Comme les deux doigts d'la patte

Si l'est un point sur lequel tous s'accordent, c'est l'inhospitalité de Guttenvald ! Aux pieds des Obsidiennes et perdu dans la forêt des Ombres, c'est le poste frontière entre Ephtéria et N'qâta.

Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 24 Jan 2012, 18:09

Précédemment : Forêt d'Ombre pour rencontre lumineuse.
*°*°*°*°*°*°*°*°*

La ville la plus proche fut Guttenvald. Sombre, froide, humide, inhospitalière. Mais à Kallistrat taillé comme deux Guttenvaldois belliqueux, personne n'osa chercher des puces, et certains villageois s'écartèrent même sur son passage. On le regarda bien de travers, mais occupé à chercher de l'aide ailleurs que sous l'austérité des pèlerines, il y fut totalement indifférent. En fait, chaton était insouciant au point de ne même pas se soucier de ce genre d'animosité à son égard. Quelques passants s'arrêtèrent pour l'observer. Ce n'était pas tous les jours qu'un immense homme-lion faisait irruption dans leur vie ! Le corps de Shara sur ses épaules ajoutaient d'ailleurs à la crainte qu'il inspirait, comme s'il traînait avec lui la dépouille de son dernier trophée de chasse. En définitive, la scène était suffisamment insolite pour clouer le bec même des plus querelleurs.

Comme il ne savait pas trop qui demander, Kallistrat posa la louve sur un lit de feuilles mortes près de la fontaine et se mit à réfléchir... Ce ne fut pas chose facile puisque sa capacité de concentration fut mise à rude épreuve par une dispute de corbeaux à quelques pas, ce qui lui titilla les moustaches un bon moment. Revenant à lui après qu'un passant ait dissipé les gros oiseaux noirs, il alla laper un peu d'eau à la fontaine lorsque son odorat fut attiré par un odeur particulièrement prenante. Un mélange d'eucalyptus et d'autres plantes lui rappelèrent qu'il était ici pour un guérisseur... guérisseur qui ne devait pas se trouver très loin s'il se fiait aux effluves qui lui piquaient le sinus. Aussitôt alerté, il récupéra le petit corps poilu de Shara entre ses bras et se dirigea d'un pas assuré vers l'ouest du village. Il eut même un sourire de voir l'enseigne de l'auberge en forme de loup noir en se disant naïvement que ce village devait probablement aimer les loups...

Enfin, après quelques mètres vites avalés par ses grandes pattes, il identifia la source de ces odeurs entêtantes comme provenant d'une boutique esseulée et y entra avec son précieux fardeau. Évidemment, pas une seconde il ne se demanda si quiconque ici avait déjà vu un Orphe lion de sa vie.

« Bonjour. Il y a quelqu'un ? J'ai besoin d'aide pour soigner mon... »

… chien ? Il posa un regard sur Shara en se demandant comment il devait l'appeler. La dernière fois qu'il avait donné un nom à un animal venu le voir, c'était pour une calopsitte. Têk. Il n'avait jamais pu s'en débarrasser depuis... Aussi préférait-il ne pas donner de nom à la louve, de crainte qu'elle devienne aussi envahissante et pénible que son mini perroquet...

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 24 Jan 2012, 19:01

Si on lui avait dit qu'un jour, elle devrait la vie à un félin, elle se serait jeté la tête dans une ruche d'abeille pour se réveiller. En tout cas pour le moment, la louve était totalement inconsciente et se laissait porter avec autant de délicatesse qu'on porterait un sac de pommes de terre. Son corps inanimé pendouillait par endroit où l'orphe lion essayait de la tenir tant bien que mal. Malgré sa musculature imposante, il fallait reconnaître qu'elle pesait son poids et la pause pour boire un coup était la bienvenue, même si cela lui aurait surement fait du bien à elle aussi... mais essayez de boire en étant inconscient vous!

En tout cas, elle avait fini par déboucher dans un endroit aux multiples odeurs entêtants, un endroit où Gildwin voulait justement la conduire pour faire soigner la patte qu'elle s'était coincée dans un piège à loup. Un vieil homme sortit d'un petit cagibi et sursauta en voyant le lion dans sa boutique


«Boudiou vous m'avez fait peur! Euh... c'est un loup?»

Soigner les hommes, d'accord, les orphes aussi, et même les winghox ou les picaris pourquoi pas, mais un loup totalement con qui pouvait l'égorger, non merci. Cependant,celui là semblait inconscient et il indiqua à Kallistrat de le poser sur la table

«Vachement gros pour un loup... il fait la taille du morphe qui vivait dans la cabane en dehors de la ville...»

Vivait, oui, car malheureusement, la rumeur était vite arrivée jusqu'à la ville comme quoi ce pauvre bougre avait été assassiné. Il posa doucement sa main sur la tête de la louve et souleva la paupière close avant de soupirer de soulagement «c'est un morphe... enfin... une morphe...» précisa t'il en détournant le regard vers l'arrière train. «La vache, elle a morflé... » il leva un regard un peu inquiet vers l'orphe, se demandant s'il était responsable de son état. Une bagarre qui a mal tourné? Non, elle ne portait pas de marques de griffes ni de morsures. Sa patte portait les traces d'un piège en revanche, mais le reste semblait être du à des coups. Aussi, il cessa de suspecter le lion et commença à s'atteler à la tâche de la soigner.

Commençant par les blessures les plus graves, il prit soin tout de même de mettre une muselière à la louve en levant un regard inquiet à son hôte
«C'est juste pour le cas où elle se réveille en sursaut, j'ai pas envie de perdre un bras.» puis il alla chercher le baume larmiqueuse dans un premier temps pour la plaie à sa patte, il l'avait quelque peu modifié pour que ça pique un peu moins, principalement pour les orphes et les morphes justement, le souvenir du guépard sur sa table était encore assez cuisant et la trouille qu'il avait eu qu'elle le bouffe était encore bien présente, même si elle avait été particulièrement docile, son grondement sourd était encore bien ancré dans sa mémoire.

Cependant, la louve était vraiment dans un sale état et n'avait même pas réagi au baume appliqué sur sa blessure qui était déjà presque cicatrisée en réalité depuis le temps, elle avait appliqué elle-même certaines plantes dessus,aussi cela expliquait peut être pourquoi ça ne lui avait pas fait tellement mal. Il lui fit tout de même un bandage avant de commencer à passer doucement sa main sur son flanc, la respiration était encore bien saccadée et parfois lorsqu'il appuyait un peu, un gémissement sourd se faisait entendre.


«Aie, elle a quelques côtes cassées... je vais essayer de lui passer un peu de baume Saint-Ôl et lui faire un solide bandage, mais faudra qu'elle se tienne tranquille et couchée pendant au moins un jour ou deux, ce serait même mieux la semaine mais bon... elle ne pourra probablement pas tenir tranquille aussi longtemps. Il vaudrait mieux qu'elle reprenne apparence humaine par contre pour ça...»

En se transformant déjà, une part des os devrait se ressouder, aussi il alla prendre quelques sels et les lui mit sous les narines, elle renifla quelques secondes avant d'éternuer une fois, deux fois, trois fois... ses petits yeux larmoyants devant l'odeur infecte se levèrent vers le vieil homme, se rendant compte qu'elle était muselée. Instinctivement, elle commença à poser sa patte au niveau du masque, cherchant à le retirer en tirant comme une bourrique dessus et en agitant la tête dans tous les sens, grondant et gémissant sans même se dire qu'en prenant apparence humaine, ça tomberait tout seul

«On se calme! On se calme!» le vieil homme avait levé un regard désespéré à Kallistrat pour qu'il l'aide à la maintenir pour ne pas qu'elle se blesse d'avantage à s'agiter ainsi «Je vous ai soignée! Reprenez votre forme humaine s'il vous plait! VOTRE FORME HUMAINE!»

Il avait montré son propre corps afin qu'elle le comprenne bien, elle s'était alors figée et le regardait en clignant des yeux bêtement, puis finalement, son corps commença à changer et elle ferma les yeux sous la douleur des os qui se modifiaient en même temps. Une fois humaine, la muselière avait glissé autour de son cou et elle s'était recroquevillée en boule en hurlant de douleur, de ce genre de cri qui devait probablement rendre Kallistrat complètement fou

«Calmez vous, je sais, ça fait mal! Allongez vous, je vais vous soigner... SOIGNER!!!»

Soigner? Elle connaissait ce mot, elle avait alors cessé de crier et avait fini par déplier ses jambes, couinant à nouveau sous la douleur provoquée. Pas un instant le vieil homme ne rougit devant la nudité de la jeune femme, il était bien trop vieux maintenant pour s'attarder à de telles choses, et il en avait vu d'autres dans sa carrière de guérisseur. Prenant le baume, il commença à l'appliquer sur sa peau, c'était plus pratique sans les poils tout de même, et la chaleur semblait déjà faire du bien à Shara

«Comment vous vous appelez mon p'tit?»

Elle pencha la tête sur le côté, réfléchissant à ce qu'il lui demandait, elle ne connaissait pas cette façon de parler

«Votre nom? Et vous? C'est quoi au fait? » il en avait profité pour lever les yeux vers Kallistrat, il allait en avoir encore pour un moment à faire les bandages, alors autant entamer la conversation, surtout qu'il allait devoir l'aider pour les bandages, elle aurait surement du mal à tenir assise toute seule...

«Il y a un drap là bas, vous pourrez aller le prendre s'il vous plait? Elle va attraper froid la petite...» le regard inquiet de Shara passait de l'un à l'autre, d'un côté elle avait un vieil homme qui lui caressait le flanc, et si elle n'avait pas aussi mal, elle aurait peut être apprécié, quoi qu'elle trouvait ça mieux sous sa forme animale, et de l'autre, un gros chat gris qu'elle avait déjà vu quelque part, mais elle ne se souvenait pas où, inconsciente que c'était il y a à peine quelques minutes dans la cabane où son ancien chef de meute avait trouvé la mort. Amnésie passagère peut être due au choc, qui sait?

«Moi, Shara...» elle serra ensuite les dents alors qu'il passait le baume dans son dos... ça faisait vraiment mal, mais en même temps, elle sentait que ça lui faisait du bien, et puis, elle se sentait bien trop faible pour pouvoir s'en prendre à qui que ce soit... son ventre gronda d'ailleurs, signe qu'il était vide depuis un moment, et ses lèvres gercées montraient aussi des signes de déshydratation, mais chaque chose en son temps...

