Pour le moment je me redressais, regardant autour de nous, analysant le moindre détail de l'endroit où nous nous trouvions. La moindre image qui apparaissait dans mon champ de vision était tout simplement enregistrée à l'intérieur de mon crâne, aussi je parais déjà à certaines éventualités, comme le fait que l'on nous retrouve, même si tout le monde semblait persuadé que personne ne viendrait aussi profondément au travers de la forêt. Personnellement, je préférais prévenir que guérir, et même si j'étais bien conscient que ces bois étaient dangereux, un groupe de mercenaire bien entrainé pouvait parfaitement vouloir s'y aventurer dans le but de toucher la prime qui était sur ma tête, et dont je ne connaissais d'ailleurs même pas le montant. J'espérais au moins qu'elle serait assez élevée, non pas car il s'agissait là de vanité mal placée, mais plutôt car une petite mise à prix donnerait envie à plus de monde de vouloir m'appréhender, tandis qu'une grosse n'attirerait que les plus courageux, même si ce chemin était parsemé d'embuches. Au pire, il me suffirait simplement de la faire grimper un peu afin de dissuader un plus de monde. Ou bien alors… je pouvais rechercher une manière de faire baisser ma notoriété. Il devait bien exister plusieurs méthodes pour ça : arracher les avis de recherche, soudoyer les crieurs de rues, éliminer ceux qui coopéraient avec les autorités afin de dissuader les gens de m'appréhender, ou même encore effectuer certaines bonnes actions pour avoir une partie du peuple à ma botte. Je pouvais aussi simplement quitter la région et me faire oublier quelques temps, et peut-être que me rendre au travers de la Basse-Ville, qui était tout de même une endroit bien différent de la région où nous nous trouvions, me permettrait simplement de ne pas être recherché là bas. De toute manière, dans la mesure où je semblais connaître ce contexte là ce serait forcément l'une de mes destinations à un moment donné.
Pour l'instant, je détachais simplement l'outre que j'avais à la taille, ouvrant alors celle-ci pour boire une ou deux gorgées, puis je m'approchais de la jeune plante qui était en train de se ressourcer. Je versais alors un peu d'eau au creux de ma main, puis je venais passer celle-ci sur le front de la demoiselle, glissant mes doigts au travers de ses cheveux. Je me souvenais de ce qu'avait dit le Winghox il y a de cela deux jours, que ce serait plus efficace que de lui faire boire d'une manière typiquement humaine. Je répétais donc cette opération plusieurs fois, préférant opérer ainsi dans la mesure où même si ce conteneur d'eau était plus grand qu'il n'y paraissait, j'avais envie de limiter son utilisation, ainsi que de m'occuper un peu de Belladona qui devait commencer à fatiguer à l'approche de la nuit. Une fois terminé, je soudais quelques instants mes lèvres aux siennes, comme pour lui dire bonne nuit d'avance, et j'étais déjà désolé à l'idée de ne pas pouvoir passer la nuit à ses côtés cette fois-ci. Je versais ensuite peu d'eau pour le Picaris qui nous avait laissé ce fruit, c'était probablement la moindre des choses, même si je ne lui en fournissait pas non plus des litres dans la mesure où je n'avais pas rempli entièrment l'outre, que je n'avais pas que ça à faire et qu'il n'était pas seul, car une fois terminé je m'approchais alors de la petite pour lui tendre le récipient, alimentant alors un début de conversation.
« Je ne sais pas si tu sais cuisiner, mais ça pourrait être utile dans la mesure où c'est quelque chose dont je ne me souviens pas… » Mon regard se faisait un peu triste et je me laissais choir sur le sol froid, regardant le néant au loin. « Que veux-tu faire à Éphtéria ? J'imagine que tu n'as pas de famille à Guttenvald, sinon tu ne chercherais pas à te rendre à la capitale. » Je laissais quelques secondes de silence. C'est vrai qu'elle ne me faisait pas confiance. « Enfin, tu n'es pas obligée de me répondre. »
Je ne détachais pas mon regard de l'obscurité naissante au loin. J'essayais de ne pas me perdre dans mes propres pensées pour le moment, j'aurais toute la nuit pour ça…