Bon, ben finalement il va pas pioncer là. J'avais préféré éviter de lui tendre la main pour l'aider à se relever, dans la mesure où il a peur et se referme chaque fois qu'on lui vient en aide, je lève les yeux au ciel pour le suivre jusqu'à l'atelier. Une fois en bas, je tends le bras
«Attends deux minutes»
Je vais chercher une lingette désinfectante et la passe sur la table, je veux bien que Pop' soit un bon ébéniste, mais je préfère quand même m'assurer que le gosse ne va rien chopper d'autre, c'est bon il en a déjà vu - on sait jamais que Pop' se soit amuser à tester la table pour voir si elle me résisterait avant. Je jète la lingette, la table avait désormais une légère odeur de javel mêlée au citron et j'invitais le gosse à s'allonger
«Je vais d'abord finir le loup garou. J'attaquerai l'étoile filante après. Pour l'instant n'enlève que la chemise»
Quand je pense qu'il va devoir se foutre à poils pour se faire tatouer l'aine. Mais vraiment quel con! Je sens que je vais devoir garder le nez à trois kilomètres sinon il va croire que je le mate ou pire que je veux le tripoter! J'ai le droit de le tuer? Non? Allez juste un peu? Et merde. Je le laisse s'installer pendant que je vais chercher de l'encre normale. Un voile triste passe sur mon visage alors que je vois le flacon «loup garou» devant moi. Ça ne servirait à rien. Je ne peux pas le finir, pas comme ça... je n'ai pas la moindre idée de la quantité d'encre nécessaire pour gicler cette saloperie, et je ne peux plus prendre le risque de le cramer encore, il va finir encore plus pourri qu'un vieux mégot. Je me retourne pour voir qu'il s'est allongé. Mon regard se fait totalement neutre, alors que je prends l'aiguille avec le réservoir à encre normale pour m'approcher. Effectivement, le Doc' a fait des merveilles et la peau n'est presque plus enflée, à peine un peu rouge. Comme la fois précédente, je lui tends une lanière de cuir
«Tu dois avoir la peau encore un peu sensible, au cas où... je te promets d'y aller doucement»
Je me lance. Progressivement, délicatement, soulevant l'aiguille le plus souvent possible lorsque je le sens un peu trop trembler, j'essaie d'en faire le maximum en un seul passage - c'est lorsqu'on repasse par-dessus que ça fait le plus mal. Dessinant bien les contours, je fais attention quand même à faire une belle forme, terminant le torse puis le corps, je le remplis un peu moins aussi, donnant l'illusion qu'il s'agit d'un loup blanc plutôt que d'un loup noir, n'étant plus contraint par l'encre, je peux laisser libre cours à mon talent d'improvisation. Finalement, il ne s'agit pas d'un loup garou, mais bel et bien d'un simple loup hurlant à la lune. Beaucoup plus beau que le dessin original selon moi, appuyé sur un rocher. Une dernière retouche pour donner à son pelage un côté un peu plus fourni et le tour est joué. Je me pousse pour qu'il voit son reflet dans le miroir au plafond
«Alors? Ça te convient? Je peux rajouter autre chose si tu veux, une lune, des arbres, d'avantage de poils... Sinon, si tu te sens prêt, tu peux aller dans la pièce à côté pour enlever le pantalon. Tu y trouveras un drap pour t'y enrouler afin que je te fasse l'autre tatouage»
Puis, lui lançant un regard inquiet
«Tu es sur que tu veux toujours l'aine? »
Ben oui, je préfère m'en assurer...