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 28 Jan 2012, 02:19

Kallistrat penché sa tête massive sur le côté, comme s'il essayait par ce biais de mettre en contact deux neurones esseulés. Les questions du guérisseur n'étaient pas bien compliquées en soit, mais elles étaient nombreuses, arrivaient vites, et trouvaient souvent une réponse si évidente que chaton se demandait pourquoi il les posait. Était-ce un loup ? Évidemment que c'était un loup... ça ne ressemblait pas à un Euther en tous les cas... mais à l'évocation d'un Morphe habitant en périphérie de la ville, l'homme-lion redressa la tête. Ah oui, elle était peut-être Morphe. Il n'avait pas bien vu ses yeux lorsqu'elle était revenue vers lui... et puis dans l'obscurité de cette cave, tous les chats auraient été gris... et l'étaient. Les louves aussi d'ailleurs... et leurs yeux ? Il n'avait pas pensé à les regarder de plus près, mais après une courte réflexion, ça ne l'étonnait pas plus que ça.

« Ah... c'est pour ça que le Pelel'je ne l'a pas contaminée. » constata-t-il avec un flegme déconcertant.

Intrigué par cet humain – ce n'était pas tous les jours qu'il en rencontrait depuis qu'il avait quitté son village – il s'appliqua à faire tout ce que ce dernier demandait, y compris de plus bizarre ! Il en fut donc quitte pour abattre ses immenses paluches sur les épaules de la louve alors qu'elle se battait contre l'objet qu'elle avait autour du museau. Chaton pensa aussitôt qu'il aurait sans-doute réagit de la même façon s'il s'était réveillé avec une chose pareille sur le nez, mais au vieil homme, cela semblait normal. Il perdit même un peu patience en aboyant ses instructions à sa patiente devenue hystérique. Kallistrat en coucha les oreilles, outré que l'on puisse parler si fort en sa présence, mais ce ne fut rien comparé à la plainte déchirante que la lâcha la louve en redevenant humaine.

Au moins il n'avait pas le temps de s'ennuyer !

La toute petite fille – forcément, comparée à lui – lui demanda alors son nom, et il se redressa en bombant le torse, tout heureux qu'on s'intéresse enfin à lui.

« Mon nom est Kallistrat Rusia, mais tu peux m'appeler Kallistrat. » ronronna sa voix profonde.

Le vouvoiement ? Il n'en avait aucune notion. À Zosma, tout le monde se tutoyait et il était même probable que notre chaton ne connaisse même pas ce pronom ! Peu bavard, il alla gentiment chercher le drap que le guérisseur lui avait demandé et en couvrit maladroitement celle qui se présenta sous le nom de Shara. La pudeur ? À d'autres. Aux yeux de l'Orphe lion, la jeune femme n'avait rien d'attirant. Trop différente de ceux de son clan... et trop étrange avec ses gros pis comme les vaches et son absence totale de poils. Non, ce n'était pas très pratique tout ça. Ses oreilles revinrent vers l'avant comme un ressort en entendant le ventre de la jeune fille gargouiller. Ça, il connaissait !

Aussi, sans un mot, il tourna les talons et sortit sous le regard médusé du vieil homme.

Une grosse demi-heure plus tard, la porte s'ouvrit de nouveau sur un Kallistrat aux poils tout en bataille. Quelques feuilles mortes s'étaient emmêlées dans sa crinière et du sang colorait ses babines qu'il se léchait encore en entrant. En travers de son épaule, un petit chevreuil fraîchement égorgé lui donnait un air indéniablement fier, et indifférent aux protestations du guérisseur, il déposa son fardeau entre les bras de Shara.

« Il y avait un Grand Candélabre, mais j'ai préféré le laisser partir. Les miens disent que ce n'est pas très bon à manger. »

Son regard s'attarda sur les bandages, et comme un gamin qui ne se soucie pas d'y aller avec tact, il se décida à poser les questions qui lui passaient par la tête, dans l'ordre où elles se présentaient.

« Tu faisais quoi dans la maison ? Et c'était qui tous ces humains ? Pourquoi vous vous battiez ? »

En fin de compte, il connaissait bien ce pronom... mais pas pour l'emploi courtois.

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 29 Jan 2012, 17:12

Si Kallistrat avait pensé qu'il serait plus simple pour Shara de comprendre son nom en le «simplifiant», ce n'était pas le cas. Ce n'était pas compliqué, elle n'avait pas du tout compris son nom et finalement, aurait préféré pouvoir l'appeler Ruchat... plutôt que Kalli.. ou Kalli oui ça allait aussi, mais elle aimait bien Ruchat en fait.

«Ka.. Ruchat?» elle affichait un air des plus épuisés à cause de la douleur et de la journée qui s'était écoulée - ou la nuit plutôt en fait, elle ne savait même plus à quel moment de la journée on était. L'homme l'avait couverte et sur le coup, elle n'avait pas compris pourquoi, jusqu'à se souvenir que Guidouine avait essayé un nombre incalculable de fois de lui expliquer que les humains avaient besoin de s'habiller. Elle avait alors ramené l'espèce de couverture sur elle pour se protéger aussi du froid alors que son estomac gargouillant avait fait fuir le chaton.

Le médecin n'avait pas vraiment compris ce qu'il lui avait pris et avait continué à la soigner, terminant de bien la serrer dans son bandage tout en s'assurant qu'elle respirait bien


«Vous me comprenez un peu?» elle avait levé les yeux vers lui et hocha simplement la tête, il retira la muselière qui pendait toujours à son cou et s'assura que les dernières coupures dues aux éclats de bois étaient bien désinfectées et lui sourit, un peu comme un grand-père affectueux

«Il faudrait que vous restiez humaine quelques jours... pas de louve, d'accord? Vous restez comme ça...» il avait essayé de mimer un peu par des gestes pour lui expliquer mais le regard triste qu'elle avait lancé en disait long sur sa compréhension. Oui, elle avait bien compris. Il l'aida à se redresser pour qu'elle se retrouve assise sur la table, la couverture enroulée autour de ses épaules

«Vous faites à peu près ma taille, et je ne pense pas que vous soyez très intéressée par la mode. Je vais vous prêter des vêtements à moi.»

Comment cet homme pouvait-il être encore en vie à Guttenvald? La gentillesse n'était pourtant pas monnaie courante par ici. Il revint avec un pantalon et un haut à manches longues et les lui tendit avant de l'aider à les mettre, ce fut assez laborieux autant pour le haut à cause de ses bandages, que le bas qu'elle ne savait pas du tout enfiler. Une fois habillée mais pieds nus, elle se mit à gigoter en grimaçant, n'aimant pas du tout de porter tout ça! Puis la porte s'ouvrit à la volée avec un chaton tout fier de sa chasse, et le regard de la louve en disait long sur l'intérêt qu'elle portait à sa prise, surtout que son estomac gronda une nouvelle fois! Il parla d'un candélabre mais elle ne savait pas ce que c'était, s'approchant du chevreuil alors que le guérisseur râlait sur le fait qu'il en mettait partout! Mais surtout, il vit la louve se préparer à manger la viande crue et il l'en empêcha

«Non non non!!! On ne mange pas de viande crue quand on est humaine!!! Monsieur Kallistrat, s'il vous plait, vu que vous êtes très fort, vous pouvez juste découper un cuisseau? Je vais le lui faire cuire...»

Attendant que le chaton s'exécute, il soupira et se dirigea en cuisine en répétant à trois reprises à Shara de ne pas manger la viande crue! Il y eut ensuite des bruits de couteau ou de hachoir pendant qu'il préparait le tout, mais ce fut une véritable torture pour Shara de ne pas pouvoir se nourrir alors qu'elle avait un tel festin sous le nez. Le lion gris détourna son attention en lui demandant ce qu'elle faisait dans cette maison, elle passa sa main sur sa tête, là où elle avait encore une belle bosse à cause d'un coup de planche

«Sais pas... Guidouine voulait dormir, mais homme méchant taper ma tête.» elle se souvint alors de son chef de meute qui était tombé, la gorge tranchée et les larmes commencèrent à couler pendant qu'elle baissait honteusement la tête «mais Guidouine mort... Shara toute seule... Shara méchante, pas réussi à protéger Guidouine.»

Elle ne pensait pas à essuyer ses yeux ou son nez qui coulaient, c'était le genre de manière qu'elle ne connaissait pas. Elle leva alors son regard noir vers le chaton, un air particulièrement honteux sur le visage, ne pas réussir à protéger son chef de meute était probablement un crime d'une certaine manière pour elle, et elle savait alors qu'elle n'était vraiment pas forte et qu'elle ne pouvait pas rester toute seule

«Pourquoi Ruchat dans la maison? Ruchat connaissait les méchants?» il n'y avait pas le moindre ton accusateur, on pouvait connaître sans être ami. Elle avait penché la tête sur le côté alors que son nez coulait encore et que le liquide transparent passait jusqu'à ses lèvres qu'elle lécha pour ôter toute gêne, et finalement elle usa du dos de sa main pour se frotter le nez car mine de rien, ça chatouille un peu quand ça coule...

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 06 Fév 2012, 03:31

Kallistrat pencha la tête en espérant mieux comprendre en quoi il avait pu scandaliser cet homme avec sa prise de chasse. Avait-il fait quelque chose de mal ? Il se mit alors à réfléchir très vite. D'après ce qu'il avait compris, certains humains devenaient amis avec les animaux. Ils appelaient alors ça des « animaux domestiques », leur apprenaient des tours et s'inquiétaient beaucoup pour eux, mais seulement pour eux. Par exemple, ils pouvaient être amis avec un lapin. Chaton ne comprenait d'ailleurs pas très bien comment ils pouvaient aimer un seul lapin et refuser qu'on y touche, mais manger tous les autres. De son point de vue, les humains étaient des gens très bizarres. Mais tout à coup il se demanda s'il n'avait pas fait une bêtise, et s'il n'avait chassé et tué par inadvertance le chevreuil domestique du guérisseur... en fait, ce dernier semblait surtout s'affoler que l'un ou l'autre de ses invités ne se mette à manger de la viande crue, et Kallistrat se rappela de Brokk qui avait fait cuire le lièvre roux qu'il avait chassé, quelques jours plus tôt.

Ah oui, les humains faisaient ça : ils brûlaient la viande avant de la manger.

Les petites oreilles grises du chaton gigotèrent subitement en entendant les mots « vu que vous êtes très fort », et l'homme lion se redressa aussitôt afin de prouver qu'effectivement, il était grand et fort. Sur le coup, il se mit même à ronronner ! Découper un cuisseau ? Pas de problème ! Jetant son gibier au sol, il dû s'accroupir pour le maintenir à l'aide de ses deux bras, ses griffes puissantes plantée dans la chair pour empêcher sa proie de remuer alors qu'il attrapait un jarret au hasard entre ses crocs immenses. Et de là, il se mit à tirer comme un forcené, secouant sa grosse tête en grognant furieusement pour faire céder les tendons et les articulations récalcitrantes. Bien entendu, il bava partout et s'y repris plusieurs fois, mordant tour à tour la jambe puis directement la cuisse en se délectant des craquements secs que cela produisait. Au final, il parvint à arracher littéralement une cuisse de sa proie et alla la porter fièrement au guérisseur dont le visage semblait avoir changé de couleur.

