par Benedikt » 01 Juin 2014, 05:18
L’orphe tigre hocha la tête en entendant Vrass.
« Ouais, on vivait dans cette maison en ruine où vous êtes passés mais on était en voyage à Ephtéria quand Benedikt est né. Ma mère l’attendait pas avant plusieurs semaines, c’était une surprise, c’pour ça. »
Et l’intéressé n’allait pas avoir plus de répit parce qu’ils redescendaient déjà, et que Vrass fila directement vers les cuisines. Le botaniste s’était caché sous une table en entendant quelqu’un rentrer dans la pièce, et regarda la main de Vrass se tendre vers lui avec un soupir désespéré. Mais de toutes manières, il ne pouvait pas rester là trois jours, non ? Une voix dans la tête de Benedikt répliqua que si, pourquoi pas, après tout, c’est sûrement possible de s’habituer à vivre sous une table de cuisine et il y a de l’eau et à manger à portée de main, hein. Il attrapa la main de Vrass pour sortir de là-dessus, parce que ce genre de pensées montrait bien qu’il deviendrait fou rapidement.
« Je ne me posais pas de questions… » murmura le petit botaniste qui suivait Vrass à contrecœur.
Je devrais être content, pourtant, pensa-t-il avec amertume. Mais au final, c’était simplement très confus. Il ne connaissait pas cet homme, et il ne se souvenait pas de lui. L’inverse n’était pas pareil, pourtant, et c’était embarrassant. Ce type l’avait vu quand il savait à peine marcher. Et si ce n’était pas vraiment son frère ? Mais il n’y avait guère de doute à ce stade. Benedikt avait eu beau retourner dans sa tête les possibilités qu’il mente ou qu’il se soit trompé, tout collait vraiment trop bien.
Le petit botaniste s’assit à une table de la salle à manger où l’homme s’était installé. C’était encore plus embarrassant de le retrouver avec avoir fui devant lui comme un lapin devant un tigre.
« Ah, je… je ne connais pas votre nom, en fait ? » finit-il par lâcher.
« C’est vrai… Je croyais que tu le savais, vu que t’as débarqué dans ma boutique. Finn Winther. Et tu peux me tutoyer, tu sais ! » - et l’orphe tigre tend une main vers lui, comme pour refaire des présentations, un peu plus calmement et de façon un peu plus accueillante. Peut-être que l’air de lapin du botaniste lui faisait pitié. Benedikt se sentit absolument stupide de la serrer mais s’exécuta quand même. Il était d’un silence et d’une réserve rarement égalée ; Vrass devait bien s’amuser de voir son botaniste qui caquetait constamment avoir le sifflet coupé, pour une fois. Décidément, ces derniers temps, il en faisait des histoires. Mais à sa décharge, on ne lui pas avait pris appris la nouvelle avec des pincettes, non plus.
L’orphe en question, Finn, maintenant, et le petit botaniste pensa qu’il était bien incapable pour l’instant de l’appeler grand frère, l’appellation semblait aussi incongrue que s’il avait appelé Iza comme ça, Finn, donc, finit par prendre la conversation en main parce que ça semblait nécessaire pour en avoir une, de conversation.
« Elles ont fait quoi tes ailes, là, elles se sont arrangées comme ça ? »
« Non, heu… Il n’y a pas longtemps, elles ont repoussés. »
« Et tu es herboriste, maintenant ? »
« Oui… »
« Pour Sayah… »
« Pour Sayah. »
Benedikt plongea un regard dépité mais reconnaissant devant la tasse de thé que venait de déposer devant lui l’aubergiste, avec le reste de leur petit-déjeuner qu’ils n’avaient pas encore pris. Puis prit une grande inspiration :
« Je peux vo-te poser une question ? »
« Vas-y ! » répondit un peu trop vite Finn qui semblait en avoir marre de parler un peu dans le vide.
« Pourquoi est-ce que j’ai fini dans un orphelinat d’Ephtéria ? Il n’y a personne qui m’a cherché après ? »
Après tout, ça ne pouvait pas être si difficile que ça d’aller voir dans le seul orphelinat de la ville, alors que c’était là qu’on emmenait généralement les gamins trouvés, non… ? Non que le petit botaniste voulait paraître pleins de ressentiment, mais…
« Mmh, personne n'allait le faire à ce moment-là. Mes parents, enfin les nôtres, ont été tués par des brigands de passage qui nous ont emmenés plus avec eux dans l’intention de nous vendre toi et moi, sauf qu’ils se sont aperçus au bout de plusieurs jours qu’ils n’arriveraient pas à trouver quelqu’un qui voudrait de toi alors que tu étais bien trop jeune. Et puis aussi, tu leur tapais sur les nerfs je pense parce que tu pleurais toute la journée. Ils avaient coupés les antennes que tu avais pour que tu ais l'air moins orphe, aussi. Donc ils t’ont débarqué dans une rue d’Ephtéria, et moi j’ai été laissé dans une maison de nobles vers ici. »
Benedikt se demanda sur le coup si c’était raisonnable d’aller filer se cacher encore quelque part. Comment était-il sensé se débrouiller avec ça ? Finn avait encore moins une manière douce d’annoncer les choses ; et apprendre à son nouveau petit frère que ces nouveaux parents qui n’existaient pas même pas encore vraiment dans sa tête étaient morts depuis bien longtemps de cette façon-là n’était apparemment pas la bonne. La preuve était vu comment le petit frère en question s’était raidit comme s’il venait de lécher un bol de larmiqueuse, et semblait maintenant faire tout son possible pour rester calme. L’histoire en elle-même était trop violente pour ses nerfs, au final.
« D’ac-cord. Okay. » murmura le petit botaniste. « Je ne pose plus de questions. »