Le petit botaniste hocha la tête en entendant les paroles de Vrass. Ce n’était pas une mauvaise idée, en revanche, le cœur de Benedikt battait bien plus vite qu’il n’aurait osé l’admettre en pensant à se balader tout seul dans l’antre du loup.
« Très bien… Je m’en occupe et je reviens. » acquiesça-t-il. Il attrapa la main du tatoueur pour la serrer dans la sienne et mit la – bien heureusement – grande capuche de son manteau. Puis s’éloigna pour rejoindre le port.
Là-bas, le petit botaniste entreprit de rentrer dans quelques boutiques sans rien acheter, mais il était difficile d’obtenir quoique ce soit d’utile. Les gens refusaient d’avoir une discussion à propos de ce qui concernait les winghox d’à côté, trop effrayés. Et Benedikt comprenait pourquoi lorsqu’il rentra dans une troisième boutique où se trouvait carrément un winghox en train de discuter à voix basse avec le vendeur. Ce n’était de toutes évidences pas pour lui demander du poisson, et le petit botaniste se demanda si c’était seulement de la paranoïa que d’avoir cru entendre le nom de Vrass.
Aussi Benedikt décida qu’il était temps de prendre une autre approche. Il suffisait simplement de passer par des endroits où les winghox n’auraient pas idée d’aller, mais qui lui était personnellement facile d’accès. Et il y avait bien une solution qui répondait à ces critères ; les toits de la ville. Benedikt s’éloigna un petit peu du port, dans une ruelle, pour trouver un endroit calme et propice à l’escalade. L’avantage avec les vieilles villes de Païlandune, c’est que ce n’était pas des gratte-ciels imprenables comme à la Basse-ville. Les maisons étaient biscornues et serrées les unes contre elles pour gagner de la place, sans compter les ruelles minuscule où il suffisait d’un petit saut d’un toit à l’autre pour passer de l’autre côté. Benedikt n’eut pas besoin de beaucoup de temps pour rejoindre les environs immédiat de l’auberge. Il n’y avait bizarrement pas beaucoup de winghox qui se trouvaient autour de la bâtisse. Il y en avait deux qui semblait monter la garde, un en balade sur le port et l’autre assis sur une chaise juste devant l’auberge, mais rien d’autre, ce qui donna un peu d’audace au petit botaniste qui se glissa sur le toit même de l’auberge.
Il tenta de regarder par quelques fenêtres, mais c’était d’autant plus difficile qu’il risquait chaque fois de se faire repérer trop facilement. Il n’y avait pas l’air d’avoir énormément de monde dans les étages, mais le petit botaniste avait failli se faire voir par une chambre occupée par une tripoté de winghox. Nathan et ses mères étaient probablement dans une pièce où il n’y avait pas d’aussi grandes fenêtres, aussi il était inutile de chercher là. En passant de l’autre côté du toit, le botaniste s’aperçut que l’auberge possédait une arrière-cour pavée de pierre. Elle servait apparemment à laver et étendre le linge, et un minuscule poulailler avait aussi été aménagé dans un coin. Mais, plus important pour le petit botaniste, elle pourrait bien être utile pour aller jeter un coup d’œil sans se faire repérer.
La hauteur était trop bien importante pour que Benedikt ne saute sans se faire très mal, mais il y avait une dépendance, collée au bâtiment principal, qui n’avait qu’un étage et qui servirait très bien de pallier entre les deux. Le petit botaniste n’arrivait peut-être pas à voler, mais avec son poids diminué par un de ses tatouages, il pouvait au moins ralentir ses chutes en battant des ailes. Aussi il retomba prestement sur les pavés, accroupit comme un lièvre à l’affut du danger. Il y avait une fenêtre qui devait donner sur les cuisines, pas loin de lui, et le petit botaniste se faufila jusqu’au mur où elle se trouvait pour se plaquer contre.
Il n’eut le temps que d’entendre le bruissement léger d’un drap étendu et celui d’un ou deux pas avant que ce ne fut cette fois des mots qui atteignent ses oreilles :
« Qu’est-c'que tu fabriques, toi ? » La phrase, murmurée juste dans son oreille et au ton juste légèrement menaçant, fit sursauter le petit botaniste tellement fort qu’il laissa échapper une exclamation. Benedikt aurait filé comme une belette si une main ne s’étaient pas en même posée sur son épaule pour attraper son manteau. Le botaniste, en se retournant, se demanda bien comment il avait pu ne pas voir quelqu’un d’aussi imposant, mais un coup d’œil suffit pour lui faire comprendre que la dépendance avait un petit porche qu’il n’avait pas pu voir de dessus, lorsqu’il se trouvait sur le toit. Benedikt avala sa salive avec difficulté et tenta de garder son calme.
Quelque part, s’il le faisait rentrer à l’intérieur de l’auberge, il aurait la possibilité de voir exactement combien de winghox il y avait à l’intérieur, et où. Sa bague lui permettrait aussi de donner ces informations à Vrass. Encore fallait-il qu’il reste vivant jusque-là…
« Je suis… Je voudrais parler à votre chef. J’ai des informations à lui donner. »
« Ah ouais, et y a vraiment un truc intéressant que ton cul de moustique pourrait nous dire ? » - Le winghox étira un sourire et leva son poing.
« Si tu voulais parler à not’ chef, fallait passer par la porte d’entrée. »
« Je viens de la part de Vrass Rannveig ! » s’exclama aussitôt Benedikt en paniquant, incapable de trouver une autre idée. Le poing du garde s’arrêta à un ou deux centimètres de son visage, et le visage de celui-ci prit une couleur étrange, un peu violacée.
« Ah ouais, vraiment ? Je promet que t’as intérêt à apporter quelque chose de valeur, sinon je me fais un plaisir de te tordre le cou, j’aime pas les sournois dans ton genre qui se glisse par derrière. »