Encore un détail que chaton trouva fort curieux, et qu'il compara à la capacité de camouflage des caméléons...

Puis il laissa l'homme s'affairer avec ses ustensiles bizarres et revint vers Shara, se plantant juste devant elle pour discuter. Les bras croisés sur son torse, sa grosse langue nettoyant consciencieusement ses babines, il la fixait avec attention de son air de lion éternellement mal luné.

« C'est drôle comme nom, Chat-Rat, pour un loup. » Constata-t-il au bout d'un moment.

En toute logique, s'il avait dû lui donner un nom, il l'aurait appelée Loup-Femme. Ou Louve-Femme. Pourquoi Chat-Rat ? Ce n'était vraiment pas cohérent selon lui, mais il avait constaté que les noms ne l'étaient jamais vraiment. En revanche, que la jeune femme l'ait spontanément surnomme Ru-Chat lui plaisait assez, et il ne s'en offensa pas du tout. En fait, il trouvait ça plutôt sympathique et si proche de Rusia que ça ne le dérangeait pas du tout.

« Guildouine, c'était l'homme par terre ? Celui avec la crinière blanche ? C'était ton ami ? »

En fait, il n'avait pas vraiment besoin de confirmation à ce sujet étant donné qu'il se souvenait l'avoir entendue pleurer sa mort. De ce qu'il savait, les loups étaient des animaux fidèles, enclins à former des couples. Encore un concept qui lui échappait d'ailleurs. En tous les cas, Chat-Rat avait pleuré ce fameux Guildouine, preuve qu'il devait être son compagnon. C'étaient donc les humains les méchants, selon son raisonnement simpliste de chaton.

« Non je ne les connaissais pas. J'ai seulement entendu que quelqu'un avait peur. »

Ce qui, dans son jargon de bête plus sauvage que réellement « évoluée », pouvait se traduire par quelque chose du genre : « l'instinct ». Et puis bientôt, l'odeur de viande cuite supplanta celle des baumes entêtants, et le ventre de Kallistrat se mit également à gargouiller, mais il attendit sagement que la louve soit servit pour commencer à manger ce qu'il restait du chevreuil, autrement dit une très belle part !

« Mais pourquoi tu étais avec un humain ? Tu étais son animal domestique ? Il sembla réfléchir une seconde. C'était ton mâle ? »

Après tout elle était aussi humaine, alors pourquoi pas ?

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 06 Fév 2012, 17:37

Pendant que la viande grillait dans la pièce d'à côté, Shara étant désormais habillée avec des vêtements d'homme, ne se souciait pas trop de la posture qu'elle prenait. Assise sur la table, les mains posées pile poil entre ses jambes écartées dont les mollets se balançaient un peu, elle regardait le gros chat d'un air curieux alors qu'il lui posait pleins de questions.

«Shara... premier mot que moi prononcer. Donc mon nom à moi.» en réalité, elle avait voulut dire «charabia» ce jour là, un mot que des humains qui passaient près de leur groupe caché avaient hurlé, lorsqu'elle avait repris forme humaine, elle n'avait pu que prononcer les premières syllabes, et comme c'était son premier mot, il était de coutume dans sa famille d'en faire un prénom. C'est sur que cela pouvait être étrange, surtout lorsqu'on était dans la tête d'un gros lion qui faisait de drôles d'assimilations. Elle avait alors souri avec amusement et balançait un peu plus ses jambes jusqu'à grimacé «Aïe. Fait mal.» elle avait ramené sa main sur ses côtes, à gigoter comme ça, ce n'était pas évident et elle entendit le guérisseur crier depuis la pièce d'à côté «Arrêtez de bouger dans tous les sens! Du repos j'ai dit!»

Elle baissa alors honteusement la tête, ses yeux se faisant apeurés avant qu'elle ne prenne la mine boudeuse de celle qui a fait une bêtise et regarde Kallistrat qui ne semblait absolument pas se soucier de toutes ces petites choses. Comment pouvait-il supporter lorsque les humains élevaient ainsi la voix? Elle, ça lui faisait toujours peur. D'ailleurs, elle parla un peu de Gildwin, et Kallistrat lui demanda si c'était bien l'homme aux cheveux blancs, elle avait alors juste hoché la tête et prit de nouveau un air triste

«Oui. Guidouine mon chef de meute. Guidouine sauvé moi alors devenu mon chef de meute.» d'une certaine manière, elle avait plus ou moins répondu à toutes ses interrogations en une seule phrase, elle avait du mal déjà à exprimer ses pensées par des mots, même si Gildwin avait passé pas mal de leurs dernières journées ensembles à lui apprendre un peu de vocabulaire. Elle leva les yeux vers Kallistrat et pencha la tête sur le côté

«Ruchat sauvé Shara... Ruchat nouveau chef de meute?» le regard qu'elle lui lançait était plein d'espoir. Au final, elle ne savait pas si elle pourrait vraiment se débrouiller toute seule, le guérisseur était revenu avec une assiette et la tendait à Shara qui afficha un sourire gourmand alors que l'orphe lion se jeta sur sa carcasse. Elle-même aurait préféré manger la viande telle quelle, mais elle s'exécuta en mordant à pleines dents son cuisseau de chevreuil bien cuit. Visiblement, il avait entendu ce qu'elle avait dit, mais il venait de penser à un truc

«Vous deux, si vous faites équipe, vous feriez mieux de le faire sous forme animale, enfin surtout toi ma belle.» la bouche pleine de graisse qui coulait un peu partout, la louve leva un regard curieux vers le guérisseur. Il n'avait pas dit qu'elle devait rester humaine quelques jours? «Pas tout de suite bien sur, d'abord tu te soignes. Puis après, tu redeviens louve. Et si vous avez un problème de communication, j'ai entendu dire qu'il existait un truc pour que les morphes puissent parler sous leur forme animale...»

Son regard passa alors de Kallistrat à la louve, ni l'un ni l'autre ne semblait comprendre, aussi soupira t'il en reprenant et en mimant par des gestes, mais pas évident d'attirer leur attention lorsqu'ils sont en train de manger, aussi préféra t'il attendre qu'ils terminent. Shara avait encore la bourse de Gildwin avec elle qui était accrochée autour de son cou, aussi le vieil homme la montra du doigt et regarda Kallistrat qui semblait quand même un peu plus évolué qu'elle - ou pas

«Avec ça, vous pouvez acheter un objet qu'elle mettra autour de son cou...» il essayait de mimer tant bien que mal une espèce de petite boule à accrocher autour du cou «et elle pourra alors parler, même si elle est sous sa forme de louve!» de la même manière, ses mains avaient pris la forme d'un canard pour expliquer l'action de parler. Il soupira de nouveau, pas sur qu'ils avaient compris... «Enfin bref, allez chez l'antiquaire et demandez lui un truc pour qu'elle puisse parler en étant louve, il vous renseignera...»

Et puis zut, il était trop vieux pour tout ça. Ils allaient bien se débrouiller, lui il faisait de son mieux pour les aider

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 10 Fév 2012, 20:39

Chef de meute, lui ? Kallistrat ne répondit pas, comme s'il réfléchissait. Seule sa longue queue battait l'air nerveusement derrière lui, trahissant une certaine contrariété. On ne demande pas à un chat d'être chef d'une meute de chiens ! Mais il n'était pas certain que Chat-Rat comprendrait son raisonnement, aussi s'accorda-t-il encore quelques secondes pour y penser, sans se presser. Heureusement, le guérisseur arriva à ce moment là avec le morceau de chevreuil cuit, et chaton put s'en donner à cœur joie de dépecer joyeusement sa prise. N'écoutant l'homme qui leur parlait que d'une oreille distraite, il joua un moment à mâchonner une articulation tout en ronronnant. Affalé par terre comme un gros lion, il venait d'oublier qu'il était aussi à moitié humain, et qu'il pouvait tout de même faire l'effort de se tenir correctement. Oui mais à Zosma, personne ne lui avait appris les bonnes manières.

Finalement, il leva ses yeux verts vers leur hôte et fronça les yeux d'un air pincé face à ses explications. On ne le prendrait pas un peu pour un imbécile par hasard ?

« J'ai compris pour l'objet. On ira chez l'antique air, mais c'est quoi acheter ?
_ Acheter, bon sang. Ça veut dire que vous donnez des pièces à quelqu'un, et en échange il vous donne un objet. Vous avez de l'Ore au moins ?
_ Moi non. Ça se cueille ? Où est-ce qu'on peut en trouver ?
_ Ça ne se cueille pas ! Ça se gagne !
_ Ah. Et on en gagne comment ?
_ Et bien en faisant des missions pardi ! Ou en travaillant.
Expliquait le guérisseur d'un ton de plus en plus désespéré à mesure qu'il réalisait toute l'étendue de l'ignorance de ces deux-là.
_ D'accord, des missions. Vous en avez ?
_ Non je n'en ai pas. Il faut aller au panneau des missions de Guttenvald. Il est sur la place. Vous le trouverez facilement, il y a toujours des types louches qui tournent autour... »


Lassé par les craquements du cartilage qu'il malmenait, Kallistrat se releva et s'ébroua vivement, envoyant des poils – et de la bave – un peu partout autour de lui. Bien, il irait donc voir ce panneau des missions pour gagner de l'Ore qu'il pourra échanger contre un objet chez l'antique air. Les humains avaient vraiment des mœurs très compliquées ! Sa tête massive se tourna ensuite vers Chat-Rat. Maintenant qu'il y pensait, il avait oublié de lui répondre pour la meute. C'est donc après s'être consciencieusement léché les babines qu'il reprit, salivant à moitié sur la viande cuite qui dégageait une odeur intéressante.

« Je suis mon propre chef de meute. Comme ça, personne ne me dit ce que je dois faire. Je vais où je veux et je fais ce que je veux. Annonça-t-il fièrement en bombant un peu son torse velu. Tu peux venir avec moi si tu veux que je surveille tes blessures, et après tu pourras t'en aller si tu en as marre. »

Il se tourna de nouveau vers le guérisseur, présentant au fond de lui qu'il valait mieux lui demander son avis sur leurs projets.

