute beaucoup plus jeune que moi, et d'autre part car il n'était pas du tout mon type.
Siria se dirigea alors vers la salle de bain du rez-de-chaussée, à gauche de l'escalier, celle qui était surtout faite pour les invités, bien qu'il n'y en avait que rarement eu. En temps normal, je laissais les demoiselles à mon service l'utiliser, car si je n'aimais pas être recouverte de crasse, je n'aimais pas plus que les personnes sous mon toit se trouve être négligente à leur égard. Bien entendu, au début elles en avaient été surprises, mais elles avaient fini par s'y faire malgré tout.
Du même côté se trouvait un salon, ou plutôt devrais-je dire une petite bibliothèque, bien que la majeur partie de mes ouvrages se trouvaient être à l'étage. Et entre ces deux pièces se trouvaient la cuisine, endroit où je ne mettais que rarement les pieds. Je dirigeais alors le jeune homme vers le salon, une servante accourant presque pour nous ouvrir la porte, et une fois à l'intérieur, deux des murs étaient recouverts de livres, tandis que le troisième voyait simplement une peinture assez coûteuse surplombant un jeu d'échec en marbre. C'était d'ailleurs sur ce mur que se trouvait la porte, tandis que le dernier voyait simplement une porte vitrée menant sur le jardin. J'invitais alors l'Orphe à venir s'asseoir sur le sofa juste devant la fenêtre, tandis que je faisais ensuite signe à la servante de nous apporter quelque chose à boire. Je m'installais ensuite, croisant mes jambes tandis que je jugeais mon invité…
« Tu as dis vivre dans les Ghettos ? » L'on pouvait distinguer une légère pointe de curiosité dans ma voix. « Cela fait quelques temps que je ne m'y suis pas rendue. Tu es parti depuis longtemps ? »
La curiosité était peut-être un bien vilain défaut, mais je m'en contrefichais : encore une fois, quand je voulais quelque chose, je mettais tout en œuvre pour l'obtenir, et même quand il s'agissait d'information…