Précédemment :
Le Squiz, bar d'automatesArrivée dans la chambre, j'évitai les nombreux objets au sol, sautillant sur quelques mètres telle une acrobate sur un sol miné et arrivai jusqu'à mon lit sur lequel je m'étalai. Quelque chose me gêna, dans ma poche. Je me retournai paresseusement et y fourrai la main pour en ressortir la petite cruche que j'avais acheté quelques minutes plus tôt. Je souris. Sacré journée ! J'avais passé une bonne partie de la matinée à chercher la boutique, que j'avais trouvé seulement après être montée sur les épaules d'un Picaris de presque trois mètres de haut, pour ensuite tomber, être frappée de mutisme et d'amnésie, me faire arnaquer par le vendeur et ne rien pouvoir dire, puis aller boire un coup avec ledit Picaris, lui acheter une poterie, et...
Quelque chose cria, et je sursautai, me cognant la tête contre le plafond bien trop bas. Je vis alors sortir de dessous mon lit deux de mes idiots de frères, Skydd et Leech.
"Vous êtes vraiment des abrutis ! ça fait combien de temps que vous attendez ici, rien que pour le plaisir de me faire peur ?"Skydd se redressa, riant, l'air très fier de sa bêtise et s’épousseta.
"Environ une heure je dirais !", dit-il.
"Fais attention où tu marches Leech", dis-je à l'intention de l'aîné, qui s'apprêtait à écraser une éprouvette qui trainait sur le sol.
"Si tu rangeais mieux ton "appartement" aussi... On pourrait t'aider à remettre tout ça en ordre, t'y verrais plus clair !"J'y vois très clair, merci", répondis-je,
"qu'est-ce que vous venez faire ici ?"Leech s'assit à côté de moi sur le lit, et entoura mes épaules de son bras.
"On vient voir comment va notre petite sœur !- Exactement", acquiesça Skydd,
"on vient voir où elle en est dans sa petite vie, dans son petit apprentissage...
- Gal est déjà passé y'a deux jours !", m'offusquai-je,
"quand vous comprendrez que j'ai 27 ans et que je peux me débrouiller seule ?Skydd sourit et croisa les bras en lançant un triomphal :
"Jamais !"Ils se mirent tout les deux à rire. Je soupirai. Bien sûr, je les aimais énormément, ça me faisait vraiment plaisir qu'ils s'inquiètent pour moi, mais il fallait vraiment qu'ils cessent de me couver ! J'allais leur montrer que je pouvais très bien me débrouiller seule. Je me levai et me plantai fermement devant eux. Ils arrêtèrent de rire et me regardèrent.
"Bon, écoutez-moi bien vous deux. Vous transmettrez ce message aux autres. Vous êtes d'adorables grands frères aux adorables attentions mais je vous le répète : je n'ai plus 10, ni 15 ans. Je vis seule, je me débrouille seule. D'ailleurs, je sais très bien me débrouiller seule, pigé ?"Pendant que je parlais, je voyais à leur sourire qu'ils essayaient de me croire mais qu'ils ne changeraient pas leur comportement. En même temps, ce genre de discours, je leur avais déjà sorti des milliers de fois. Leech me regardait, les sourcils levés, la bouche tordue en un petit sourire qui voulait dire "oui, je t'entends petite sœur, mais je serais quand même toujours là pour toi". Skydd prenait un air sérieux et concentré, près à entendre tout ce que je leur dirais, mais sachant très bien que quoi que je leur dirais ne les ferait pas changer d'avis.
Très bien, il s'agissait alors d'y aller franchement.
"Et puis, vous savez quoi ? Je sais tellement me débrouiller seule que je pars, demain, en voyage. Ne faites pas cette tête, je suis sérieuse. Demain, dès l'aube, je partirai. Je vais traverser Nideyle et j'aurais plus personne pour me coller aux basques ! Je vous adore tous, mais là, j'ai besoin d'air. Et puis ici, j'arrive pas à avancer dans mon apprentissage, je vais aller rencontrer des chimistes partout sur Nideyle, comme ça j'accumulerais les connaissances et les points de vue différents sur la matière !Je montais mon plan au fur et à mesure que les mots sortaient de ma bouche. Je n'y avais jamais pensé avant, j'étais en train de décider de ça, maintenant, et plus j'en parlais, plus ma décision se faisait ferme, décidée. Oui, c'est ce que j'allais faire, c'était même une très bonne idée.
Mes frères mirent beaucoup, beaucoup, beaucoup de temps à partir après cette déclaration. Ils avaient peur pour moi, ils refusaient catégoriquement de me laisser partir. Mais j'eus raison d'eux, et après deux bonnes heures, ils étaient partis, me priant encore et encore de renoncer à ce projet fantasque.
Pour être fantasque, il l'était, pour moi qui n'avait jamais quitté la ville.
Je m'assis sur mon lit, et réfléchi pour la première fois à ce projet. Je songeai à toutes les choses que je devais prendre, que je devais faire pour préparer ce voyage... avant le lendemain matin. Car oui, j'étais décidée à partir le lendemain, avec Ch'ip.