« Il faut qu'elle vienne avec moi voir le panneau des missions ? »

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Messagepar Shara » 10 Fév 2012, 23:28

Si Kallistrat n'était pas des plus délicats pour manger, la louve n'était pas vraiment en reste. Mordant à pleines dents dans la chair fumée, elle se mettait de la graisse et de la viande un peu partout sur la bouche jusqu'aux joues, recouvrant la tenue que le guérisseur avait bien voulu lui prêter de taches disgracieuses. Lorsqu'elle arriva à l'os, elle se mit à le ronger soigneusement alors que Kallistrat et le vieil homme discutaient de l'objet qu'elle devait acheter pour pouvoir rester sous sa forme de louve tout en discutant. Au final, il semblait que chacun était distrait après l'autre, et lorsqu'il fut question de missions ou autres, elle était en train d'essayer de se lécher les lèvres et la joue, mais c'était bien plus difficile avec sa toute petite forme humaine, et elle baissa les yeux, un peu triste en essayant alors de se nettoyer du dos de la main.

Le chaton était revenu vers elle et bomba le torse en expliquant qu'il était son propre chef de meute, ça tombait bien donc? Évidemment, elle n'avait pas tout compris de ce qu'il lui disait, mais le fait qu'il se qualifie de chef de meute suffisait largement pour elle!
«Shara faire tout ce que Ruchat veut alors!!!»

Elle s'était alors levée avec enthousiasme avant de grimacer de douleur pour avoir bougé trop vite. Les mains autour de ses côtes, elle leva ses petits yeux vers lui, brillants mais non larmoyants tout de même. Elle avait encore de la graisse par endroit sur le visage, mais cela n'avait pas vraiment d'importance puisque bon, lorsqu'elle était louve, il n'était pas rare qu'il lui reste des aliments dans les poils. Midi sonnait à l'horloge du guérisseur, et elle se tourna vers le vieil homme alors que Kallistrat demandait si elle devait venir avec lui ou non.

«Je suis pas une auberge. Je l'ai soignée, nourrie et habillée... j'ai fait ma part. Fichez le camp tous les deux! Mais avant...» il prit la petite bourse autour du cou de Shara et en sortit quelques ores pour ses soins - fallait pas exagérer, il était gentil mais à force il y avait des limites - puis il les laissa partir. En soit, elle semblait avoir assez d'argent pour acheter un KIP sans faire de mission, mais les envoyer vers le panneau d'affichage restait une bonne opportunité pour se débarrasser d'eux.

Aussi, la louve se dirigea vers la sortie, évidemment, il serait tout aussi difficile pour eux de trouver ce panneau que de le lire, mais ça, il ne fallait pas compter que l'un ou l'autre n'y pense! C'était comme demander à un bébé de penser à prévenir avant de faire dans sa couche. Ils devaient marcher doucement à cause de Shara et de ses blessures, mais le lion gris ayant une bonne vue, ils trouvèrent rapidement le fameux panneau. Avec un large sourire, la louve regarda un peu les différentes feuilles de papier accrochées partout, pour elle, ce n'était que des dessins bizarres et non une messagerie mais de la même manière, allez différencier des lettres de dessins pour un loup? Une vieille dame sembla les regarder de travers, en réalité, c'était surtout Kallistrat qu'il regardait, forcément, l'orphe était nettement plus impressionnant qu'elle... elle s'approcha de Shara en premier et toucha juste son épaule du bout des doigts


«E... excusez moi, Mademoiselle, Monsieur? Est-ce que vous cherchez du travail?»

La louve sursauta et se tourna vers la dame en battant des cils d'un air stupide «Travail? Ça quoi?»
- «Du travail? Une mission? Vous voulez de l'argent? Des ores?»
- «Aaah! Oui! Mission! Pour acheter KIP!»
c'était la seule chose qu'elle avait compris de toute la conversation du guérisseur. La vieille dame soupira de soulagement et les regarda tous les deux en se retenant de rire
«Écoutez, vous tombez bien. Vous me semblez deux solides gaillards, du genre à savoir vous débrouiller tous seuls hein? Dans la nature tout ça, vous n'avez besoin de personne?»

Une fois de plus, la louve ne comprenait plus rien... la vieille dame semblait comprendre qu'elle s'emballait un peu vite

«Je vous explique. Mon fils est un vrai bon à rien... il ne sait rien faire! Il ne m'aide jamais, ni pour gagner de l'argent, ni même pour les tâches ménagères!» précisa t'elle en voyant qu'ils ne comprenaient apparemment toujours pas «J'aimerais des gens comme vous qui puissiez lui apprendre que dans la vie, on peut très bien se débrouiller quoi qu'il arrive! Vous me l'emmenez dans la forêt et vous lui apprenez à vivre sans moi!!»

L'enthousiasme de la vieille dame faisait bien rire Shara, même si elle n'avait pas tout compris. Elle espérait surtout que Kallistrat au moins avait compris parce que là, ils étaient mal barrés sinon

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 12 Fév 2012, 01:13

Kallistrat fronça son gros nez dans une moue contrariée lorsque Chat-Rat lui promit de faire tout ce qu'il voudrait. Subitement, il venait de se souvenir pourquoi il ne s'entendait pas avec les canidés... cette manie d'obéir à n'importe qui, il avait bien du mal à la comprendre... encore plus à l'accepter. Lui, il aimait bien faire un peu ce qu'il voulait quand il en avait envie. En fait, il suffisait précisément qu'on lui interdise de faire quelque chose pour que l'idée l'obsède complètement... jusqu'à ce qu'il craque – la plupart du temps en moins d'une minute – et le fasse tout de même, malgré l'interdiction. C'était même le goût de l'interdit qui le motivait ! En revanche, dès qu'il se sentait contraint à agir, il refusait obstinément de faire ce qui lui était demandé. Autrement dit, une vraie tête de mule ! En attendant, il commençait à se demander s'il arriverait à s'entendre avec Chat-Rat.

Le guérisseur les salua donc sur un ton qui les invitait à aller voir ailleurs s'ils y étaient, prenant au passage quelques petits objets brillants dans la bourse que portait la louve autour du cou. Sans se faire prier, Kallistrat quitta donc les lieux, la toute petite fille sur ses talons. Toute petite comparée à lui, bien entendu ! L'homme avait dit que le panneau des missions ne serait pas difficile à trouver à cause des types louches qui tourneraient autour. Aussi notre chaton observa-t-il les passants avec attention, indifférent à la coutume qui voulait qu'à Guttenvald, mieux valait baisser les yeux. Près d'une grande pancarte en bois, il repéra plusieurs individus encapuchonnés et jugea que ce devait être ce qu'ils cherchaient. Il s'approcha donc d'un pas décidé et se planta devant le panneau, affichant un air dubitatif devant les petites annonces qui y étaient épinglées.

Zut... il fallait lire ! Et lui ne savait pas.

« Tu sais lire, toi ? »

Mais Chat-Rat n'eut pas le temps de lui répondre, car une femme d'un certain âge s'était approchée pour leur demander s'ils cherchaient des missions. La louve sauta alors sur l'occasion pour expliquer la situation, Kallistrat écoutant patiemment l'échange. Il se redressa même un peu lorsqu'il fut question de savoir se débrouiller et d'être solides, un ronronnement profond lui échappant aussitôt. Les yeux mi-clos pour savourer les éloges qui leur étaient adressées, il écoutait la suite distraitement, jusqu'à ce que la vieille dame soit à court d'arguments.

« C'est d'accord ! On va lui apprendre à se débrouiller, et en échange vous nous donnerez de l'Ore. »

Comme leur interlocutrice approuvait avec un sourire et promettait de revenir avec son fils, Kallistrat se tourna vers Chat-Rat. Dans ses petits yeux larmoyants, il vit qu'elle n'avait pas compris.

« La dame va chercher son fils, et nous devrons lui apprendre à vivre tout seul. Comme les louveteaux. Comme les lionceaux. Il faut le sevrer, lui apprendre à chasser, à conquérir une femelle. En échange, elle nous donnera des Ores. C'est facile, non ? »

Il était presque déçu qu'on ne lui ait pas demandé de combattre une monstre sanguinaire, mais d'un autre côté, Chat-Rat était blessée et ne pouvait pas se transformer en louve. Éduquer un louveteau était donc une bonne idée. Et puis elle n'avait pas besoin d'être louve pour mordre s'il ne faisait pas correctement ce qu'ils disaient. Quelques minutes plus tard, la vieille femme réapparaissait, un grand garçon qui n'avait pas l'air d'être un enfant collé à ses jupes. Kallistrat fronça le nez. Ce n'était pas un enfant... les humains sevraient-ils leur progéniture si tard ?

« Voilà, je vous présente Bernard, mon fils.
_ Bonjour. »
Salua Kallistrat de sa voix profonde.

En guise de réponse, le dénommé Bernard – ça sonnait comme le nom d'un coquillage habité par un crabe – le dévisagea d'un air effaré. Se retrouver nez à nez avec un homme lion de deux mètres qui parle semblait lui faire perdre ses couleurs... il se tourna brièvement vers Shara et déglutit avec difficulté.

« Maman... t'es sûre que...
_ Ne fais pas l'enfant Bernard ! Ils vont t'apprendre, la vie. Sois un homme. Vas !
_ Mais maman...
_ S'il vous plaît, vous voyez bien qu'il n'est pas courageux.
_ On s'en occupe...
Gronda Kallistrat que le jeune homme agaçait déjà. Puis il se tourna vers Chat-Rat d'un air contrarié. On lui apprend quoi en premier ? À se taire ? »

Dans son idée, une bonne paire de gifle lui semblait nécessaire. Gertrude, elle, s'éloignait déjà telle une voleuse.

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 12 Fév 2012, 16:20

Finalement, la vieille dame les avait laissés seuls. L'explication de Ruchat était bien plus simple que tout ce que la vieille dame avait pu dire et désormais, Shara savait ce qu'il leur restait à faire. Il fallait donc sevrer un petit humain? C'était amusant! Elle avait alors sautillé sur place avant de grimacé sous le coup de la douleur. Mais tout comme l'orphe, elle fut surprise de voir un homme adulte, plus âgé qu'elle même et elle le regarda de haut en bas en battant des cils sans comprendre.

Un regard vers Ruchat et elle se dit également que peut être il avait été justement sevré trop tard et que c'était pourquoi la vieille dame avait besoin d'aide. Aussi, lorsqu'il demanda s'il fallait lui apprendre à se taire, Shara se mit à pouffer de rire en mettant ses mains devant sa bouche avant de le regarder de haut en bas. Elle pencha la tête et se tourna vers ce Bernard


«Toi savoir chasser?»
- «Hein? Chasser? Mais pourquoi? Suffit d'acheter la viande chez le boucher!»
commença à dire l'homme d'un air paniqué... elle se tourna vers Kallistrat sans trop comprendre avant de se souvenir que acheter, c'était le truc avec les pièces dorées que justement, ils cherchaient à gagner
- «Tu en as?»
- «Euh là non... mais ma mère...»
- «Pas toucher à mère!! Toi devoir te débrouiller tout seul!»
elle avait mis ses petits poings sur ses hanches et regardait l'homme en fronçant les sourcils. Elle était plus petite que lui, mais il ne lui faisait pas peur pour autant.
«Si toi, pas d'ore, comment faire manger?» il leva les yeux d'un air paniqué sans savoir quoi répondre
«Mais... maman...»
- «Pas maman!! Toi chasser pour manger! Sinon rien manger et mourir!»
il recula encore d'un pas, en train de se dire que là par contre, il était tombé chez les fous. La louve croisa les bras avant de se tourner vers Kallistrat. Le message était plutôt clair et elle ne doutait pas que le chaton allait comprendre un message aussi clair. Ils allaient l'embarquer et l'emmener en forêt pour lui apprendre à chasser, qu'il le veuille ou non! Elle lui montrerait aussi les baies qui se mangeaient et celles qui étaient dangereuses... bref, tout ce que sa propre mère lui avait appris quand elle était petite! Et Kallistrat ferait probablement de même avec sa propre expérience.

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 14 Fév 2012, 23:55

Kallistrat avait froncé les yeux alors qu'il essayait de réfléchir. Ça s'agitait ferme dans sa petite cervelle de chaton. Bernard disait qu'il achetait de la viande. Cela voulait dire qu'il travaillait pour gagner des Ores, et qu'ensuite il donnait ses Ores à quelqu'un contre de la viande... ce que ne comprenait pas l'Orphe-lion. Pourquoi ne pas trouver de la viande tout seul ? Il y en avait plein la forêt. Il y en avait même plein le village : des chèvres dans un enclos là-bas, des corbeaux près de la fontaine ici. Il n'y avait qu'à se baisser. Mais Bernard, plutôt que de ramasser tout seul la nourriture, laissait quelqu'un d'autre se baisser pour lui. En échange, il travaillait pour échanger des Ores contre cette nourriture. Pourquoi ? Pourquoi se fatiguer à gagner de l'argent pour quelque chose qu'on pouvait obtenir tout seul ? Pourquoi faire un travail en échange d'un autre ? Car s'il avait bien tout compris, un travail c'était faire quelque chose en échange de quelques Ores, et donc si Bernard donnait ses Ores pour avoir de la viande, c'est que chasser la viande était un travail.

Mais alors que Chat-Rat tentait désespérément d'apprendre les notions de base à leur louveteau, un feulement contrarié fila entre les dents serrées de Kallistrat. Il venait d'apprendre, par l'aveu de l'humain lui-même, que l'Ore ne provenait pas de son propre travail... mais de celui de sa maman ! À son âge ? Outré et fatigué par ses raisonnements harassants, chaton abattit l'une de ses grosses paluches sur l'épaule de l'humain, faisant exprès d'y mettre tout juste assez de force pour le dissuader de discuter, mais pas assez pour l'écrabouiller – même si l'envie le démangeait.

Bernard sursauta et devint tout pâle.

« Chasser ! » gronda la voix profonde de l'Orphe que la colère faisait rouler comme le tonnerre.

Il ne savait pas trop si c'était à force d'écouter Chat-Rat parler par bribes de phrases qu'il ne prononça que ce seul mot, oui si c'était plutôt l'agacement qui l'incitait à ordonner sèchement, manière à dire « fais ce qu'on te dit ou bien on te fait passer un mauvais quart d'heure ». Toujours est-il que Bernard ne chercha pas à négocier. En fait il n'en eut pas le temps, car le grand lion gris assura sa prise sur l'épaule frêle du grand benêt et le poussa en direction de la forêt. Le cercle qui s'était formé autour du panneau des missions se rompit pour les laisser passer, les visages exprimant des expressions hallucinées face à ce cortège de fous.

Après s'être enfoncés de quelques mètres entre les arbres, Kallistrat consentit enfin à lâcher sa prise. L'homme se retourna et lui lança un regard implorant, l'air de dire qu'il aimerait bien retourner sous sa couette.

« Règle numéro un : se mettre face au vent, toujours. Règle numéro deux : prendre son temps pour analyser la piste. Règle numéro trois : ne pas faire de bruit. Règle numéro quatre : ne pas se précipiter. Attendre et avancer prudemment. Ne sauter qu'au dernier moment, quand tu es sûre que ta proie ne peut pas t'échapper. »

Il se tourna à demi vers Chat-Rat comme pour lui demander de confirmer ses propos, ou pour savoir si elle avait quelque chose à ajouter. Mais lorsqu'il entendit Bernard balbutier quelque chose à propos de ne pas être un animal et de ne pas pouvoir faire ce qu'il demandait, chaton fit volte face et le poussa un peu brutalement.

« Le chasseur ne parle pas, sinon il se fait repérer ! Pas de bruit. Tais-toi et hume le vent. Dis-nous quand tu as repéré le gibier.
_ Mais... JE NE PEUX PAS REPÉRER LE GIBIER !!! Je suis un homme moi, je n'ai pas un odorat comme vous ! »


Kallistrat gronda doucement, sourdement. Il n'y avait pas pensé.

« Bon. On va repérer pour toi la première fois alors. »

Et à ces mots, il ferma les yeux et huma l'air frais et piquant des essences de pins. Au bout de quelques minutes ainsi – Bernard faisant autant de prières silencieuses qu'il en fut capable pour qu'on l'oublie – Kallistrat rouvrit les yeux et interrogea de nouveau Chat-Rat du regard.

« Qu'est-ce que tu en dis ? Il y a un chevreuil et un lièvre rouge je crois. »

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 16 Fév 2012, 00:36

Les yeux de Shara se mirent à briller en voyant Kallistrat s'énerver et attraper l'humain pour l'obliger à se conduire comme un grand! Ça c'était un vrai chef de meute! Grand, fort, impressionnant! C'est sur que comparé à Guidouine, il avait nettement plus l'allure d'un chef, et si le félin estimait qu'il n'avait d'ordre à recevoir de personne et ne semblait visiblement pas prêt à en donner non plus, son instinct de fidélité lui dictait de faire confiance à ce grand chaton gris pour représenter sa meute. Elle avait ramené ses mains devant elle d'un air curieux, les poignets au niveau de la poitrine mais les mains pendantes, un peu comme si elle «faisait la belle» en mode louve.

Ils s'étaient éloignés pour rejoindre les arbres, et de la même manière que Bernard, son odorat était un peu moins développé lorsqu'elle était humaine et pourtant, son habitude et son instinct lui dictait tout de même de se mettre au bon endroit face au vent pour sentir les effluves des créatures environnantes. Elle écouta attentivement les instructions du félin, en soit, elle n'avait jamais eu de leçon de ce genre, elle n'avait fait que voir sa mère et les autres faire, et puis, les loups chassaient en meute, ils étaient un peu moins subtiles que Kallistrat laissait entendre, en général, ils encerclaient leur proie pour la prendre au piège, aussi elle ne dit rien suite à ses explications, mais lorsque le jeune homme se mit à paniquer en disant qu'il n'était pas comme ça, elle sursauta par la peur de son cri


«Pas crier!!» elle avait ramené ses mains sur ses oreilles alors que le grand lion s'apprêtait à humer l'air pour lui, secouant la tête alors qu'elle avait l'impression d'entendre encore ce cri résonner dans sa tête, elle pencha la tête en arrière pour essayer de sentir les odeurs dont il parlait, autant le chevreuil elle arrivait à le sentir, mais l'odeur du lièvre se mêlait à celle des fougères aussi n'arrivait-elle pas vraiment à le détecter

«Pourquoi pas faire piège? Lui pas de griffe et pas de croc...» elle avait ramené un doigt dans la bouche de Bernard pour regarder ses dents et à part une ou deux qui paraissaient un peu pointues, y'avait vraiment pas de quoi déchiqueter quoi que ce soit, puis elle attrapa ses mains pour regarder ses ongles, certes, d'une certaine manière, lorsqu'elle était sous cette apparence, elle ne pouvait pas chasser non plus, aussi pouvait-elle se rabattre sur des baies ou racines en cas d'extrême nécessité, même si elle préférait largement se transformer en louve pour ça. Mais là malheureusement, elle ne pouvait pas, c'était là tout le problème, aussi elle se pencha pour regarder Kallistrat d'un air amusé

«Humains font pièges. Shara déjà tombée dedans!» alors qu'elle aurait du en être traumatisée, on aurait presque pensé que cela avait été une expérience amusante finalement, et pourtant, le piège à loup avait failli lui couper la patte. Toujours est-il qu'elle laissa faire Kallistrat dans un premier temps pendant qu'elle allait récupérer des baies, puis elle les déposa à l'entrée de ce qui semblait être un terrier et les écrasa pour que l'odeur sucrée se dégage largement afin d'attirer le liève, le lapin ou toute autre bestiole qui sortirait par là! Puis elle revint vers l'humain et tendit son doigt vers l'entrée

«Toi caché à côté! Et toi taper sur ce qui sort!» de toute manière, peu importe ce qui sortirait, il y avait de très grandes chances pour que ça se mange, en espérant quand même que ce ne soit pas un renard ou un simple mulot

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 18 Fév 2012, 23:50

Les oreilles du chaton s'étaient aplaties dans son épaisse crinière alors qu'une ride très contrariée creusait son front, juste entre ses yeux. Sur le moment, il fut reconnaissant envers Chat-Rat de rappeler pour la seconde fois au moins en cinq minutes à leur louveteau qu'il ne fallait pas crier. Bon sang ! Ces humains étaient-ils sourds ? Kallistrat regarda Chat-Rat un moment. Si elle lui avait avoué avoir un mauvais odorat en étant humaine, elle semblait en revanche toute aussi offusquée que lui par le raffut que faisait Bernard. Selon notre homme-lion il n'y avait aucun doute, celui-là ne s'était pas pris assez de baffes !

Lorsque la louve proposa de faire un piège, Kallistrat hocha la tête d'un air approbateur. En fin de compte – et après une brève réflexion – il imaginait mal comment Bernard aurait pu courir derrière sa proie avec un corps mal fichu pareil, surtout qu'il l'avait encombré de tissu gênant. Et puis comme l'avait si justement fait remarquer Chat-Rat, il avait des dents ridicules, et il n'avait pas de griffes. En fait, chaton commençait à se demander si les humains n'étaient pas tout juste bons à manger des graines et des plantes vertes. Poussant un bref soupir très franchement exaspéré, il demanda au louveteau de le suivre, laissant Chat-Rat cueillir quelques baies tandis que lui cherchait l'entrée du terrier qu'il avait sentit. Il dû prendre sur lui de ne pas y enfoncer la tête pour en déloger son occupant qui sentait bon la viande fraîche, et laissa la louve déposer les fruits broyés à l'entrée. Comprenant – dans un éclair de génie – la complexité du piège tendu par la louve qu'il admira brièvement, il traîna Bernard en haut du talus surplombant le terrier et l'obligea à s'accroupir.

« Tu attends ici, sans faire de bruit, sans respirer, sans remuer. Quand le lièvre sort, hop ! Tu bondis ! Compris ? »

Il se tourna vers Chat-Rat comme pour lui demander d'appuyer sa méthodologie, puis s'accroupit à quelques pas derrière Bernard qui obéissait par obligation, les larmes aux yeux. Non, ce n'était pas son jour. Lui, il les aurait bien mangés les fruits de Shara, plutôt que de les gaspiller devant le terrier d'il ne savait pas trop quoi.

Quelques longues minutes s'écoulèrent en silence, puis enfin, un petit museau roux apparut timidement à l'entrée du terrier. Le lièvre humait l'air prudemment, sans se douter que deux prédateurs redoutables et un pauvre abrutit n'attendaient que son entrée en scène. Faisant quelques pas sur le bout des pattes, il s'immobilisa soudain, ses oreilles immenses ayant capté un bruit suspect. La seconde qui suivit, il disparut à nouveau dans son terrier ! Bernard s'était retourné d'un air désespéré comme s'il suppliait ses tortionnaires de le laisser rentrer chez lui.

« S'il vous plaît...
_ Tais-toi !!!
Gronda Kallistrat, furieux de voir une si belle prise perdue. Tais-toi, attends, et bondis ! »

Agacé, il rampa jusqu'à lui et d'un geste ferme, plaqua l'homme au sol dans une position qu'il jugea plus propice à l'embûche.

« Ne bouge pas. Pupilles fixes. Ne le rate pas cette fois ! »

À sa voix grave légèrement au-dessus du ton qu'il employait habituellement, il était facile de deviner que le chaton perdait patience. Sa queue fouettait d'ailleurs l'herbe derrière lui d'un mouvement de pendule enragée. D'autres minutes s'écoulèrent, plus longues cette fois, puis le lièvre montra de nouveau son nez. Il avança à pas prudents jusqu'aux baies, renifla, se hissa sur ses pattes arrières pour scruter les environs. Kallistrat en eut deux fentes démentes dans les yeux, prêt à bondir, se retenant tant bien que mal. Il tourna son énorme tête vers Bernard qui affichait un air désespéré et, brusquement excédé, l'attrapa par le col.

La seconde qui suivit, le louveteau exécuta un magnifique vol plané tout droit vers le lièvre sur lequel il s'écrasa lamentablement. Il venait d'être éjecté de sa place par un Orphe-lion révolté par tant d'incompétence, un puissant : « BONDIS !!! » accompagnant l'ellipse impressionnante qu'il fit de sa cachette au lièvre. Un grand « crack » se fit entendre, et Kallistrat ne sut pas très bien si cela provenait du lièvre ou de Bernard. Toujours est-il qu'il se leva, furieux.

« Tu vois ! Ce n'est pas si compliqué ! »

Non mais ! Il resta sceptique une seconde en observant l'humain se redresser en pestiférant des jurons incompréhensibles et se tourna vers Chat-Rat. C'était à lui à présent d'afficher un air désespéré.

« J'ai vu que les gens d'ici enferment des chèvres dans un enclos. Ce serait peut-être plus facile pour lui d'en attraper une qui ne peut pas s'enfuir. Tu crois qu'il faut demander l'autorisation ? »

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 19 Fév 2012, 00:53

Contrairement à Ruchat, Shara avait une certaine patience, peut être était-ce son côté canin qui était aussi un peu plus habitué aux jappements, cris, couinements d'une meute plutôt que les félins qui font quand même un peu moins de bruits dans leur vie quotidienne. En tout cas, le piège était prêt et vraiment ce n'était pas très compliqué d'agir désormais. Évidemment, pas une seule seconde elle n'avait pensé apprendre simplement à ce Bernard à trouver les bonnes baies pour se nourrir, en tant que louve, elle avait besoin de viande et pas de graines, même s'il lui arrivait d'en manger lorsqu'elle reprenait forme humaine, mais sans plus.

Il fallait juste attendre, et malgré ses bandages et ses blessures, elle avat pris sa posture animale. À genoux, les mains bien à plat sur le sol, ses doigts cherchant parfaitement à épouser la forme de la moindre touffe d'herbe pour un appui parfait, ses yeux ne cillant pas alors que Bernard était en train de se dire qu'il était tombé chez les fous, quoi que son regard s'attarda un moment sur la partie postérieure de Shara, légèrement relevée dans une position probablement ambigüe pour un être humain, et ce moment d'inattention qui lui fit louper sa prise la première fois et qui énerva Ruchat!


«Pas crier! Nous faire bruit pour faire croire nous partis! Sinon manger pas sortir!» évidemment, il fallait prendre le mot «manger» comme un nom commun et non comme un verbe ici, et elle ne se doutait pas que peut être certains ne comprendraient pas, mais peu importe. Elle attrapa Bernard et le força à s'éloigner, au début, il crut qu'il voyait là son salut, puis elle le fit revenir dans le plus grand silence - facile pour Kallistrat, beaucoup moins pour Bernard qui commençait à avoir les larmes aux yeux. Il était temps de se remettre en place, et lorsque Shara reprit sa position, l'homme recommença à la regarder d'un air un peu stupide et fut surpris par Kallistrat qui l'avait carrément poussé sur le lièvre, un craque sonore se fit entendre, et alors qu'il demeurait étalé par terre, Shara pouffa de rire, l'orphe demandant s'ils ne pouvaient pas aller voir directement les chèvres enfermées pour l'entraîner à la chasse.

«Humains pas aimer chasser ça. Meute souvent attaquée quand essayer manger chèvres ou moutons d'humains.» soupirant doucement, baissant les yeux de manière honteuse en ne sachant pas comment faire pour éduquer cet humain. Après tout, elle n'avait pas encore eu de petits et n'avait donc pas encore pu découvrir toutes ces petites choses qui viennent avec l'instinct maternel. En tout cas, Bernard se relevait avec difficulté avant de se mettre à pleurer et chouiner et crier en regardant l'état de ses vêtements... car il fallait voir le spectacle, le lièvre avait été tout simplement écrasé sous son poids, aussi était-il couvert de sang, de poils, de terre et d'autres saletés probablement... la louve se mit à rire, ce qui lui fit mal aux côtes et elle s'approcha pour attraper les oreilles du lièvre et le détacher et le montrer au chasseau en herbe

«Toi avoir attrapé manger! Toi maintenant le manger!»
- «Je... je vais pas manger ça! C'est dégoutant!!»
crispant ses doigts, la louve lui mit une gifle phénoménale en ayant bien sorti les ongles, comme elle aurait donné un coup de patte. Les sourcils froncés, elle lui mit le lièvre sous le nez

«Enlever peau! Toi avoir besoin griffe! » évidemment, cela voulait dire un couteau ou autre, mais ce type n'avait rien sur lui pour ça. Elle s'était assise face à lui et réfléchissait avant de lever les yeux vers Kallistrat

«Ruchat va enlever peau et montrer à toi! Mais toi devoir trouver griffe!»
- «Mais vous êtes vraiment tarés en fait!! Je n'aurai jamais de griffes moi!!»
- «SI!! Moi VU! Grandes griffes!»
elle montrait alors la taille d'un couteau puis d'une épée, et ce fut là que l'homme comprit
«Aaaah! Un couteau! Ah oui d'un coup ce serait plus facile... ma mère en a plein..»
- «PAS MÈRE!!! Toi faire tes griffes!!»


Et là, une fois de plus, il ne comprenait pas. Elle lui demandait de devenir forgeron ou quoi? Décidément, ce type était désespérant. Shara se souvenait un peu comment Guidouine faisait du feu pour faire cuire sa viande, alors elle allait essayer d'en faire un pendant que Kallistrat allait montrer à l'autre boulet comment enlever de la peau d'un lièvre. En tout cas, il risquait de rendre encore ses tripes dans cette histoire.

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 23 Fév 2012, 23:35

Planté tout droit en haut du tertre qui surplombait le terrier du lièvre, ses bras puissants croisés sur sa poitrine, Kallistrat observait. Derrière lui, sa queue fouettait l'air avec mauvaise humeur et les deux minces fentes de ses yeux étaient posées sur Bernard qu'il regardait aussi fixement que s'il avait été une proie à massacrer. Silencieux et immobile, il laissait Chat-Rat prendre la relève le temps de se calmer, car oui, il était bien davantage qu'agacé ! À quelques pas, la louve tentait d'expliquer quoi faire de sa prise à cet imbécile d'humain mal léché. Et même si c'était un peu idiot de le constater, l'Orphe se sentit légèrement réconforté de constater qu'il n'était pas le seul que Bernard exaspérait. Aussi la gifle que lui envoya Chat-Rat à travers la figure parut tout à fait justifiée au regard du grand homme-lion. En fait, il aurait même frappé plus fort à sa place !

Décroisant les bras, il sauta au bas de son promontoire et se dirigea tout droit sur Bernard pour se planter juste devant lui cette fois.

« Ça ne va pas ! Gronda sa voix que la colère rendait orageuse. Il ne fait pas d'effort. Nous devons lui apprendre à se débrouiller tout seul et depuis tout à l'heure, c'est nous qui faisons tout le travail. Ce n'est pas comme ça qu'il va apprendre ! »

À ces mots, il arracha le lièvre des mains de l'humain décidément incompétent et se remit à gronder, dominant tout le monde de sa hauteur... et de sa largeur.

« Tu n'es pas capable de chasser tout seul ? Et bien tant pis, tu ne mangeras pas ! Si tu as faim, tu te débrouilles. Chat-Rat, on va le garder avec nous et on le surveillera à tour de rôle. Il ne rentrera pas chez lui pour que sa maman fasse tout à sa place !
_ Quoi ?!! Comment ça je ne rentrerai pas chez moi ? Vous n'allez pas me faire dormir dehors quand-même ? »


Mais Kallistrat n'apprécia pas du tout cette rébellion, et feula sourdement en guise de réprobation. Intimidé, Bernard ne sut plus très bien s'il devait se taire, se révolter, ou se mettre à pleurer, si bien qu'il opta pour un mélange des deux derniers.

« VOUS ÊTES COMPLÈTEMENT MALADES !!! LAISSEZ-MOI PARTIR, JE VEUX RENTRER CHEZ MOI !!!
_ Ce n'est pas chez toi, c'est chez ta maman ! Tu veux un chez toi ? D'accord. Trouves un endroit où construire ta maison. Maintenant ! »


Bouche-bée, Bernard regarda à tour de rôle Kallistrat puis Shara, se demandant comment échapper à ces deux fous. Après quelques minutes d'une longue hésitation, il décampa à une vitesse ahurissante à travers les fourrés, espérant sans-doute leur échapper. L'Orphe le regarda s'éloigner sans comprendre avant de se tourner vers Chat-Rat, un air incrédule arrondissant ses yeux verts.

« Je vais le chercher. » Annonça-t-il calmement en lui tendant le lièvre.

La seconde suivante, il bondissait par-dessus les pyracanthas, des ronces plein la crinière et un instinct de chasse décuplé par le postérieur de Bernard qui courait juste devant lui. Une infime partie de lui – vaguement humaine – lui rappela de ne pas tuer Bernard, et ainsi se contenta-t-il de le plaquer au sol sans le moindre ménagement après un rugissement furieux. La course-poursuite venait de se finir dans un roulé-boulé spectaculaire. Bernard n'avait pas pu aller bien loin, et cette fois, il pleurait réellement, braillant plus fort qu'un âne. Kallistrat assis sur sa poitrine pour l'empêcher de s'échapper encore, il fit signe à Chat-Rat de s'approcher.

« On va dormir ici. Quand il aura vraiment faim, on lui montrera encore comment chasser. Et toi, reprit-il d'un ton beaucoup plus abrupt, tu vas réfléchir à des pièges, puisque tu ne sais ni bondir, ni courir ! »

Tournant une nouvelle fois la tête vers Chat-Rat, l'Orphe fronçait les sourcils en pinçant les narine d'un air écœuré... Manifestement, Bernard s'était fait dessus quand le grand lion avait fondu sur lui.

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 25 Fév 2012, 13:45

Si Kallistrat était habitué à jouer des poings pour combattre, ce n'était pas le cas de Shara. Elle avait bien trop l'habitude d'être humaine, de la même manière, elle n'avait pas une prise très efficace quand elle essayait de tenir quelque chose et probablement qu'elle ne saurait pas vraiment comment porter un objet un peu lourd. Mais dans le cas présent, elle n'en avait pas trop besoin et c'était dans ces là que l'on constatait que finalement, l'orphe était beaucoup plus humain qu'elle.

En tout cas, ce Bernard semblait en avoir tout autant assez qu'eux et s'était mis à courir. Battant des cils sans comprendre, elle laissa Kallistrat aller le chercher avant de s'assoir simplement par terre et attendre. Lorsqu'il revint en tenant l'humain par le col, une odeur désagréable lui vrilla les oreilles, reconnaissant sans le moindre problème l'urine qui avait recouvert son pantalon. Fronçant le nez - ignorant qu'elle pourrait simplement se servir de son pouce et son index pour le boucher - elle indiqua du doigt un ruisseau un peu plus loin.


«Il doit faire sa toilette! Humains utiliser eau pour ça.» en attendant qu'il soit au moins capable de chasser et de se nourrir, peut être qu'ils allaient au moins pouvoir lui apprendre à se laver tout seul? Kallistrat le tenait toujours jusqu'à l'emmener au bord de l'eau. Pensant qu'il ne saurait pas faire ça non plus, Shara se pencha dans l'eau et commença à utiliser ses mains pour laver son visage et son cou. Elle avait vu Guidouine le faire quelques jours plus tôt et savait donc que ça fonctionnait comme ça.

«Voilà. Toi frotter comme ça! Mais pour ça...» elle désigna sans la moindre pudeur son entrejambe sans la toucher cependant «tu dois entrer dans eau!»
- «Non mais vous me prenez pour qui là!!! Ça va! Je sais me laver tout seul!! »
petit élan de courage ou d'égo allez savoir, en tout cas, il trempa juste un doigt dans l'eau pour se rendre compte que...
«Mais... c'est glacé!!! Je vais choper une pneumonie si je me baigne là dedans!!»
- «Soleil, là! Toi sécher!! Oust!»
elle commençait à en avoir assez de ses jérémiades, chaque fois qu'il ouvrait la bouche, c'était pour se plaindre et Shara finit par le pousser carrément dans l'eau. Ce n'était pas profond, mais lorsqu'il tomba assis dans le ruisseau, il avait tout de même de quoi recouvrir ses hanches et ses jambes, donc juste assez pour laver son pantalon! «Et frotter! Toi sentir pas bon!! Faire fuir le manger!»

C'était le cas de le dire avec une odeur pareille. Elle alla se placer un peu en amont par rapport à lui, ne doutant pas que Kallistrat l'empêcherait une fois de plus de prendre la poudre d'escampette, et il fallait croire que s'être fait rattraper une fois lui avait servi de leçon. Shara était assez loin pour ne pas que l'odeur et le goût désagréable de Bernard ne pourrisse l'eau et elle se pencha donc pour boire un peu, comme elle le ferait sous son apparence animale, les mains bien accrochées à la berge, les fesses en l'air et la tête presque dans l'eau. Sa langue ne lui permettait pas de récupérer l'eau correctement aussi elle avait carrément mis ses lèvres dans le ruisseau pour aspirer - on fait comme on peut, et elle prouvait de cette manière être suffisamment intelligente pour s'adapter toute seule. En se relevant, elle remarqua qu'elle avait trempé ses cheveux en buvant et secoua la tête violemment pour les essorer, Bernard lui tournait le dos et n'avait pas pu observer tout ça en tout cas.

Elle pencha la tête sur le côté et trouva un peu de mousse, reniflant doucement, elle se mit à gratter la pierre et en récupéra un peu qu'elle roula ensuite pour faire une boule et revint en sautillant vers Bernard pour la lui tendre.
«Ça, mousse nettoyante!! Utiliser pour laver!»

Il prit alors la mousse et resta quelques secondes avant d'écarquiller les yeux
«Vous plaisantez? Vous savez combien ça coute ce truc??? Si vous me montrez où je peux en trouver, je n'aurais plus besoin de travailler!!! J'aurai seulement à en cueillir et la vendre après! Vous avez trouvé ça où?»
«Difficile à trouver. Petit rocher couvert de mousse, pas plus.»


En réalité, cela se trouvait assez souvent près des rivières, mais en petites quantités à chaque fois. Mais après tout... elle se tourna vers Kallistrat, l'air intrigué

«Lui pas bon en chasse. Peut être bon en cueillette?»
- «Oui! Oui! Cueillette, c'est bien ça hein? Je pourrai manger, et aussi vendre ce que je cueille hein? Et avec les ores, je pourrai faire construire ma maison hein?»


On sentait qu'il prenait un peu espoir d'un coup. En soit, il ne voulait pas plus que le reste travailler en cueillant des trucs pour l'herboristerie, mais s'il réussissait à le faire juste le temps que ces deux là croient qu'ils avaient accompli sa mission, il pourrait au moins s'en débarrasser et retourner chez sa mère. Mais Shara ne l'entendait pas de cette oreille

«Non! Pas FAIRE construire! Toi construire ta maison!! Demander à autres de faire pour toi, pas être un homme!! Ru-Chat dit toi construire maison! Toi construire maison!»
- «Mais... ça prend des jours pour construire une maison!!! Il faut savoir le faire! Je n'ai pas ce qu'il faut pour avoir une cuisine, une salle d'eau, un lit...»
- «Pas besoin ça! Besoin toit, lit, et construire maison à côté de ruisseau pour avoir eau! C'est tout!»
- «Mais hé!! Vous voulez que je vive comme un sauvage ou quoi?»


Elle fronça alors les sourcils et se mit à quatre pattes en grondant - ce qui était nettement moins impressionnant que lorsqu'elle était en louve, il fallait le reconnaître - et s'apprêtait probablement à se transformer jusqu'à ce que son intense respiration comprime les bandages autour de son torse et la rappelle à l'ordre. Elle n'aimait pas le mot sauvage, sans savoir pourquoi d'ailleurs... en tout cas là, il l'avait énervée et elle allait devoir se calmer si elle ne voulait pas se transformer sur le coup de la colère et risquer de se blesser gravement.

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 11 Mar 2012, 12:23

Kallistrat approuva d'un hochement de sa grosse tête l'idée de demander à Bernard de se laver. D'autant que dans son esprit, n'importe qui était capable de le faire et ils n'auraient pas besoin de lui expliquer ni lui faire de démonstration pour que l'humain s'en acquitte tout seul. Malheureusement, c'était sans compter sur son insupportable mauvaise volonté. Chat-Rat dû intervenir et le pousser à l'eau pour l'obliger à obéir, et Kallistrat se campa sur la berge, bras croisés sur son torse velu, les yeux résolument fixés sur sa proie au cas où elle s'aviserait de se carapater.

« Frotte. »

Sans enthousiasme, Bernard fit semblant de se frotter les bras par-dessus sa chemise. Le grand Orphe-lion paraissait suffisamment dupe pour croire qu'il se lavait et c'était tant mieux, car si l'humain n'appréciait déjà pas d'être trempé jusqu'aux hanches, il était hors de question pour lui de se mouiller plus loin. Ces deux animaux étaient complètement cinglés ! Pourquoi sa mère lui faisait-elle subir une telle épreuve ? Il levait parfois les yeux vers Kallistrat qui le surveillait toujours – totalement indifférent aux charmes de Chat-Rat qui n'étaient définitivement pas son genre. Bernard continua donc son petit manège en tremblant de froid, et lorsqu'il s'extasia sur la mousse que lui avait apportée la louve, l'homme-lion fronça les sourcils.

« Non ! Tu peux chasser pour manger et cueillir des plantes pour te soigner, mais seulement si tu as faim et seulement si tu es blessé ou malade. On ne tue pas pour des Ores et on n'arrache pas toute la forêt pour des Ores ! » Gronda-t-il d'une voix contrariée.

À ses mots, il se décida enfin à décroiser les bras et se pencha pour attraper Bernard par le col et le soulever. Il le reposa un peu brutalement sur la berge et se tourna à son tour vers Chat-Rat.

« D'accord, on va lui apprendre à cueillir des fruits. Ensuite on lui montrera comment construire un nid, comme les oiseaux. »

Assénée sur un ton grave, la plaisanterie sonna comme une ironie cinglante aux oreilles de Bernard qui pestait à présent contre son pantalon détrempé et le fait qu'il avait froid. Agacé, Kallistrat le poussa devant lui du plat de la main pour l'obliger à avancer.

« Là ! Rugit l'homme-lion en montrant un énorme champignon rouge à pois blancs. C'est un très mauvais champignon, il ne faut jamais le cueillir. On va te montrer ce qui se mange et ce qui sert à soigner. Ouvre tes oreilles, on ne va pas répéter, tu nous énerve. Chat-Rat, tu veux expliquer pendant que je le surveille ? »

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 21 Mar 2012, 16:32

La situation devenait un peu difficile à gérer. Il fallait reconnaître que Shara et Kallistrat n'étaient pas les plus doués en pédagogie humaine, n'ayant pas vraiment l'habitude de ce genre de pratique en réalité. Cependant, il était temps d'essayer de lui apprendre certaines petites choses, et ils s'engouffrèrent donc un peu plus loin dans la forêt. Kallistrat fut le premier à montrer des champignons qui s'avéraient être dangereux à manger, puis il s'était tournée vers Shara afin qu'elle poursuive. Le problème, c'est qu'elle aussi était un carnivore et il n'y avait pas énormément de plantes qu'elle connaissait! En tout cas, elle soupira et se baissa un peu, ses bandages lui faisaient désormais un peu mal, peut être était-elle en train de trop forcer.

Elle tendit alors le bras et montra de beaux champignons beiges avec un tout petit anneau autour du pied


«Si champignon a petite jupe, pas bon! Pas manger!» dans ce cas de figure, il s'agissait d'amanites phalloïdes, aussi vraiment dangereuses, mais un peu plus loin, on pouvait voir de jolis petits champignons tout oranges «Ça bon!» elle coupa doucement le pied de façon à en laisser un petit bout «Pas arracher! Sinon champignon plus pousser après! Si on laisse un bout, ça fait des petits!»

Elle le lui tendit en souriant d'un air amusé «Toi, manger!!»

Si jusqu'à présent, Bernard avait à peu près suivi sans rien dire - après tout, il pouvait aussi cueillir des champignons pour les vendre, mais il n'en dirait rien à ses deux tortionnaires, il recula avec un air de dégoût

«Berk... je vais pas manger ça comme ça! Faut les cuire!»
- «Cuire?»
la louve battit des cils avant de regarder la petite girolle avant de la mettre dans sa bouche sans même la laver vraiment et il recula sans comprendre

«Non mais vraiment vous êtes fous...»

Le regard de Shara devint triste alors et elle regarda Kallistrat en hochant de la tête de gauche à droite

«Lui vraiment pas gentil. Lui pas faire effort. Shara plus savoir quoi faire.»
- «Eh oh! Ça va hein! Dites tout de suite que je suis un cas désespéré!! C'est vous qui voulez me faire vivre comme un animal!!»
- «Toi trouillard, toi fainéant, toi rien vouloir faire tout seul. Toi ni homme, ni animal. Toi bébé.»
- «Non mais pour qui elle se prend celle la??»


Il semblait sur le coup un peu oublier qu'il avait un lion de deux mètres derrière lui, mais en tout cas, il se gonflait un peu, bombait le torse en essayant d'être menaçant envers Shara qui semblait s'en moquer totalement, étant simplement triste de voir qu'elle n'arrivait vraiment à rien avec celui la...

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Kallistrat Rusia » 29 Mar 2012, 01:33

Certes, lorsqu'il s'agissait d'attendre une proie à la sortie de son terrier, Kallistrat savait faire étalage d'une patience quasi infinie... en revanche en compagnie d'un Bernard l'ermite plus sédentaire qu'un ours en hibernation, le mot « patience » lui-même semblait lui être tout à fait inconnu. Agacé chaque fois que l'humain ouvrait la bouche, il en eu le cœur serré de voir le regard désespéré de Chat-Rat face à ses échecs répétés à faire entendre quoi que ce soit à cet imbécile heureux. En fait, Kallistrat sentait grimper en lui une furieuse envie d'éduquer Bernard à coup de mandales... Mandale qui finit par s'abattre sans prévenir sur l'une des joues de l'humain définitivement réfractaire à toute sorte d'apprentissage.

« Écoute ce qu'on te dit et arrête de te plaindre ! Gronda-t-il.
_ Non mais ça va pas de frapper comme ça !!? Vous avez faillit me déboîter l'... »

Une nouvelle gifle le fit taire brusquement alors que la voix profonde de l'Orphe lion retentissait comme s'il feulait.

« Écoute et arrête de te plaindre j'ai dit ! »

Après avoir titubé sur quelques pas devant lui sous la violence des deux coups successifs, Bernard porta les mains sur sa joue. Elle était en feu et barrée d'une estafilade qui commençait à saigner légèrement – c'est que le chaton avait les griffes acérées. Sidéré, l'homme jetait sur Kallistrat un regard empli d'une panique non dissimulée. La tête lui tournait après cette remise à l'ordre musclée, mais il hésitait à se rebiffer de nouveau. Finalement, c'était plus facile de s'en prendre à Shara, aussi l'homme lui jeta un regard noir.

« Faites ce que vous voulez, moi je ne bouge plus d'ici. J'en ai marre de vos histoires de survie en forêt ! Je suis un homme moi, un HO-MME. Je ne mange pas n'importe quoi, et je ne le mange pas cru ! »

Mais à peine eut-il le temps de terminer sa phrase chargée de reproches qu'une nouvelle fois, la grande patte du chaton s'abattit sur sa joue, le secouant tellement qu'il en tomba assis.

« AH ÇA SUFFIT !!!
_ Tais-toi, écoute, et arrête de te plaindre ! Je frapperai à chaque fois que tu parlera mal à Chat-Rat. Je frapperai aussi quand tu te plaindras et je frapperai quand j'en aurai envie jusqu'à ce que tu deviennes un homme ! Tu m'énerve ! Avance ! »


Et sans ménagement, Kallistrat poussa Bernard devant lui pour la seconde fois en quelques minutes, l'obligeant à avancer.

« Cherche un autre champignon, on te dira s'il est bon. Il se tourna ensuite vers Chat-Rat, un peu désolé qu'elle ait été traitée ainsi par cet humain stupide. On va d'abord lui montrer ce qui est bon et ce qui n'est pas bon. Ce n'est pas un chasseur et il a l'habitude qu'on lui apporte tout sans chercher, et sans se fatiguer. Comme les chèvres dans les enclos. On va lui apprendre à trouver sa végétation tout seul, et après je lui apprendrai le feu. Je sais faire, j'ai appris à Zosma.
_ Eh je suis pas une ch... »


Il n'eut même pas le temps de finir sa phrase, une quatrième gifle l'interrompant de plein fouet.

« À Zosma, c'est comme ça qu'on remet les lionceau dans le rang... mais les lionceaux comprennent plus vite... Avance et cherche. »

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Re: Comme les deux doigts d'la patte

Messagepar Shara » 01 Avr 2012, 18:30

La situation aurait pu être risible pour n'importe qui, mais pas pour Shara qui n'arrivait pas à comprendre ce qu'il se passait. Elle avait lancé un regard un peu triste à l'attention du chaton, puisqu'elle commençait à désespérer sur la possibilité de faire quelque chose de ce Bernard. Mais Ruchat avait décidé de prendre les commandes et administra une violente gifle à l'humain qui se rebiffa une première fois avant de s'en prendre une autre. Il expliqua brièvement que c'était ainsi qu'ils éduquaient les petits chez lui, et la louve devait reconnaître que c'était également ainsi qu'ils éduquaient les louveteaux trop téméraires dans sa meute, mais en général, ça fonctionnait tout de suite alors que là non plus, ça ne semblait pas vraiment efficace.

Voyant que Ruchat prenait les choses en pattes, elle le suivit docilement pour continuer l'étude des champignons, après tout, elle le considérait déjà un peu comme son chef de meute alors elle se devait de lui obéir. Les bras le long du corps, les jambes fléchies, elle se mit à côté de Bernard en attendant de le voir chercher, il la regarda alors avec des yeux mesquins


«Qu'est-ce que tu me veux?» il avait les joues gonflées par les gifles répétées du lion gris, et ses yeux larmoyaient un peu, mais il gardait toujours cet air de défi de celui qu'on ne changera pas. Shara eut seulement un regard triste et détourna les yeux pour regarder le sol, et étrangement, cela sembla le déstabiliser juste un peu... sa mère avait tout de même du lui apprendre à ne pas faire pleurer les filles

«Euh.. beuh...» mais quelqu'un de pas doué reste pas doué. Shara ne le regardait plus sans pour autant se défaire de son regard avant d'ouvrir la bouche «Chercher champignon pour manger. Moi pas chercher, moi juste dire si champignon bon.»

L'égo sembla revenir au galop, mais au moins ne lui donnait-elle pas d'ordre à proprement parler comme le faisait le lion à qui il lança un regard mauvais. Finalement, se faire une alliée de la femme était peut être le meilleur moyen de s'en sortir sans trop de bobo. User de l'instinct maternel avait toujours été une très bonne arme pour lui puisqu'il s'en servait constamment sur sa mère. Aussi, il soupira dans un geste presque théâtrale et trop peu discret pour être sincère avant de se baisser et de chercher. Il fouilla quelques buissons et trouva de gros champignons un peu marron, les pointa du doigt et ne s'adressa qu'à Shara, ignorant royalement Kallistrat pour le moment... il allait devoir les amadouer l'un après l'autre

«Je crois que ça, c'est bon. Ma mère en cuisine parfois. Ce sont des cèpes, non?»

Un léger sourire se dessina sur le visage de Shara, elle ne connaissait pas le nom des champignons, mais elle savait qu'ils étaient bons «Oui! ça bon! Toi couper sans arracher! Moi regarder!»

Il se baissa alors, mais n'ayant rien pour couper le pied, il le cassa simplement, puis il le mit de côté avant de faire de même avec tous et les montrer à Shara de cet air enfantin de celui qui a accompli un exploit. Et si la louve était tout de même contente qu'il y soit arrivé, elle n'était pas stupide au point de qualifier cela d'exploit

«Bien. Continuer»
- «Euh... il faudrait peut être un truc pour les transporter non? C'est pas vraiment pratique ainsi.»
- «Toi utiliser ça!»
elle avait pointé du doigt la tunique et il grimaça en se disant que ça allait encore plus le salir, mais un simple regard sur Kallistrat lui fit comprendre qu'il n'avait pas intérêt à rechigner. Soulevant son haut en dévoilant une part de son ventre poilu, il y mit les quelques cèpes et reprit la marche. Il avait le sentiment qu'il aurait plus de mal que prévu à amadouer la louve, aussi il se tourna vers elle, d'un air presque désespéré

«Je... j'ai faim. On... on ne pourrait pas passer au feu tout de suite?» au moins qu'il ait le ventre plein pour supporter leurs conneries... même si ce n'était pas avec quelques champignons qu'il allait être repu

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